Ce médicament controversé est le premier à être dirigé contre les plaques bêta-amyloïdes cérébrales, impliquées dans la physiopathologie de la maladie neurodégénérative. L'intitulé officiel de l'indication ne précise pas le stade de la maladie mais la molécule pourrait apporter les plus grands bénéfices à une phase précoce.
Si l'Alzheimer Association se réjouit outre-Atlantique de la décision de l'autorité sanitaire, beaucoup de questions sur son utilité restent en suspens. En novembre, un comité d'experts s'était prononcé contre une autorisation de ce traitement, jugeant qu'il n'avait pas suffisamment fait preuve de son efficacité. Un avis non contraignant mais dont il est rare que la FDA s'affranchisse. « Il y a eu un débat considérable autour de l'approbation d'Aduhelm, écrit dans un communiqué la Dr Patrizia Cavazzoni, de la FDA. Comme c'est souvent le cas pour l'interprétation des données scientifiques, la communauté d'experts a donné différentes perspectives. »
Des incertitudes sur l'efficacité clinique
Le comité avait étudié les données de deux études pour cet anticorps administré toutes les quatre semaines par voie intraveineuse : un grand essai clinique positif et un autre aux résultats négatifs. Compte tenu de l'absence de traitement, la FDA s'est contentée du critère intermédiaire de la réduction des plaques amyloïdes, estimant raisonnable d'espérer « d'importants bénéfices pour les patients » au vu des résultats à l'imagerie.
Pour cette autorisation, la FDA a par ailleurs utilisé une procédure accélérée qui ne confère au produit qu'une autorisation conditionnelle. Le régulateur américain, qui exprime malgré tout sa vigilance, a demandé à Biogen de conduire des essais cliniques post-autorisation afin d'évaluer les effets cliniques du médicament. « Si le médicament ne fonctionne pas comme prévu, nous pourrons prendre des mesures pour le retirer du marché », a prévenu la FDA.
Près de 6 millions d'Américains vivent avec Alzheimer, qui constitue la sixième cause de décès aux États-Unis. « Le besoin de traitement est urgent », a fait valoir la FDA. Comme l'a expliqué Peter Stein, responsable au sein de l'Agence, lors d'un point presse : « Nous avons clairement entendu de la part des patients qu'ils sont prêts à accepter une certaine incertitude pour avoir accès à un médicament qui pourrait produire des effets significatifs. »
Certains experts ne cachent pas leurs réserves. « Si je suis heureux que l'aducanumab ait reçu une autorisation, nous devons être clairs sur le fait qu'au mieux, ce médicament aura un bénéfice marginal qui aidera uniquement certains patients choisis avec soin, a déclaré John Hardy, professeur en neuroscience à l'University College de Londres. Nous aurons besoin de meilleurs médicaments à l'avenir. »
Pour la responsable scientifique de l’Alzheimer Association, c'est justement ce vers quoi l'autorisation de la FDA va permettre de tendre : « L'histoire a montré qu'une autorisation d'un premier médicament d'une nouvelle catégorie stimulait le secteur, augmentait les investissements dans de nouveaux traitements et encourageait l'innovation », a déclaré Maria Carrillo dans un communiqué de l'organisation.
Le coût du produit reviendra à environ 56 000 dollars par an pour un Américain de poids moyen et son remboursement dépendra de la couverture santé à laquelle chaque patient a souscrit.
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