► Les profils de la dette
En-cours clients, factures commerciales non honorées, tiers payant en attente de règlement… Les impayés peuvent prendre bien des visages à l’officine et les situations qui les précèdent sont tout aussi diverses : patient auquel on avance une boîte de médicament en attendant que son ordonnance soit renouvelée ; client qui, au moment de régler un achat de parapharmacie, ne trouve plus sa carte bancaire ; infirmières, praticiens ou EHPAD qui tardent à payer leur commande de fournitures médicales… D’autres circonstances peuvent favoriser le risque d’impayé. C’est notamment le cas lorsqu’une erreur se produit dans la mise à jour d’une base de données (organismes payeurs ou clients) ou dans le paramétrage du logiciel métier, quand une mauvaise lecture de l’ordonnance (erreur sur le numéro de prescripteur, sur la date de prescription…) est effectuée, lorsqu’il y a défaut de vérification des cartes de mutuelle (validité, taux de prise en charge, bénéficiaire, identification du numéro AMC pour les télétransmissions…). L’utilisation non systématique de l’ADRi et de Visiodroits - les outils de vérification en ligne des droits au régime obligatoire et au régime complémentaire - ou la non mise à jour des cartes vitales permettant de lire et d’actualiser les données nécessaires à une bonne facturation (CSS, exonération du ticket modérateur…) peuvent également contribuer à la création des dettes.
Si, au final, l’impayé n’est pas remboursé, il passera du poste de provision pour risque à celui de perte sèche dans la comptabilité de l’officine.
►Prévenir l’impayé
Quelques règles simples peuvent suffire à prévenir le risque d’impayé, à commencer par la vigilance dont toute l’équipe doit faire preuve face à cette problématique. L’officine doit agir en amont et ne pas attendre le bilan comptable pour réagir. Tous les mois, elle doit s’informer des en-cours clients/patients, savoir comment ils évoluent et ce qui les provoque car les factures non réglées ont des conséquences directes sur sa trésorerie et donc sur sa santé. Pour faciliter le contrôle, une liste des factures non payées peut être éditée régulièrement. Dès qu’il y a une alerte, il faut pouvoir identifier rapidement le problème ce qui suppose de bien maîtriser les outils de gestion. Avec cet objectif, certains membres de l’équipe peuvent être formés à la facturation sur le logiciel métier. Si l’on constate une augmentation de l’en-cours tiers payant, il faut rappeler à l’équipe les points de vigilance à observer quant aux prises en charges des organismes payeurs : toujours demander au patient sa carte Vitale, sa carte de mutuelle, bien lire les messages indiqués sur la fiche du client, mettre à jour la carte Vitale pour chaque facturation, enregistrer dans le LGO la demande de régularisation lors d’une prochaine visite si la complémentaire santé n’est plus effective, utiliser systématiquement la consultation des droits aux régimes obligatoire et complémentaire via les outils ADRi et Visiodroits. Pour bénéficier d’une fréquence de relance régulière, l’officine peut également choisir une solution d’externalisation des tiers-payants.
Enfin, en cas d’impayé relevant du non remboursable, on ne refait pas crédit à un client qui se présenterait pour un nouvel achat.
►Procéder au recouvrement
Tous les moyens sont bons pour rappeler les débiteurs à l’ordre, e-mail, courrier, appel téléphonique (passé par un responsable de l’officine) ou tout simplement le dialogue au comptoir. Dans ce dernier cas, certaines formulations permettront d’aborder la question franchement et sereinement face à un client/patient qui bien souvent n’aura pas souvenir de sa dette : « J’entends votre demande, mais il existe une facture non régularisée à votre nom » ou « Pouvez-vous présenter l’ordonnance pour la dernière boîte de médicament avancée ? »…
Quand le non-paiement vient d’un organisme de prise en charge, il faut analyser le motif de l’impayé (anomalie) de façon à mettre en place la bonne stratégie de recouvrement : si l’anomalie peut être rectifiée (mise à jour des données patient, erreur de facturation médicament, prescripteur…), on la corrige dans le logiciel métier et on recycle la facture afin qu’elle soit de nouveau transmise à l’organisme payeur ; si l’anomalie ne peut pas être corrigée, on se rapproche du client (en l’appelant au téléphone, en lui adressant un courrier) pour obtenir les informations nécessaires à une éventuelle correction de la facture et pouvoir renouveler la transmission ou tout simplement pour lui réclamer le paiement de la créance, sans oublier d’inscrire l’opération en tant que crédit client dans le logiciel métier ; si le règlement est partiel, on envoie une réclamation aux organismes payeurs selon la situation rencontrée. En aval, on n’oubliera pas de réaliser une synthèse statistique de suivi des démarches dont on tiendra l’équipe informée.
