Les standards téléphoniques traditionnels, comme Skyweb ou Aircall, sont autant de solutions à la disposition des pharmaciens pour améliorer l’efficacité opérationnelle des officines, tout en optimisant le service client. Comment ? En fluidifiant les échanges avec les patients via la gestion des appels entrants, ou en les redirigeant selon leurs besoins : prises de rendez-vous, téléconsultation, etc. Ces standards contribuent également à mieux gérer les urgences médicales, à envoyer des rappels de rendez-vous et à gérer les appels en dehors des heures d’ouverture grâce à des systèmes de messagerie vocale.
À l’heure du numérique, la digitalisation des services de santé participe au développement de nouveaux modes de communication entre pharmaciens et patients, principalement par voie de messagerie. L’État, conscient de ces bouleversements et de la nécessité de sécuriser les données de santé, s’efforce de déployer un socle de services dans ce cadre. Dans l’ère du Ségur du numérique en santé, l’utilisation de messageries personnelles non sécurisées, comme Gmail ou Yahoo, pour transmettre des informations et documents contenant des données de santé sensibles est désormais proscrite.
L’État fournisseur du service minimum
Liée à l’INS (Identité nationale de santé), la messagerie sécurisée de santé (MSS) permet aux patients d’entrer en contact avec les professionnels via Mon Espace Santé, mais uniquement sous certaines conditions. Ainsi, un patient ne peut contacter qu’un professionnel qui a déjà écrit, qui n’a pas mis fin aux échanges, ou une pharmacie avec une messagerie sécurisée compatible avec Mon Espace Santé.
Xavier Vitry, directeur de projets au sein de la Délégation au numérique en santé (DNS), souligne que « l’État a la responsabilité d’offrir ce service minimum de base et souverain à chaque citoyen. Le but est de faciliter l’échange d’informations de manière sécurisée et interopérable ». L’État, visant à ne pas enfermer l’utilisateur dans une seule solution, n’interdit pas à d’autres opérateurs de fournir des services semblables.
À l’heure du numérique, la digitalisation des services de santé participe au développement de nouveaux modes de communication entre pharmaciens et patients
La MSS n’est effectivement pas la seule solution délivrant un service de messagerie sécurisée entre patients et pharmaciens. Par exemple, Pharmao, une solution de livraison de médicaments et de parapharmacie, dispose d’un chat intégré qui donne la possibilité aux pharmacies de communiquer avec leurs patients ayant envoyé leur ordonnance. De son côté, le géant Doctolib a annoncé, en novembre 2023, le lancement d’une messagerie praticiens-patients, également disponible pour les officines. Contactée par « Le Quotidien » au moment du lancement de la solution, l’entreprise a expliqué que l’outil pourrait servir à « prévenir un patient d’un réassortiment de médicaments ou vaccins, lui permettre de poser une question sur la disponibilité d’un médicament ou demander une facture pour envoi à la mutuelle ».
Des problématiques en pagaille
Dans ce contexte de multiplication progressive des messageries de santé, l’interopérabilité, portée par les pouvoirs publics, est centrale pour faciliter les échanges entre plateformes et tenir les promesses d’amélioration de l’efficacité opérationnelle et du parcours patient. À l’image de ce qu’autorise un logiciel de gestion de messagerie open source comme Thunderbird – il gère plusieurs messageries électroniques sur une seule interface –, « il sera techniquement possible d’accéder à sa messagerie sécurisée Mon Espace Santé depuis d’autres services et applications préférées par l’utilisateur, à condition que celles-ci respectent les critères de sécurité et d’interconnexion les plus stricts », décrit Xavier Vitry. Et de poursuivre : « L’important n’est pas l’interface dont vous disposez, c’est que l’information soit accessible indépendamment de celle-ci. » Cependant, il s’agit pour l’instant d’une feuille de route. « C’est encore assez lointain », reconnaît Xavier Vitry.
Cette conception donne, en outre, la possibilité d’augmenter directement les fonctionnalités de MSSanté via les solutions interopérables des éditeurs avec Mon Espace Santé. L’État met en place un cadre régulatoire et des infrastructures de base, comme la messagerie sécurisée et le RPPS (Répertoire partagé des professionnels de santé), pour assurer un échange d’informations fiable et sécurisé. Mais MSSanté n’a pas vocation à accueillir de nouvelles fonctionnalités. C’est un service fini qui restera tel quel. Charge ensuite aux sociétés spécialisées de développer des services spécifiques, adaptés à des besoins particuliers, comme le suivi du diabète ou des AVC.
