Aujourd’hui la grippe aviaire ne se transmet à l’homme que via un animal infecté, mais le taux de mortalité chez l’humain est très élevé, avec plus de 50 % de décès. Demain, la crainte est que le virus H5N1 s'adapte et soit capable de se transmettre d'humain à humain.
À ce jour, il n'y a aucune preuve d'une transmission d'humain à humain du H5N1. Au total, entre 2003 et le 1er avril 2024, 889 cas humains de grippe aviaire ont été enregistrés dans 23 pays, dont 463 décès, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Ce qui porte le taux de létalité à 52 %. « En Europe, on a eu 7 contaminations humaines liées aux virus de la grippe aviaire (y compris H7N7) », précise le Dr Éric Cardinale, directeur scientifique de la santé animale et du bien-être animal à l’ANSES, lors d’une conférence de l’ANRS-MIE.
Des barrières franchies
Le problème est que les génotypes du virus de la grippe aviaire ont évolué. Au départ, les souches virales étaient très spécifiques aux oiseaux, avec un risque faible de contamination vers les autres espèces, animales ou humaines. Maintenant, on voit apparaître des génotypes qui sont capables de franchir les barrières d'espèces, et d’infecter facilement des mammifères, dont les bovins et les caprins.
C’est d’ailleurs ce qui est survenu récemment aux États-Unis, où 89 foyers de grippe aviaire ont été détectés sur des vaches laitières, dans une douzaine d’états. « Les animaux ont sans doute été contaminés par de la litière souillée, puis l’infection s’est propagée sur d’autres mammifères, comme des chats et des alpagas qui auraient bu du lait cru », évoque Éric Cardinale. Trois cas ont également été déclarés chez l’homme, sur des personnes en contact étroit avec les bovins, qui ont sans doute été infectés par le matériel de traite. « Les symptômes sont cependant restés légers avec des petites conjonctivites et, pour le dernier cas, des troubles respiratoires d’évolution rapidement favorable », poursuit-il.
Une forte contamination du lait cru, et la présence du virus dans les poumons et les muscles des vaches, ainsi que dans les eaux usées aux États-Unis ont été observés
Mais l’affaire ne s’est pas arrêtée là. En effet, on s’est rendu compte qu’il y avait des risques pour que la chaîne alimentaire soit touchée : on a observé une forte contamination du lait cru, et la présence du virus dans les poumons et les muscles des vaches, ainsi que dans les eaux usées aux États-Unis. Au final, la situation s’est avérée plutôt rassurante : « Les bovins ne sont pas un réservoir du virus influenza, donc le risque de réassortiment du virus via les bovins et de sa meilleure adaptation à l’homme n’est pas aussi important qu’on pourrait préjuger », explique Éric Cardinale. De plus, la pasteurisation permet d’éliminer le virus du lait, ce qui écarte toute possibilité de contamination.
En parallèle, l'OMS a signalé début juin la mort du premier cas humain de grippe aviaire liée à une autre souche, H5N2, au Mexique le 24 avril. Le décès serait un décès multifactoriel, selon l’agence onusienne, le patient étant atteint de comorbidités (diabète, HTA…).
L’Europe réagit
Ces cas survenus sur le continent américain, aux États-Unis et au Mexique, ont alerté les autorités sanitaires en Europe. En réaction, l’Union Européenne a annoncé, le 11 juin, avoir conclu un contrat lui permettant d'acheter, au nom des États membres, jusqu'à 665 000 doses d'un vaccin prévenant la transmission de la grippe aviaire à l'humain, commercialisé par le laboratoire britannique Seqirus. Les états signataires, dont la France fait partie, pourront acquérir ces doses sous quatre ans auprès du laboratoire. Les personnes qui travaillent au contact des animaux d'élevage à risque seront les premières concernées par ces vaccinations. De plus, « une option de 40 millions de doses supplémentaires a également été négociée pour élargir la campagne de vaccination si besoin », évoque Éric Cardinale.
On se prépare donc à l’arrivée d’une transmission interhumaine de grippe aviaire. Cependant, Éric Cardinale est assez confiant pour l’instant : « Le risque est faible pour la population, même s’il est plus élevé pour certaines populations, comme les personnes en contact étroit avec les animaux d’élevage », précise-t-il, en ajoutant que la Finlande a déjà pris les devants, en décidant de vacciner dès maintenant les personnes à risque.
Du 23 au 31 décembre
Menace d’une nouvelle fermeture des laboratoires d’analyses médicales
Addictions
La consommation de drogues et d’alcool en baisse chez les jeunes
Crise sanitaire : le malaise des préparateurs
3 questions à…
Christelle Degrelle