« CONTRE les drogues, il y a toute une série de mesures répressives et d’organisations relativement efficaces, mais contre le trafic des faux médicaments il n’y a actuellement rien », a constaté le président honoraire de l’Académie de médecine en présentant un colloque consacré à ce fléau de santé publique. Face à ce phénomène en pleine expansion, le Pr Marc Gentilini souhaite mobiliser les différents acteurs, notamment autour de la convention Médicrime. Médicrime est née de la volonté du Conseil de l’Europe d’élaborer une convention internationale instituant, pour la première fois, un instrument juridique dans le domaine du droit pénal en criminalisant la contrefaçon mais aussi la fabrication et la distribution de produits médicaux falsifiés. Actuellement signée par seulement 15 pays, européens pour la plupart, cette convention n’est toutefois pas encore ratifiée. L’objectif est d’arriver à une centaine de pays signataires.
Un fléau aux États-Unis.
« Les faux médicaments sont un problème de santé publique, principalement dans les pays en développement. Mais pas seulement : ce problème atteint aussi un niveau préoccupant aux États-Unis où environ 40 millions d’Américains n’ont pas de couverture médicale », assure Yves Juillet, vice-président de l’Académie de pharmacie et membre du comité scientifique santé de la fondation Chirac. Si la France est encore épargnée par la circulation de faux médicaments, certains de ses voisins, comme au Royaume-Uni, ont déjà noté une « évolution inquiétante ». Selon la directive euro�péenne 2011/62/UE, la définition des médicaments falsifiés peut s’appliquer aussi bien aux produits de marque qu’aux produits génériques. Les faux médicaments incluent ceux ne contenant pas de principe actif, des principes actifs à un mauvais dosage ou ceux ayant un faux conditionnement. Yves Juillet indique que les faux médicaments n’auraient pas de principe actif dans 60 % des cas et 20 % seraient sous-dosés. À quoi reconnaît-on les faux médicaments ? Il y a tout d’abord « l’anomalie visible », même si celle-ci est de plus en plus difficile à repérer. Mais il y a également la « vision médicale », souligne Yves Juillet, qui invite les médecins à faire preuve de vigilance face à cette question. Sur Internet, « on estime que 50 % des médicaments vendus seraient des faux », ajoute-t-il en rappelant que l’opération internationale « Pangea IV », destinée à lutter contre la vente illicite de médicaments sur Internet, a donné lieu, en septembre 2011 (dans 81 pays, France y compris), à la saisie de 109 700 médicaments de contrebande. Plus de 170 sites Internet illégaux de mise en ligne de médicaments ont été identifiés, dont 12 localisés en France.
Les facteurs favorisant l’essor de ce commerce illégal sont nombreux, comme l’ont rappelé Célestin
Tawamba, président-fondateur d’une jeune société de médicaments génériques à Douala (Cameroun), et Ekade Abali, secrétaire exécutif de la fondation Tattali-Iyali, présidée par Malika Issoufou, la première dame du Niger. Il faut y voir l’effet de la pauvreté et des prix élevés de certains médicaments, mais aussi de la multiplication des intermédiaires dans le circuit du médicament, de la mauvaise gouvernance des États, de l’insuffisance du cadre juridique et pénal, de l’importation parallèle non réglementée, du perfectionnement de la fabrication clandestine, etc. Célestin Tawamba a également évoqué les « obstacles à la promotion du générique » et le « problème de formation des médecins et des pharmaciens ».
« Aujourd’hui, mis à part quelques rares pays du monde où la riposte commence à s’organiser, les autorités n’ont pas pris les mesures qui s’imposent pour prévenir et contrôler ce grave préjudice pour la santé publique », souligne la fondation Chirac, qui avait lancé un appel à Cotonou en 2009 pour lutter contre les faux médicaments. Écouler de faux antipaludéens ou de faux anticancéreux est un véritable « crime », s’insurge le Pr Gentilini.
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