Déjà utilisé dans dix autres cancers difficiles, l’anticorps monoclonal anti-PD1 signé MSD permet désormais de répondre à des besoins jusqu’ici non couverts dans le cancer du sein triple négatif. Aux stades précoces comme métastatique.
Identifié comme cible prioritaire dans la stratégie décennale de lutte contre le cancer 2021-2030, le cancer du sein triple négatif (CSTN) se définit de façon immunohistochimique par l’absence d’expression des récepteurs aux estrogènes et des récepteurs à la progestérone ainsi que par l’absence de surexpression ou d’amplification du récepteur HER2. Concrètement, c’est un sous-type particulièrement agressif au pronostic sombre, comparé aux autres sous-types de cancer du sein HR+/HER2- et HER2+. Au stade métastatique, la médiane de survie globale est ainsi de 14,5 mois contre respectivement 42,9 et 50,1 mois et le taux de survie à 5 ans de 11, 3 % contre 35,7 et 43,8 %.
Un progrès très attendu
Contrairement aux autres cancers du sein, dont le pronostic a été grandement amélioré grâce à des thérapies innovantes, aucun progrès n’était intervenu jusqu’ici depuis 20 ans pour ce sous-type redoutable. D’où l’enthousiasme avec lequel ont été accueillies les deux extensions d’AMM européenne d’accès précoce obtenues par le pembrolizumab (Keytruda) dans le cancer du sein triple négatif. « On attendait avec impatience un renforcement de l’arsenal thérapeutique dans l’objectif, d’une part de guérir les CSTN localisés et loco-régionaux, d’autre part d’augmenter la survie des CSTN métastatiques », rapporte le Dr Anne-Claire Hardy-Bessard, oncologue à l’hôpital privé des Côtes d’Armor (Plérin). C’est l’immunothérapie qui a apporté une réponse.
De fait, l’anticorps monoclonal humanisé anti-PD1 développé par MSD, utilisé depuis 2015 dans le mélanome avancé puis dans 9 autres cancers, est capable d’augmenter la capacité du système immunitaire à détecter et combattre les cellules tumorales.
Évolution des pratiques
Keytruda a tout d’abord reçu une autorisation d’AMM européenne dans le CSTN au stade métastatique en octobre 2021. Puis en France, dès novembre, une autorisation d’accès précoce post-AMM, avec l’indication : en association à une chimiothérapie, chez des patientes adultes atteintes d’un cancer du sein triple négatif localement récurrent non résécable ou métastatique dont les tumeurs expriment le marqueur PD-L1 avec un CPS (combined positive score) >/10 et n’ayant jamais reçu de chimiothérapie antérieure pour la maladie métastatique. L’essai de phase III, mené avec le pembrolizumab (200 mg en IV toutes les 3 semaines) associé à une chimiothérapie, avait en effet conclu à une amélioration de la survie globale médiane de 23 mois (contre 16,1 mois avec la chimiothérapie seule), réduisant ainsi le risque de décès de 27 %. La survie sans progression médiane était également améliorée de 9,7 mois contre 5,6, mois, soit une réduction du risque de progression de la maladie ou de décès de 35 %. Pour le Dr Hardy-Bessard, « en dépit des effets secondaires, le plus fréquent étant une hypothyroïdie, le changement est considérable ».
En mai dernier, au vu des résultats d’une autre étude réalisée chez des patientes atteintes d’un CSTN diagnostiqué à un stade II ou III, associant, en amont de la chirurgie, chimiothérapie et Keytruda poursuivi ensuite en monothérapie, la HAS n’a pas hésité à lui accorder, en mars 2022, une autorisation précoce pré-AMM européenne dans « le CSTN localement avancé ou de stade précoce à haut risque de récidive, quel que soit son statut PD-L1 ». Comme traitement néoadjuvant associé à une chimiothérapie puis poursuivi en monothérapie après la chirurgie comme traitement adjuvant. De fait, avec ce protocole, la réduction du risque de progression de la maladie était de 37 %. « L’arrivée de l’immunothérapie au stade précoce permet d’éviter les risques de rechute ou l’évolution vers un stade métastatique », commente le Pr Jean-Yves Pierga, oncologue à l’Institut Curie (Paris). « Cette diminution des risques de récidive et de progression de la maladie sont des paramètres qui peuvent changer radicalement le pronostic au niveau localisé et modifient le paradigme de traitement du CSTN, en intégrant désormais une immunothérapie dans la prise en charge des patientes. »
* D’après une conférence organisée par MSD France.
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