Expérimentation et usage réel en pharmacie
Reste à savoir comment ces solutions sont appréhendées en pratique. Côté entreprises, l’argument selon lequel elles amélioreraient l’efficacité opérationnelle ainsi que le service apporté à la patientèle ne fait pas l’unanimité. Alexis Proust, directeur Communication et Marketing chez Tessan, une entreprise de téléconsultation, plaide plutôt en faveur du contact physique avec le patient directement à l’officine. « C’est cette proximité qui est essentielle. Chez nous, le patient fait sa téléconsultation dans la cabine avec le médecin, puis il peut directement échanger avec le pharmacien. » Si le sujet de la messagerie patient/médecin pour faciliter les échanges professionnels est à l’étude chez Tessan, rien de concret n’existe concernant un outil patient/pharmacien. « Je ne sais pas si ajouter une nouvelle solution en plus de ce qui existe déjà est vraiment pertinent. D’autant que les pharmaciens devront gérer un outil supplémentaire », alors qu’ils manquent déjà de temps et que leurs missions se multiplient.
Peut-être qu’une expérimentation pourrait donner quelques éclaircissements sur les usages qui seront faits de ces solutions, tant côté patient que pharmacien. D’ailleurs, Anne Dazinièras-Pichon, directrice de projets numériques en santé au ministère de la Santé et de la Prévention, en mentionne une entre juin et octobre 2024 (dates prévisionnelles) dans une dizaine de pharmacies, en France. Objectif : évaluer l’adoption de la messagerie sécurisée par les patients, notamment pour transmettre leur prescription. « Cette initiative doit déterminer si ce mode de communication peut améliorer le service offert aux patients, par exemple en préparant à l'avance les ordonnances, notamment dans un contexte prégnant de rupture de médicaments, réduisant ainsi les temps d’attente et les risques de ruptures de stock », détaille Anne-Nazirat Pichon. Le bilan est attendu pour novembre 2024.
GenAI : en attente de règles
Parallèlement à ces évolutions, la révolution technologique induite par l’IA générative (GenAI) pourrait faire émerger de nouvelles technologies orientées vers la dématérialisation du contact pharmaciens/clients, à l’image des chatbots. Xavier Vitry précise que les pouvoirs publics français et européens travaillent sur l’établissement de règles pour sécuriser le déploiement de dispositifs médicaux dopés à l’IA. L’Union européenne a ainsi adopté l’AI Act, le 13 mars 2024. Ce texte de loi doit garantir que les intelligences artificielles développées et utilisées en Europe respecteront les droits et les valeurs de l’UE, notamment en matière de surveillance humaine, de sécurité, de protection de la vie privée et de transparence.
L’IA, nouveau vivier de solutions
Qui n’a jamais perdu son sang-froid face à un chatbot à l’intelligence toute relative ? Cela pourrait bientôt n’être qu’un lointain souvenir à la vue des dernières avancées spectaculaires en matière d’IA et d’IA générative (GenAI), un système capable de générer du texte, des images ou des vidéos en réponse à des instructions en langage naturel. « Toutes les entreprises, quels que soient leur taille et leur secteur d’activité, seront impactées », écrivait IBM dans un billet de blog fin mai 2024. La pharmacie ne fait pas exception. Déjà, des solutions émergent. WeBotIt, par exemple, est une entreprise spécialisée dans la création et le déploiement de chatbots, callbots et mailbots, dans différents secteurs d’activité, y compris la pharmacie. Ces outils visent à automatiser des interactions répétitives, permettant ainsi aux professionnels de se concentrer sur des tâches à plus haute valeur ajoutée. « Ici, l’intégration de WeBotIt s’effectue via plusieurs canaux. Par exemple, des QR codes à scanner, placés dans les rayons pour offrir des conseils personnalisés, ou encore des bornes avec des tablettes mises à disposition, donnant un accès direct à un assistant numérique », détaille Louis-Clément Schiltz, fondateur de Webotit.ai. Les callbots peuvent, quant à eux, assurer une permanence téléphonique, répondre à des questions courantes comme les horaires d’ouverture ou la disponibilité des produits, transférer l’appel à un pharmacien ou planifier une consultation.
Près de 40 % du chiffre d’affaires
Médicaments chers : poids lourds de l’activité officinale
Les concentrations continuent
Hygie 31, Giropharm : grandes manœuvres au sein des groupements
Valorisation et transactions en 2023
La pharmacie, le commerce le plus dynamique de France
Gestion de l’officine
Télédéclarez votre chiffre d’affaires avant le 30 juin