Des médecins qui jouent les Cassandre ? Voilà qui n'est pas banal… et semble peu conforme aux principes de l'evidence based medecine (ou « médecine fondée sur les preuves ») ! C'est pourtant l'expérience à laquelle s'est prêtée l'équipe de Xavier Jouven, cardiologue à l'Hôpital européen Georges-Pompidou, assistée de statisticiens et d'informaticiens, avec l'objectif d'éclairer l'étiologie de la mort subite. Ce phénomène, qui se traduit par une envolée du rythme cardiaque et un défaut d'irrigation du cerveau, conduit à la mort dans plus de neuf cas sur dix. Sachant qu'elle foudroie en France 1 personne toutes les 10 minutes, les scientifiques se sont posé la question : qui, dans la population, a plus de 90 % de risque de faire une mort subite l'an prochain ? Et pour transformer la prédiction en prévention, ils se sont penchés - avec son accord - sur le trésor de l’assurance-maladie, les données de santé des assurés. Ils ont ainsi alimenté les ordinateurs de l'école polytechnique avec les données de 350 000 habitants de Paris et alentours, dont 50 000 avaient été victimes d'un arrêt cardiaque. Un peu d'intelligence artificielle et beaucoup d'intelligence humaine ont animé les circuits de processeurs surdoués trois années durant.
Résultat ? L'algorithme est censé prédire qui, dans la population, a plus de 90 % de risque de faire une mort subite l'an prochain. L'IA peut même établir une échelle des facteurs de risque pour chacun, esquissant ainsi le chemin d'une prévention personnalisée. Reste à comparer ces prédictions à la réalité. Dans la mythologie grecque, Apollon avait accordé à Cassandre le don de la prophétie. Mais regrettant sa décision, et comme il ne pouvait plus lui retirer son don, il la frappa d'une malédiction : personne ne croirait jamais les prédictions de Cassandre. Souhaitons un meilleur destin aux travaux de l'équipe de Xavier Jouven…
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