► Qui se consacre aux impayés dans l'équipe ?
Tous les membres de l’équipe doivent être sensibilisés au problème et formés à lutter contre. Le titulaire doit donner du sens à cette démarche en expliquant pourquoi il est important d’être vigilant et quelles sont les conséquences des impayés pour l’officine. Cette question ne doit pas être mise de côté car plus le temps passe, plus elle sera difficile à aborder avec le débiteur et plus la santé de l’officine s’en verra dégradée.
► Procédure légale
Si le débiteur tarde à honorer sa facture, l’officine peut agir pour recouvrir sa créance. Dans un premier temps, elle enverra une ou deux lettres de relance puis, éventuellement, une lettre de mise en demeure de payer adressée en recommandé avec accusé de réception. Cette dernière, si elle en porte la mention, pourra faire courir des intérêts légaux sur le montant de la somme due. Dans un second temps, au besoin, l’officine peut lancer une action en justice.
Deux types de procédures sont alors possibles: la première, non contradictoire et rapide, est l’injonction de payer. Sous la forme d’un document Cerfa, accessible par tous en ligne, elle implique pour l’officine de fournir des preuves valides du bien-fondé de sa créance. À défaut d’opposition dans le mois suivant sa signification par Commissaire de justice, la décision est définitive et peut être exécutée.
La seconde procédure, l’assignation en paiement, est contradictoire ce qui implique des débats écrits puis oraux. Plus longue dans sa démarche, elle peut mettre plus d’un an à aboutir. Dans tous les cas, l’officine aura tout intérêt à ne lancer une procédure que si le montant des impayés est préjudiciable à son bon fonctionnement. Légalement parlant, au-delà de 5 ans, la dette d’un fournisseur sera prescrite, le délai étant réduit à 2 ans pour une dette client.
(Sujet réalisé en collaboration avec Xavier Payebien, directeur commercial et technique chez Iremia Santé, société spécialisée dans l’externalisation des tiers-payant et la relance des en-cours impayés et Marie-Hélène Gauthey, dirigeante de l’organisme de formation Atoopharm).
Repères
- Les impayés peuvent prendre bien des visages à l’officine et les situations qui les précèdent sont tout aussi diverses.
- Tous les mois, l’officine doit s’informer des en-cours clients/patients et savoir ce qui les provoque car les factures non réglées ont des conséquences directes sur sa trésorerie.
- Si l’on constate une augmentation de l’en-cours tiers payant, il faut rappeler à l’équipe les points de vigilance à observer quant aux prises en charges des organismes payeurs.
- Quand le non-paiement vient d’un organisme de prise en charge, il faut analyser le motif de l’impayé (anomalie) de façon à mettre en place la bonne stratégie de recouvrement.
- Certaines formulations permettront d’aborder sereinement la question de l’impayé face au client/patient mais plus le temps passe, plus elle sera difficile à aborder.
- Tous les membres de l’équipe doivent être sensibilisés au problème et formés à lutter contre.
- Différentes procédures légales permettront à l’officine de recouvrir sa créance.
Sondage
80 % des pharmaciens ne font pas appel à un prestataire pour traiter leurs impayés.
(Selon une enquête CallMediCall/« Le Quotidien du Pharmacien » réalisée du 18 avril au 22 mai 2024).
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