LE QUOTIDIEN DU PHARMACIEN. - La profession de courtier en médicament est-elle réellement nouvelle en France ?
CAROLINE CAZAUX. - Effectivement. Car si l’activité de courtage existait, elle n’était pas réglementée, même si elle était régie par le code du commerce. Désormais, elle entre dans le code de la santé publique et est soumise au contrôle de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM).
De quel délai disposent les structures pharmaceutiques pratiquant le courtage pour se mettre en conformité avec les nouvelles dispositions ?
Jusqu’au 1er avril. Il n’y a donc pas de temps à perdre, car les sanctions prévues ne sont pas à prendre à la légère. En effet, l’ANSM peut aller jusqu’à suspendre leur activité. Quel serait alors l’intérêt d’une structure si elle ne peut plus négocier ?
Les courtiers devront-ils détenir un diplôme de pharmacien ?
Non, il n’y aucune obligation d’être diplômé en pharmacie. Le texte précise même que l’activité de courtage de médicaments est exclue du champ des activités qui ne peuvent être effectuées que dans des établissements pharmaceutiques. En fait, n’importe quel type de société pourra exercer une activité de courtage et il n’y a d’obligation d’avoir un pharmacien responsable.
Le code de la santé publique (CSP) n’interdit-il pas à un pharmacien d’acheter à un courtier ?
Le CSP comporte en effet une mention qui interdit à un pharmacien de recevoir des commandes par l’intermédiaire de courtiers. Or cette disposition n’a pas été supprimée du CSP et on a aujourd’hui une autre disposition qui définit le courtage de médicament comme toute activité liée à la vente ou à l’achat. La question de la coexistence de ces deux dispositions va donc se poser…
Le courtage concerne-t-il seulement les spécialités OTC, comme pour la vente sur Internet ?
Non, l’achat et la vente de tous les médicaments, remboursables ou non, peuvent être négociés par un courtier, le texte ne le précisant pas.
La création du statut de courtier est-elle de nature à lutter contre la contrefaçon de médicaments comme l’entend la directive européenne transposée par le gouvernement ?
Je n’en suis pas sûre. En réalité, il y a un glissement qui est en train de s’opérer dans le CSP. Car jusqu’à présent, le CSP reposait sur le principe du suivi physique du médicament pour assurer une traçabilité parfaite. Le courtier, lui, pourra difficilement lutter contre la fraude car il ne voit jamais les médicaments. Certes, il doit s’assurer que les spécialités dont il négocie les conditions commerciales disposent bien d’une autorisation de mise sur le marché (AMM) valide. Mais cette obligation de vérification n’est pas extrêmement claire : peut-il simplement se contenter d’une déclaration d’un laboratoire ou est-il obligé de demander une copie des AMM de chacun des médicaments ? Cette notion est définie de manière très large. Donc, en théorie, l’encadrement du métier de courtier devrait permettre de renforcer la lutte contre la contrefaçon. Mais je reste tout de même dubitative sur le fait que l’on fasse rentrer dans le CSP des entités extérieures au monopole, qui ne sont pas des établissements pharmaceutiques et qui ne sont jamais en contact avec les médicaments.
Et pour les entités exerçant déjà une activité de courtage, y aura-t-il plus de contraintes ?
Oui. Désormais, il faut se déclarer auprès de l’ANSM, vérifier les AMM, avoir un plan d’urgence pour organiser le retrait des médicaments, assurer la traçabilité complète de toutes les opérations, conserver les données de l’ensemble des transactions pendant 5 ans, exercer en conformité avec la charte de l’ANSM… Les coûts de la structure vont augmenter et l’activité va devenir plus compliquée. Au final, les GIE et les SRA, qui permettaient jusqu’à présent aux pharmaciens d’avoir plus de poids dans leurs négociations et de mieux acheter, vont perdre de leur intérêt.
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