DE PLUS EN PLUS acteurs de leur propre santé, les patients usent et abusent parfois d’Internet pour tout savoir sur leur maladie et leur traitement (ou celui d’un proche) avant de se rendre chez le professionnel de santé. Certains arrivent même avec la ferme intention de repartir avec le traitement qu’ils ont eux-mêmes décidé de suivre. Mais gare aux informations erronées, dépassées ou simplement fantaisistes. De multiples questions se posent sur le comportement des internautes face aux informations santé obtenues sur la toile et leur impact lors des échanges avec les professionnels de santé. Le Groupe d’étude et de recherche marketing santé (GERMS)* de l’université Pierre et Marie Curie, a mené l’enquête de janvier à mars derniers, auprès de 552 répondants, par le biais d’une étude à la fois qualitative, auprès de professionnels de santé et le grand public, et quantitative, auprès des usagers.
Premier constat, les Français sont des internautes avertis puisque 32 % passent plus de 10 heures par semaine à surfer sur la toile (et 25 % entre 6 et 10 heures), principalement pour consulter leur messagerie et suivre l’actualité. « La santé arrive en avant dernière position des centres d’intérêt en ligne, après l’administratif, les voyages, les loisirs et la musique », précise Géraldine Bois, étudiante en Master 2 Marketing santé. Néanmoins, Internet prend incontestablement de plus en plus d’importance, remplaçant progressivement la presse santé grand public, même s’il ne supplante pas le médecin et le pharmacien. Une pratique qui ne modifie guère le comportement du consommateur, révèle l’étude.
Lors d’une recherche d’information, le plus souvent sur une pathologie, un symptôme ou un traitement, les consommateurs usent de moteurs de recherche, tandis que les professionnels de santé se rendent sur des sites qui leur sont dédiés et auxquels ils font confiance. Les pharmaciens déclarent utiliser fréquemment les portails des grossistes-répartiteurs, ainsi que des sites d’information pour professionnels tels que ceux du Thériaque ou du Vidal.
Réticences.
Les pharmaciens se montrent très critiques face aux sites grand public, trouvant l’information très diversifiée mais peu pertinente, ces sites renfermant « tout et n’importe quoi ». Pourtant, ils sont nombreux à connaître peu, voire pas, les sites de santé grand public, certains refusant catégoriquement de les consulter. Les officinaux notent peu d’interactions avec les patients et les autres professionnels sur l’internet santé. Ils estiment que la recherche d’informations sur Internet par le grand public n’entache pas leur rôle de conseil, « au contraire ».
Chez les médecins, les avis sont plus marqués. « Nous avons pu relever des verbatim tels que : je suis totalement contre cette vulgarisation ; mais, a contrario, d’autres qui jugent que cela améliore la prise en charge et le dialogue avec le patient », note Natasha Pinedo-Rivera, également étudiante en master 2 marketing santé. Les réticences face à l’internet santé grand public sont moindres chez les jeunes médecins et les spécialistes. Les généralistes et les médecins plus âgés s’y opposent fortement. « Les médecins utilisent peu Internet dans leur vie professionnelle. C’est un outil qu’ils connaissent bien par ailleurs mais qu’ils n’ont pas intégré à leur pratique », précise Stéphane Korsia-Meffre, directeur des activités grand public des éditions Vidal.
De leur côté, les consommateurs trouvent que la toile facilite l’accès à l’information, mais ils ont faiblement confiance dans les sites grand public. Ils estiment que les informations en question sont souvent génératrices d’angoisses et ils ont besoin de les valider auprès de proches ou de professionnels de santé. Inversement, ils se servent d’Internet pour vérifier ce que leur disent les médecins et les pharmaciens. Ils expriment également une frustration lorsque le professionnel de santé refuse d’échanger sur une information trouvée en ligne. C’est peut-être pourquoi, globalement, ils ne parlent pas de leurs recherches sur le net.
Attrait et confiance.
« Le patient craint souvent de faire perdre du temps au professionnel ou, pire, de remettre en cause sa légitimité en lui faisant part de ses recherches sur les sites de santé », souligne Hervé Nabarette, directeur du service Qualité de l’information médicale à la Haute Autorité de santé (HAS).
Par ailleurs, le grand public fait d’autant plus confiance aux sites consultés que ceux-ci sont bien présentés (clarté, ergonomie, harmonie et lisibilité des informations), tout en admettant que l’attrait n’est pas synonyme de confiance. Les consommateurs connaissent peu l’existence de labels qui valident le sérieux des sites de santé. « On constate que le label Health on the net ou HON code a un impact positif sur les sites qui y adhèrent en termes de qualité. Ce label s’assure qu’un certain nombre de règles sont respectées, mais elles concernent le contenant, le portail, et non le contenu du site », ajoute Hervé Nabarette.
Au final, la consultation de sites Internet n’influence pas le comportement d’achat et de soin, elle n’a pas de but pratique. Un comportement qui pourrait présager de l’intérêt limité des Français pour la vente de médicaments sur Internet, dans un contexte où le maillage officinal est dense et permet d’obtenir un produit de santé sans délai et en toute sécurité. Voilà qui est rassurant : les professionnels de santé conservent leur rôle exclusif d’expert.
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