Début 2021, les pharmaciens avaient été autorisés par décret à prescrire et à administrer les vaccins contre le Covid-19. Une extension de la pratique vaccinale qui augurait un grand changement. En effet, plus d’un an après, l’arrêté du 21 avril 2022 a largement étendu la liste des vaccins que les pharmacies – d'officine, mutualistes ou encore les pharmacies de secours minières – sont désormais habilitées à administrer. Et ce, « en application du 9° de l'article L. 5125-1-1 A du code de la santé publique », comme le stipule ledit décret. Plus concrètement, plus besoin de solliciter son médecin pour les vaccinations contre la grippe, la rage, la diphtérie, le tétanos, la poliomyélite, la coqueluche, les papillomavirus humains, le pneumocoque, les hépatites (A et B) et les méningocoques (A, B, C, Y et W).
Des recommandations qui font foi
Corollaire de l’élargissement des compétences vaccinales aux pharmaciens, plus que jamais l’équipement thermostatique de l’officine se doit d’être performant… Car le stockage de ces médicaments thermosensibles (PST), requiert des caractéristiques spécifiques. « Dans le cadre de son exercice professionnel, le pharmacien d’officine est le garant du respect de la bonne conservation des produits soumis à la chaîne du froid, depuis la réception de la livraison du fournisseur jusqu’à̀ la dispensation au patient », précise l’Ordre national des pharmaciens (CNOP) dans son document daté de décembre 2009 intitulé « Recommandations de gestion des produits de santé soumis à la chaîne du froid entre +2 °C et +8 °C à l’officine ».
« En l’absence de réglementation, ce sont les recommandations du CNOP qui fixent le cadre. Et ce, même si les recommandations datent de décembre 2009 », prévient Luis Dos Santos, responsable commercial chez AJPL Pharma, entreprise de distribution et de vente d'armoires réfrigérées. Et gare aux récalcitrants qui pourraient s’exposer à des contrôles de l‘ARS. L’ARS Rhône Alpes prévient d’ailleurs que « la détention en vue de la vente de médicaments dans des conditions impropres est assimilable à une tentative de tromperie sur les qualités substantielles ou sur l’aptitude à l’emploi desdits médicaments, [et] est un délit passible des peines prévues à l’article 213-1 du code de la consommation ».
Quid des recommandations ?
Les exigences minimales à respecter pour une enceinte thermostatique peuvent varier d’une région à l’autre, selon les recommandations des ARS. Néanmoins, les bonnes pratiques du CNOP font consensus. À savoir : posséder un système de ventilation efficace ; disposer d’un volume utile de rangement en adéquation avec les volumes stockés ; avoir un espace bien éclairé et conçu avec des matériaux résistants aux produits d’entretien ; garantir un dégivrage automatique avec maintien de la température entre + 2 °C et + 8 °C, être équipé d’un système autonome et indépendant d’alarme, avec mise en place au minimum de deux capteurs positionnés aux points critiques du volume utile – soit le point le plus chaud et le point le plus froid.
Quid des équipements ?
Luis Dos Santos dissipe le doute : « Aucun appareil ménager » n’est en mesure de garantir toutes ces exigences, et plus particulièrement l’obligation d’une température de + 2 °C à + 8 °C sur l’ensemble du volume stocké. Un prérequis puisqu’un pharmacien « ne stockera pas qu’à un seul et même endroit de son armoire réfrigérée », étant donné le volume en constante augmentation des vaccins et autres PST à stocker.
Au vu de toutes ces informations, les jours s’annoncent radieux pour les fabricants et distributeurs de systèmes de réfrigération. Il est vrai que les éclaircies étaient déjà là, et en nombre. Depuis l’autorisation délivrée aux pharmaciens d’administrer le vaccin contre la grippe, « il y a eu un accroissement des volumes de ventes. Et aujourd’hui, c’est monnaie courante d’être équipé d’au moins deux armoires réfrigérées par officine », note Luis Dos Santos. De son côté, François-Xavier Crozet, dirigeant de Rubex Pharma, société spécialisée dans les produits d'équipement pour les pharmacies et les entreprises, indique que leurs ventes « ont explosé de + 60 % par rapport aux années avant Covid ». Si les appareils écoulés affichent généralement un volume de 360 litres, « il n’est pas rare désormais de voir des pharmaciens commander des volumes plutôt destinés à l’hôpital (600 litres, N.D.L.R.) », souligne Luis Dos Santos.
