Aujourd'hui, la recherche de nouveaux antibiotiques est difficile. Les principales molécules ciblant les pathologies courantes ayant été découvertes, il reste désormais à trouver de nouvelles molécules capables de tuer les bactéries multirésistantes. Ces antibiotiques de dernier recours, répondant à des situations d'impasse thérapeutique, seront peu utilisés. Donc peu rentables, au regard du coût d’une recherche longue et compliquée.
Toutefois, « nous vivons une période "faste" avec la commercialisation, en l’espace de 3 à 4 ans, de plusieurs molécules permettant de lutter contre les bactéries multirésistantes à l'hôpital », se réjouit le Dr Thierry Naas, médecin biologiste à l'hôpital du Kremlin-Bicêtre (Val-de-Marne). Notamment, le Zavicefta, qui associe l’avibactam à la ceftazidine.
« L’avibactam est un inhibiteur enzymatique qui cible 75 % des carbapénèmases diffusant en France dans des bactéries. En inhibant cette enzyme, il neutralise la résistance de la bactérie », explique le biologiste. En revanche, cela ne dure qu’un temps. « Plus ce traitement est utilisé, plus vite on sélectionne des bactéries qui lui résistent. Ainsi, aux États-Unis, 6 mois après son utilisation, sont apparues de nouvelles résistances », poursuit-il. En France, le médicament est utilisé, à l’hôpital, dans les infections intra-abdominales compliquées, les pyélonéphrites, ou encore les pneumonies acquises sous ventilation mécanique. Mais jamais de façon probabiliste. « On administre uniquement l'avibactam sur documentation microbiologique, après avoir vérifié que la souche est sensible », confirme le médecin. Mais on sait que les résistances vont, au final, faire leur apparition. Comme toujours.
Immunothérapie et immunostimulation
D’autres pistes de recherche sont intéressantes, comme l’immunothérapie (par administration d’anticorps monoclonaux) qui est à l’étude pour traiter des infections bactériennes chez les patients intubés et ventilés. Chez ces malades, si l’on arrive à déterminer le germe avant l’infection (par antibiogramme), on peut alors mettre en place une prophylaxie par immunoglobuline ciblant le germe isolé.
Autre piste : l’immunostimulation. Il s’agit non plus de pallier l'immunité du patient, mais de la stimuler. « Car son système immunitaire représente la meilleure arme contre une attaque de bactéries pathogènes », reconnaît Thierry Naas. Toutefois, cette stratégie ne peut pas s’appliquer aux patients immunodéprimés, qui ne sont pas en mesure d’apporter une réponse immunitaire compétente, et qui ne sont éligibles qu’à une antibiothérapie bactéricide.
Des alternatives plus originales
La vaccination pourrait, elle aussi, permettre de lutter contre les germes pathogènes. Enfin, d’autres stratégies thérapeutiques plus ou moins originales sont testées. Par exemple, la luminothérapie, qui consiste à envoyer des rayons ionisants sur des plaies afin de réduire la charge bactérienne. Ou encore, des bactéries qui seraient capables de manger, de façon ciblée, d’autres bactéries.
Dernière piste : la phagothérapie, qui consiste à utiliser des virus spécifiques de la bactérie, les bactériophages. L’idée n'est pas neuve : elle a été développée au début du XXe siècle, puis laissée à l'abandon à l'arrivée des antibiotiques dans les années 1940. Mais depuis quelques années, les phages sont pris très au sérieux dans la lutte contre la résistance croissante aux antibiotiques observée dans le monde. Cependant, elle nécessite d'être examinée de façon scientifique. « Les études sont assez concluantes chez l’animal, mais on manque cruellement de données chez l’homme », admet Thierry Naas. Il faut dire que ces dernières sont difficiles à mettre en place, étant donné que les bactériophages ont une activité très ciblée qui en font un traitement personnalisé.
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