AUTOMATISER les tâches en officine présente de nombreux avantages. À commencer par un gain de productivité immédiat à la délivrance : « trois à quatre minutes sont nécessaires pour traiter une ordonnance à la main, rappelle ainsi Stéphane Nizard, directeur de Pharmax, mais seulement trente secondes avec un automate. » Cela permet de vendre plus, évidemment, mais aussi de vendre mieux grâce à la possibilité de consacrer plus de temps au conseil auprès de chaque patient, notamment lors des heures de pointe. Cette solution offre également la possibilité de réorganiser l’espace commercial grâce à un réaménagement du back-office, voire d’utiliser des zones d’ordinaire inexploitables comme des sous-sols, ce n’est d’ailleurs pas un hasard si bien souvent cette automatisation se fait à l’occasion d’un transfert ou d’un réaménagement de l’officine. Elle permet enfin une gestion plus fine des stocks puisque les produits automatisés sont gérés en temps réel, avec un contrôle des entrées/sorties et des dates de péremption.
Vitesse de délivrance.
Oui, mais, un tel équipement coûte cher, plusieurs dizaines de milliers d’euros au bas mot, souvent plus de 100 000 euros. Il ne faut donc pas se tromper. « Le pharmacien doit penser à ce qui lui convient » préconise ainsi Olivier Resano, directeur commercial de Mekapharma (fabricant de l’automate Apotéka). Et ne pas céder aux sirènes de l’automatisation à tous crins. De fait, le cycle de vente assez long, au minimum deux mois jusqu’à plusieurs années, selon Olivier Resano, prémunit contre toute décision hâtive.
La première question que les titulaires doivent se poser est de savoir s’ils ont besoin d’un automate ou d’un robot. Les deux notions ne recouvrent pas les mêmes tâches. Même si les définitions diffèrent d’un fabricant à l’autre, on peut considérer l’automate comme un système d’approvisionnement des postes de vente dans l’officine, tandis que le robot se charge de tâches plus larges, rangement, gestion du stock et délivrance des produits. L’automate est immobile tandis que le robot peut se déplacer. Ainsi définis, ce dernier peut paraître nettement supérieur au premier. Et certains fabricants insistent en effet sur ses qualités techniques qui lui permettent d’automatiser un grand nombre de tâches dans l’officine. « Il est capable de gérer l’ensemble du flux transversal au niveau de la logistique d’une pharmacie » soutient ainsi Vincent Deltour, directeur commercial de Meditech. L’automate a pourtant des avantages non négligeables car s’il ne fait que délivrer des produits, il le fait à une vitesse nettement supérieure à celle du robot, ce qui le rend imbattable en matière de productivité. Il a donc aussi de sérieux défenseurs. Sa qualité principale est de pouvoir automatiser la délivrance des produits à forte rotation à une vitesse qu’un robot ne peut atteindre ; ce dernier reste donc plus adapté à la délivrance des produits à faible rotation. Souvent, le choix du pharmacien se fait en fonction du nombre de références en forte et en faible rotation.
Nouvelles performances.
Mais le marché n’est pas aussi « binaire » qu’il y paraît. Cette division du marché entre robots et automates n’est plus pertinente, selon Didier Dubois, directeur général d’ARX, (fabricant du robot Rowa). « C’est vrai, les fonctions étaient autrefois bien séparées, mais aujourd’hui on trouve beaucoup de machines mixtes. » Ces machines offrent des degrés différents d’automatisation, certaines laissent une part à l’intervention humaine et sont dites semi-automatiques et d’autres le sont complètement.
Ces machines mixtes, robots automates, permettent ainsi de pallier les faiblesses de l’une ou l’autre technologie. Mais les fabricants, pour certains d’entre eux, restent fidèles à une certaine philosophie selon qu’ils viennent du monde des automates ou de celui des robots. Ainsi Pharmax, pour qui la robotisation est utile pour les produits à faible rotation mais ne saurait en aucun cas remplacer un automate, a intégré dans son produit phare un bras robotisé pour les faibles rotations. « Nous nous refusons à vendre un robot seul », insiste Stéphane Nizard.
