L’ALLEMAGNE a été, dès 2004, le premier pays à se plier à l’arrêt de la Cour européenne de Justice dit « Doc Morris » qui, en 2003, disposa que rien ne pouvait s’opposer à la vente d’OTC en ligne. Les autres pays ont progressivement adapté leurs législations à cet arrêt, la France ayant été l’un des derniers à le faire, au début de cette année (le « Quotidien » du 10 janvier) ; elle se serait mise en infraction sans cela, le délai maximal de transcription de la directive étant désormais atteint. Toutefois, si quelques pays ont choisi d’autoriser également les ventes de prescriptions en ligne, cette décision reste, conformément à l’arrêt Doc Morris et sa jurisprudence, du ressort des États membres.
Avec l’Allemagne, les Pays-Bas et le Royaume-Uni ont été les premiers à autoriser les ventes de prescriptions en ligne. Ils ont été rejoints plus tard par le Danemark, la Finlande, la Suède, la République tchèque, l’Estonie, le Portugal et la Grèce. Il faut y ajouter la Norvège et la Suisse, non-membres de l’UE mais étroitement imbriqués à elle. Ailleurs, seules les ventes d’OTC sont admises, mais avec deux formules différentes : la France et la Belgique exigent que les pharmacies virtuelles soient « adossées » à des pharmacies réelles, alors que, en Irlande ou en Slovaquie, cette organisation n’est pas obligatoire.
Les pharmaciens européens sceptiques.
La progression des ventes en ligne inquiète les pharmaciens européens, même s’il faut relativiser le phénomène, souligne John Chave, secrétaire général du Groupement pharmaceutique de l’Union européenne (GPEU) qui représente, à Bruxelles, les intérêts des officinaux européens. Si l’Allemagne est le seul pays où ces ventes ont décollé, souligne-t-il, c’est parce que les OTC y sont relativement chers et la participation aux dépenses de prescription élevée. À l’inverse, les ventes en ligne sont marginales au Royaume-Uni, car les prescriptions sont quasi gratuites et les OTC bon marché. Dans ces conditions, les inconvénients de la vente en ligne - commande parfois fastidieuse et délais de livraisons de quelques jours - dépassent largement les avantages. Aux Pays-Bas, où ces ventes existent depuis longtemps, les conditions de fonctionnement des pharmacies virtuelles et les règles de délivrance sont les mêmes que pour les pharmacies réelles, si bien que leurs coûts de fonctionnement, et donc leurs prix, en limitent l’intérêt économique. Dans le même temps, poursuit le représentant des pharmaciens à Bruxelles, de nombreuses enquêtes montrent que les clients préfèrent acheter leurs OTC dans une pharmacie que dans un supermarché ou, encore moins, sur Internet.
Les pharmaciens pointent les dérapages liés à ces ventes : « Aux États-Unis, note John Chave, la progression des dépendances et des intoxications médicamenteuses croît parallèlement à celle des ventes en ligne, c’est un vrai problème de santé publique que nous voulons épargner à l’Europe. » Pour doper les ventes, certains pays, dont le Royaume-Uni, proposent des « médecins en ligne » qui prescriraient eux-mêmes les médicaments vendus. Mais c’est une fausse sécurité, selon le GPEU, car il est très facile de raconter n’importe quoi à un médecin en ligne et de lui fournir de faux renseignements, surtout pour obtenir des médicaments de confort et des stimulants sexuels…
Le poison de la contrefaçon.
Par ailleurs, le problème des contrefaçons continue d’empoisonner le secteur, même si l’Union européenne tente régulièrement de trouver des parades. Outre les mesures techniques visant au traçage de chaque boîte, elle réclame des sites Internet infalsifiables et sécurisés. Elle a proposé récemment l’apposition d’un label pour les sites « sérieux », mais ce dernier, incluant une croix verte, a été vivement rejeté par le GPEU qui plaide pour un sigle sans lien avec le symbole traditionnel de la profession.
Pour John Chave, l’avenir des ventes en ligne passe par deux scénarios contrastés : « Si les délistages augmentent et si les remboursements de médicaments continuent à baisser, comme en Allemagne, parallèlement à l’augmentation du nombre de malades chroniques, alors ces pharmacies virtuelles ont un avenir. En revanche, si les gens continuent comme actuellement à préférer majoritairement le contact direct, et qu’il n’y a pas d’incitation économique à acheter sur la Toile, elles resteront marginales comme elles le sont actuellement. »
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