L’armoire thermostatique est l’équipement phare pour assurer le respect de la chaîne du froid en officine. A minima, elle doit, pour être performante, répondre aux recommandations du CNOP et, dans le meilleur des cas, avoir fait l’objet d’une cartographie. Celle-ci mesure la température en neuf points du volume utile pendant vingt-quatre heures. Et ce, afin de s’assurer que la fourchette imposée par le CNOP est bien respectée. Ladite cartographie peut parfois être réalisée par les fabricants eux-mêmes, sur matériel neuf. Cette procédure facultative, si elle a été réalisée, doit être renouvelée tous les ans ou après chaque intervention liée à un événement susceptible d’avoir impacté les performances de l’enceinte.
Tout dans ces armoires réfrigérées est normalement conçu pour garantir un contrôle stable et durable de la chaîne du froid. Ces équipements embarquent bien souvent des régulateurs électroniques qui gèrent automatiquement la température. Ils intègrent aussi des fonctions de mémorisation de coupures électriques et des incidents, afin que le pharmacien puisse agir en conséquence en cas de dysfonctionnement. Certains systèmes automatiques informatisés vont suivre les enregistrements continus des températures, les valider et les archiver. Il existe aussi des modèles, comme ceux de Liebherr, le fournisseur d’AJPL Pharma, qui embarquent neuf sondes réparties au niveau des points critiques de l’armoire, afin d’assurer la cartographie.
À noter également, des parois anticongélation sont intégrées dans les enceintes thermostatiques afin de protéger les médicaments s’ils venaient à être en contact avec les parois de l’équipement. Des zones critiques, généralement plus froides et humides, qui constituent un risque de détérioration pour les PST. « Les appareils renferment aussi une sécurité anticongélation. Elle mesure en continu la température. Et si, pour une quelconque raison, celle-ci chute en dessous de 1 °C, alors l’alimentation du compresseur est coupée [pour stabiliser la température, N.D.L.R.) », développe Luis Dos Santos.
Contrôler la chaîne du froid jusque chez le patient
Au-delà du seul stockage, c’est toute la chaîne du froid que les pharmaciens doivent prendre en considération. « Le stockage des PST doit être complémenté par le maintien de la chaîne du froid au moment de la réception et de la délivrance », précise François-Xavier Crozet.
Mais, alors que le risque de rupture de ladite chaîne est bien réel dans ces moments, la réponse technique apportée est rudimentaire. Le CNOP recommande, dans un premier temps, de s’assurer que les fournisseurs tiennent leurs engagements en matière de respect de la chaîne du froid. Un contrôle qui passe notamment par l’étude des documents relatifs à la traçabilité, ou encore le mode de stockage et le type d’emballage isotherme utilisé par les fournisseurs.
Le pharmacien doit ensuite contrôler la température des médicaments thermosensibles à l’aide d’un thermomètre à sonde, infrarouge ou laser. « Au moindre doute, il faut refuser la livraison, car ensuite, c’est au pharmacien qu’incombe la responsabilité des médicaments », prévient François-Xavier Crozet. Pour le transfert jusqu’au domicile du patient, il est recommandé aux pharmaciens de proposer à la vente des trousses de transport isotherme. Ceux-ci assurent généralement un maintien des températures dans la fourchette recommandée, entre deux et quatre heures.
Reste à savoir comment ces mêmes pharmaciens composeront avec tout ce matériel, alors que de plus en plus de machines franchissent le palier des officines. Les fabricants d’armoires réfrigérées ont anticipé cette problématique en produisant des « gammes dédiées aux petits espaces, avec des armoires sous paillasse par exemple », indique François-Xavier Crozet. Mais entre les cabines de téléconsultation, les systèmes de dispensation robotisés, les armoires réfrigérées et robots divers… ils devront sans doute faire des choix.
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