Le principe des vaccins intranasaux consiste à générer une réponse immunitaire des lymphocytes T et B au niveau des muqueuses respiratoires et de constituer « une première ligne de défense, à l'endroit où le virus pénètre et fait beaucoup de dégâts », a affirmé lors d'une conférence de presse le Dr Mike Ryan, directeur du programme de gestion des situations d'urgence de l'OMS. Les vaccins injectables par voie intramusculaire évitent les formes sévères mais ne réduisent pas très significativement le risque d'infection et de transmission. Les vaccins intranasaux, en revanche, provoquent la production locale d'IgA spécifiques dans les muqueuses respiratoires, ce qui « pourrait nous donner davantage de chances de contrôler le Covid à long terme », a fait valoir le Dr Ryan.
L'OMS encourage la mise au point de vaccins de deuxième et troisième générations « dont nous pourrions avoir besoin pour faire face à la dernière phase du Covid et à d'autres virus qui pourraient attaquer les voies respiratoires », a précisé le Dr Ryan.
L'Inde et la Chine frappent les premiers
Mais les données manquent à la communauté scientifique pour juger de la pertinence des deux premiers vaccins intranasaux, les autorités indiennes ayant approuvé le candidat produit par Bharat Biotech en première dose et les chinoises celui de CanSino Biologics en dose de rappel d'urgence. Ces deux vaccins vivants se basent sur des vecteurs viraux atténués non réplicatifs porteurs de protéines du SARS-CoV-2.
« À l'image de ce qu'il s'était passé pour les vaccins injectables russes et chinois contre le Covid, la communauté scientifique internationale dispose de peu d'informations sur les données d'efficacité fournies aux agences sanitaires nationales », explique au « Quotidien » Isabelle Dimier-Poisson, du laboratoire d'immunologie parasitaire de l'université de Tours, elle-même impliquée dans le développement d'un vaccin anti-Covid protéique intranasal.
Un précédent contre la grippe
Ces deux vaccins intranasaux ne sont pas les premiers à utiliser un virus vivant atténué. Cette stratégie est déjà utilisée par plusieurs vaccins contre la grippe disposant déjà d'une autorisation de mise sur le marché (AMM) en Europe et aux États-Unis. Le recul acquis avec de tels vaccins vivants intranasaux incite à la prudence. « Un vaccin intranasal suisse contre la grippe (commercialisé par Berna Biotech, NDLR) avait entraîné des paralysies faciales temporaires, explique Isabelle Dimier-Poisson. C'est pourquoi la FDA et l'Agence du médicament européenne sont prudentes vis-à-vis de la voie nasale pour des vaccins vivants », poursuit la chercheuse. Les vaccins inhalés contre la grippe ne sont ainsi pas autorisés chez certaines populations fragiles comme les femmes enceintes.
Plus d'une centaine de vaccins inhalés contre le Covid-19 sont en cours de développement dans le monde : 20 sont testés en essais cliniques, dont quatre ont complété leurs études de phase 3 (deux chinois, un indien et un iranien).
En France, un candidat vaccin inhalé inerte est en cours de développement par l’équipe de recherche BioMAP de l’UMR Inrae-Université de Tours Infectiologie. Il s'agit d'un vaccin protéique ciblant non seulement la protéine Spike mais aussi des protéines de la souche originelle de Wuhan qui ne mutent pas. « Nous avons sélectionné le clone vaccinal et nos travaux sur sa production en série donnent des résultats encourageants, se réjouit Isabelle Dimier-Poisson. Nous avons défini la carte d'identité de ce clone, et nous nous sommes assurés qu'il soit le plus intègre, le plus stable et le plus immunogène possible. »
La partie du développement clinique est en cours, avec la mise au point du « nanocarrier » chargé de transporter le clone vaccinal. L'étape d'évaluation de la toxicité commencera à la fin du mois de septembre ou au début du mois d'octobre, avec en vue un essai clinique de phase 1/2a en 2023. « La première indication sera en tant que vaccin de rappel, puis nous tenterons de l'ouvrir à la primovaccination », espère Isabelle Dimier-Poisson.
Ce vaccin sera 100 % français. Les entreprises impliquées dans sa mise au point et sa future fabrication sont GTP Bioways (Toulouse), C.RIS Pharma (Saint-Malo) et le fabricant de dispositifs médicaux Recipharm, basé à Monts.
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