Au Canada, des chercheurs de l’université Laval et du CHU de Québec viennent de dévoiler un nouveau modèle qui estime le risque pour une femme de développer un cancer du sein au cours de sa vie. Au départ de cette démarche : un test de salive !
« Nous avons établi un moyen de créer une empreinte génétique. À partir de la signature génomique d’une femme, nous sommes en mesure de définir si elle présente un risque accru d’être atteinte d’un cancer du sein, explique au « Quotidien » le Pr Jacques Simard, titulaire de la chaire de recherche du Canada en oncogénétique à la faculté de médecine de l’université Laval et l’un des principaux responsables de cette étude de grande envergure (1). Le test de salive permet d’extraire l’ADN de la patiente. En combinant à la fois son profil génétique à un modèle statistique qui prend en compte ses antécédents familiaux et des facteurs non génétiques tels que son âge à sa première grossesse, sa densité mammaire, sa taille ou ses habitudes de vie (consommation d’alcool), il est possible d’établir un diagnostic et d’estimer son risque de cancer du sein, de manière personnalisée. »
Pour aboutir à ce modèle appelé BOADICEA, plusieurs centaines de chercheurs à travers le monde ont mis en commun les échantillons d’ADN et mené une analyse génomique sur 94 000 femmes qui avaient eu un cancer du sein et sur un groupe témoin de 75 000 femmes. « Grâce à des analyses sophistiquées, nous avons mis au point une sorte de logiciel pour obtenir un score de risque de cancer du sein qui inclut 313 variations génétiques et l’avons ensuite validé sur près de 220 000 femmes », poursuit le responsable. Le test de salive permet de vérifier si la femme possède certaines de ces variations sur son génome qui prédisposent, ou non, au cancer du sein. « Isolées, ces variations ont un effet marginal mais combinées à d’autres facteurs, elles apportent des informations importantes permettant d’évaluer le risque de cette maladie. »
Pour mettre en évidence l’impact du modèle BOADICEA sur l’évaluation du risque de cancer du sein, l’équipe a évalué le cas des femmes dont la mère a souffert d’un cancer du sein à l’âge de 50 ans. Sur la base de ce seul antécédant, 63,4 % auraient été classées comme étant « à risque modéré » de développer un cancer du sein dans les 10 ans (entre 40 et 50 ans) et 0,1 % « à haut risque ». Mais en prenant en compte l’ensemble des facteurs de risque, via le nouvel algorithme, 60,1 % de ces femmes sont désormais considérées comme ayant un risque proche de celui de la population général, 36,2 % comme ayant un « risque modéré » et 3,7 % d’entre elles sont désormais jugées « à haut risque ».
Des évaluations au printemps
Selon le Pr Jacques Simard, ce modèle devrait permettre de mieux prévenir les risques de cancer du sein pour un coût peu élevé (entre 100 et 150 $ le test, soit 67 à 100 euros), de mener des protocoles de dépistage individuel et de réduire encore la mortalité liée au cancer du sein, qui a diminué de 43 % depuis 1986 au Québec.
Cette nouvelle méthode va-t-elle séduire les femmes ? C’est désormais ce que va tenter d’étudier l’équipe du Pr Simard. Dès le printemps, 5 000 femmes du Québec et 5 000 femmes d’Ontario, âgées de 40 à 69 ans, vont participer à un projet de pré-implantation. « Notre but est de vérifier l’efficacité du test salivaire mais aussi l’intérêt des femmes pour cette méthode et sa faisabilité. » Si une femme court un risque élevé, elle pourrait se voir proposer de débuter un dépistage plus tôt que ce prévoit le protocole habituel dans la Belle Province : actuellement, le programme québécois de dépistage du cancer du sein propose aux femmes âgées de 50 à 69 ans de passer une mammographie tous les deux ans.
(1) A. Msci et al., Genetics in Medicine, https://doi.org/10.1038/s41436-018-0406-9, 2019.
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