Course à la vitesse.
D’où qu’ils viennent, les fabricants cherchent aujourd’hui à proposer des produits avec le maximum de fonctionnalités intégrées (disponibles à la carte car la plupart affirment faire du sur-mesure en jouant avec les différents modules qu’ils proposent) et les plus rapides possibles. C’est dans ce contexte de course à la vitesse que les uns et les autres ont annoncé, ou vont le faire, des robots dits « multipicking », capables de prélever plusieurs boîtes à la fois et d’améliorer ainsi les fonctions robotisées de leurs machines. Les performances de multipicking varient selon les fabricants, certains revendiquent le prélèvement possible de trois boîtes en même temps, d’autres montent ce chiffre à vingt ! Un chiffre qui en réalité est conditionné par la taille de la boîte. « La longueur limite de la boîte susceptible d’être prélevée est de 60 cm, explique ainsi Olivier Resano, notre robot peut prendre six boîtes de 10 cm ou trois de 20. »
Cette course à la vitesse est-elle pertinente ? « Elle peut être stimulante, répond Bertrand Juchs, directeur général de Mach 4, mais la course à la vitesse n’est pas toujours une bonne chose, elle ne doit pas être pénalisante. » « C’est moins d’aller vite vers un poste de vente de l’officine que de pouvoir délivrer simultanément le maximum de postes de vente qui est important » ajoute Pascal Melsens, directeur opérationnel de Tecny Farma.
Lire les codes Datamatrix.
Les autres améliorations apportées par les différents fabricants varient beaucoup d’une marque à l’autre. Certains travaillent sur des fonctionnalités très précises comme le fait Mekapharma avec son trieur, un système qui vide les caisses reçues par les officines, trie et scanne les boîtes, ou bien Pharmax, qui a lancé un petit automate compact, sans convoyage, susceptible d’être placé près des postes de vente, un produit destiné avant tout aux petites pharmacies.
Ils apportent également des améliorations à l’intelligence de leurs machines, à savoir leurs logiciels (qui sont tous compatibles avec les logiciels de gestion d’officine), avec par exemple une base de données Internet disponible pour tous les clients de Mekapharma : dès lors qu’un pharmacien a intégré un nouveau produit dans la base, celle-ci se met à jour automatiquement et propose un nouveau code pour le dit produit disponible pour tous les clients de la base. Ajoutons à ces améliorations un détail qui a son importance : tous les fabricants ont mis à jour, ou vont le faire, leurs machines afin de pouvoir lire les codes Datamatrix qui seront obligatoires dans le cadre de la Loi sur la traçabilité des médicaments dès le début de l’année prochaine. Les codes Datamatrix donnent en effet beaucoup plus de détails sur le produit que le traditionnel code-barres, notamment sa date de péremption.
Ces automates et ces robots offrent-ils un retour sur investissement rapide ? Compte tenu de la lourdeur des investissements, c’est une question que les titulaires posent volontiers aux fabricants. Si peu d’entre eux donnent une réponse précise, la plupart estiment que le gain de temps apporté par l’utilisation de ces machines est immédiat et permet de les rentabiliser très vite. Gain de temps qui se traduit souvent, sinon par une réduction d’effectifs, au moins par le non-remplacement de salariés qui partent, à la retraite par exemple. D’où aussi la nécessité pour les pharmaciens d’être très attentifs à l’aspect humain de l’automatisation des tâches. C’est du moins la mise en garde de Pascal Melsens. « Il est indispensable de faire participer l’équipe officinale au changement induit par l’arrivée d’une machine, car il y a toujours une résistance au changement. » Qui plus est, avec la crainte de voir la machine remplacer un collaborateur.
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