Traditionnel rendez-vous de printemps, le « congrès économique » du syndicat des pharmaciens (DAV) allemands permet de faire le point sur l’activité de la profession, ainsi que sur les dossiers politiques du moment. Sans surprise, c’est une fois de plus la progression des ventes de prescriptions en ligne, autorisées en Allemagne avec des rabais depuis octobre 2016, suite à un arrêt de la Cour de Justice européenne, qui mobilise l’énergie des pharmaciens.
Fritz Becker, l’inusable président du DAV, se félicite de la nomination du nouveau ministre de la Santé, Jens Spahn, et du souhait de ce dernier de renforcer les soins ambulatoires de proximité, un objectif qui, rappelle-t-il, ne pourra se faire que si le réseau pharmaceutique reste viable et performant. Il rappelle que les pharmaciens ont développé de nombreuses initiatives en matière de prévention, de bon usage et d’ETP, mais que la quasi-totalité de ces « nouvelles missions » bute sur des problèmes de financement, les rémunérations réclamées, voire promises, n’ayant jamais été concrétisées.
De plus, comme l’ont rappelé ensuite les deux économistes de l’ABDA, Claudia Korf et Eckard Bauer, non seulement le résultat des officines stagne, voire fléchit en euros constants, en dépit d’une augmentation du chiffre d’affaires, mais le nombre des pharmacies continue à baisser, comme c’est maintenant le cas depuis plusieurs années : en 2017, le réseau a encore perdu 275 pharmacies, soit une aggravation de la baisse annuelle. Ainsi 395 officines ont fermé l’an dernier, soit plus d’une par jour, pendant que 120 ouvraient, soit presque trois fois moins. Désormais l’Allemagne compte 19 748 officines, autant qu’en 1987, peu avant la réunification. Le maximum avait été atteint en 2000, avec 21 500 officines, chiffre à peu près constant jusqu’en 2010. La densité est passée, elle, de 26,2 officines pour 100 000 habitants en 2010 à 23,9 en 2017.
Une embellie qui ne profite pas aux pharmaciens
L’an dernier, les pharmacies ont réalisé un chiffre d’affaires moyen de 2,31 millions d’euros, mais 62 % d’entre elles n’atteignent pas ce chiffre. La « pharmacie typique », c’est-à-dire la plus répandue, réalise un CA de 1,75 million, tandis que 40 % des officines réalisent entre 1,5 et 2,25 millions de CA. Le résultat avant impôt a baissé cette année par rapport à l’an dernier, après quatre années de hausse, pour passer de 6,4 à 6,2 %, soit 143 543 euros. Les pharmaciens sont d’autant plus amers qu’après avoir été largement mis à contribution ces dernières années pour restaurer les finances de l’assurance maladie, qui présente cette année un excédent proche de 30 milliards d’euros, ils ne profitent aucunement de cette embellie économique.
Dans ces conditions, la progression des ventes en ligne, qui représentent désormais 1,1 % des boîtes prescrites et 13,2 % des OTC, soit respectivement 1 % et 17 % du chiffre d’affaires des officines pour ces secteurs, apparaît particulièrement préoccupante. Claudia Korf rappelle que les pharmacies virtuelles se donnent pour objectif de s’emparer de 10 % du marché des prescriptions d’ici à 5 ans, et même de 25 % à plus long terme, ce dernier objectif étant toutefois irréaliste selon elle, car « cela déstabiliserait tellement tout le marché du médicament que le gouvernement serait obligé de le réguler pour garantir l’approvisionnement de la population ». Il n’en reste pas moins que le marché des prescriptions en ligne, qui stagnait à un pour cent avant l’autorisation des rabais, a déjà gagné un dixième de points l’an dernier (soit + 10 %), une tendance qui risque de s’accélérer très vite.
Lors du débat qui a suivi sa présentation, un député de la majorité, spécialiste de la santé, a déclaré que l'interdiction des ventes de prescriptions devrait faire l’objet d’une « nouvelle réflexion », ce qui a de quoi inquiéter fortement la profession, de plus en plus impatiente face aux offensives toujours plus fortes des pharmacies en ligne contre les officines.
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