Dépistage et orientation diagnostique

Cet hiver, que dit la fièvre ?

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Publié le 08/12/2020
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Réaction de défense de l’organisme, la fièvre est le plus souvent sans gravité. Plainte hyper fréquente au comptoir en hiver, il s’agit cependant de ne pas passer à côté d’une urgence potentielle et dans la période que nous connaissons actuellement de garder en tête la possibilité d’un cas Covid…
Les mesures frontales et axillaires sont en pratique peu fiables

Les mesures frontales et axillaires sont en pratique peu fiables
Crédit photo : SPL/PHANIE

Quels sont les différents types de fièvre ?

La fièvre se définit par une température corporelle supérieure à 38 °C chez un individu normalement couvert, non exposé à une atmosphère très chaude et n’ayant pas fait une activité physique intense avant la mesure. Mais en pratique, on peut distinguer différents types de fièvre. Par exemple, les fièvres aiguës, c’est-à-dire celles évoluant depuis moins de 7 jours (moins de 5 chez le nourrisson), à distinguer ainsi des fièvres prolongées qui durent plus d’une semaine. On peut également étudier les variations de température et parler de fièvre intermittente lorsqu’il y a des pics de température suivis d’un retour à la normale, ou de fièvre récurrente lorsque la température varie sans revenir à la normale.

Comment interpréter une fièvre en hiver ?

En cette saison, les causes les plus fréquentes de fièvre sont infectieuses : infections des voies respiratoires (le plus souvent), gastro-intestinales, des voies urinaires… Il faut dans ce cas se pencher sur les symptômes associés pour avoir une idée de l’origine du problème.

Cependant, d’autres pistes sont à explorer, notamment en cas de fièvre prolongée. En effet, la fièvre peut être le premier symptôme révélateur d’une pathologie chronique sous-jacente comme une maladie inflammatoire ou un cancer. Dans ce cas, une consultation médicale est impérative. Enfin, certains traitements tels que les neuroleptiques sont susceptibles d’entraîner de la fièvre.

Et le Covid ?

Actuellement, difficile de ne pas y penser… Devant toute fièvre, il faut donc poser quelques questions à son patient. A-t-il été en contact avec une personne infectée par le Covid ? A-t-il d’autres symptômes tels que des maux de tête, une toux sèche, un essoufflement, une perte de goût et d’odorat, une fatigue importante ? Attention également aux formes digestives avec des diarrhées importantes. Au moindre doute, un test s’impose ! Tout comme rappeler l’importance des gestes barrières et le fait de s’isoler lorsqu’on est positif, on ne leur répétera jamais assez…

Comment ne pas passer à côté d’une urgence ?

Chez les enfants, une consultation en urgence doit être recommandée si la fièvre concerne un nourrisson de mois de 3 mois, si elle est supérieure à 40 °C ou encore si son état général se dégrade. Cela est également valable en cas de symptômes associés tels que maux de tête avec raideur de la nuque et vomissements, des signes de déshydratation, une respiration difficile ou des signes cutanés comme des marbrures ou une cyanose.

Chez l’adulte, certains symptômes relèvent également des urgences : un état de confusion, des céphalées avec raideur de la nuque, une tachycardie avec essoufflement, un voyage récent en zone endémique de paludisme ou des pétéchies.

Une visite chez le médecin traitant est à conseiller en cas de pathologie chronique, notamment celles prédisposant aux infections (VIH, diabète, cancer, greffe d’organe, atteintes des valves cardiaques), chez les femmes enceintes, si la fièvre persiste plus de 48 heures chez un jeune enfant (plus de 72 heures sinon).

Enfin, il faut garder à l’esprit que chez les personnes âgées, il est moins probable qu’une fièvre apparaisse au cours d’une infection et les symptômes associés peuvent être moins flagrants.

Quels conseils répéter (encore et encore) ?

Oui, le suppositoire doit être introduit par sa partie plate afin d’éviter un rejet secondaire. Non, le bain systématique n’est plus recommandé pour faire baisser la température d’un enfant. Oui, il faut boire davantage en cas de fièvre. Quelques exemples d’informations pas toujours acquises et donc utiles à répéter !

Quant à la prise en charge de la fièvre en automédication, il s’agit de rappeler que le paracétamol en monothérapie (et à bonne posologie !) est le traitement de première intention. L’adjonction d’une deuxième molécule ne se justifie qu’en cas de mauvais contrôle de la fièvre. De plus, au-delà de leurs habituelles contre-indications, les AINS et l’aspirine sont également proscrits en cas de déshydratation ou de virose, notamment de varicelle (risque de syndrome de Reye).

Au gallium, électronique, infrarouge… Quel thermomètre conseiller ?

Le thermomètre en verre au gallium (qui a remplacé celui au mercure) permet une mesure précise. Utilisable par voie buccale, rectale ou axillaire, il doit être secoué avant utilisation et maintenu en place quelques minutes avant de pouvoir lire le résultat. C’est pourquoi on lui préfère le thermomètre électronique, précis et beaucoup plus rapide.

Autre possibilité, les thermomètres à infrarouges. Ils donnent un résultat en quelques secondes et peuvent être utilisés pour la voie tympanique (mesure fiable, à condition de bien positionner l’embout en direction du tympan et en l’absence de bouchon de cérumen), temporale et frontale. À noter cependant que les mesures frontales et axillaires sont en pratique peu fiables.

Comment bien prendre la température corporelle ?

Chez les nourrissons de moins de 2 ans, la voie rectale (variations normales : 36,6 à 38 °C) doit être privilégiée pour la prise de température. L’enfant doit être placé sur le dos, genoux pliés et le thermomètre inséré sur une longueur d’environ 2,5 cm dans le rectum. Chez les enfants de 2 à 5 ans, la voie rectale reste celle de première intention. La voie tympanique (N : 35,8 à 38 °C) est un deuxième choix. Le pavillon de l’oreille doit être tiré vers le haut et vers l’arrière avant d’insérer le thermomètre. Chez les enfants de plus de 5 ans et les adultes, la voie buccale (N : 35,5 à 37,5 °C) permet d’obtenir une mesure exacte. Dans ce cas, mieux vaut utiliser un thermomètre électronique pour éviter tout risque de casse d’un thermomètre en verre. Il doit être placé sous la langue et la bouche rester fermée, si possible à distance de l’ingestion d’aliments ou de boissons car cela peut fausser la mesure. La voie tympanique est un deuxième choix.

Anne-Sophie Lebrun-Leroy

Source : Le Quotidien du Pharmacien