Il faut savoir que le diagnostic de mycose se porte sur une association de signes cutanés et que le prélèvement ne peut être le seul élément du diagnostic positif. En effet celui-ci peut être négatif alors qu’il existe une mycose, ou peut être positif lorsque la présence du champignon n’est pas responsable de la maladie.
Il existe trois grandes familles de « champignons », sachant que ce terme ne doit pas être employé par les professionnels de santé.
LES DERMATOPHYTES
Les dermatophytes sont des germes kératinophiles c’est-à-dire qui aiment la kératine de la peau, des ongles, des cheveux et des poils. Parmi ceux-ci il y a Epidermophyton floccosum, le microsporum Canis et Gypseum, et le Trichophyton, plus répandu, plus connu, plus ubiquitaire avec ses formes rubrum, violaceum, interdigitale, et mentagrophytes.
La dermatophytie de la peau glabre :
Elle portait antérieurement le nom d'Herpès circiné qui bien sûr n’a rien à voir avec l’herpès. Elle réalise des plaques circulaires parfaitement limitées avec un pourtour rose ou rouge, un peu surélevé et finement vésiculeux. Son centre est caractéristique parce qu’il est bistre et squameux. Son extension est centrifuge avec la guérison centrale. Il y a plusieurs variantes selon que la bordure est érythématosquameuse ou vésiculo-pustuleuse. Enfin les plaques peuvent être géantes et confluentes.
La dermatophytie inguinale :
Il s’agit d’une localisation particulière et on sait que la localisation, dans plusieurs dermatoses, dessine des traits particuliers. Ici la plaque est rouge à limites inférieures nettes légèrement en relief avec des microvésicules et le centre est un peu pigmenté.
Dans ce cas-là il faut toujours rechercher une dermatophytie entre les orteils de laquelle on se contamine dans le bain avec le gant de toilette par exemple.
Les Intertrigos interorteils :
Cet aspect macéré, blanc squameux hyperkératosique que l'on retrouve entre le dernier et l'avant-dernier orteil ou le troisième et le quatrième se complique souvent d'une dyshidrose plantaire mais aussi très à distance palmaire, voire d'un eczéma nummulaire, ou encore d'une atteinte unguéale. La dyshidrose est dans ce cas le fruit d'une réaction immuno-allergique reliée à l’atteinte infectieuse locale.
Les atteintes palmaires et plantaires particulières :
Tinéa manuum et Tinéa Pédis réalisent une dermatose sans limite nette sur un fond érythémateux, avec un enduit farineux au fond des plis palmaires et plantaires. Certains sujets sont porteurs chroniques de cet agent fongique, du fait d’une particulière immunodépression locale.
Les teignes :
Au niveau du cuir chevelu nous avons les teignes tondantes microsporiques, squamocroûteuses ou encore inflammatoires que sont les kérions.
Bien entendu il ne faut pas les confondre avec la pelade où la peau est parfaitement glabre, sans le moindre signe d’infection et qui relève d’un mécanisme immunologique.
L’infection mycosique au niveau de la barbe donne le sycosis qui est le plus souvent d’origine mixte staphylococcique et dermatophytique.
Atteintes unguéales :
On retient trop souvent un diagnostic de mycose lorsqu’un ongle est malade alors que les onychomycoses ne représentent que moins de la moitié des onychopathies.
Comment savoir si une maladie des ongles est d’origine mycosique ?
Tout d’abord si plusieurs ongles des mains sont atteints ce n’est probablement pas une mycose. Les ongles des mains sont rarement atteints par une mycose. On peut tout au plus voir un périonyxis d’origine candidosique qui peut parfois n’être qu’une forme particulière de psoriasis pustuleux appelé acrodermatite pustuleuse de Hallopeau.
Lorsqu’un malade présente une atteinte des ongles des mains il convient de faire un examen clinique complet car on pourra voir des plaques de psoriasis et alors le décollement de la tablette que l’on aura observé relèvera du diagnostic d’onycholyse psoriasique.
Les ongles blancs qui ne sont autre chose que le lit de l’ongle d’aspect blanchâtre relève de causes métaboliques comme l’insuffisance rénale ou une maladie hépatique.
Les ongles sont souvent atteints par une maladie immunologique appelée pelade et l’atteinte de plusieurs ongles des mains, de ce fait, écartera une mycose et permettra de mieux retenir des maladies inflammatoires. En cas d'atteinte unique d'un ongle, penser aux tumeurs surtout si la lésion ne régresse absolument pas et ne va que croissant.
Sachons aussi que la déformation des ongles des petits orteils est physiologique, il y a parfois le syndrome des bourrelets latéraux qui entraîne une déformation en tuiles des ongles qui peuvent s’épaissir et dont la cause est due à cet excès de peau latérale et antérieure.
Les pigmentations de l’ongle sont inquiétantes car on pense toujours au mélanome. Il faut savoir retenir le diagnostic de mélanose de friction lorsque plusieurs ongles sont atteints et qu’il s’agit de pieds serrés dans des chaussures.
Le diagnostic en dermatologie ne se fait jamais sur les seuls signes de la peau mais s’intègre dans un contexte général. Ainsi si votre patient a une maladie pulmonaire chronique, ou une sinusite chronique, ses ongles épais jaunes ou marron deviendront le syndrome des ongles jaunes, lymphœdème d’apparition tardive.
LES LEVUROSES
Les candidoses :
Les candidoses sont l’apanage des muqueuses buccales et génitales mais aussi curieusement de certains plis comme les plis sous-mammaires et interdigitaux palmaires.
Les candidoses sont une variété de levurose parmi lesquelles il y a les infections à Candida Albicans, les pityrosporoses à Malassezia furfur, et la cryptococcose.
Les pityrosporoses :
Il y a la classique dermite séborrhéique qui porte mal son nom car il n’y a quasiment jamais d’hyperséborrhée, le pityriasis capitis caractérisé par un état pelliculaire, le pityriasis versicolor fait de plaques chamoisées ou dépigmentées, et les folliculites pityrosporiques.
La cryptococcose sera évoquée chez un immuno-supprimé ou au cours du SIDA, avec des aspects parfois très particuliers proches de celui de molluscum contagiosum.
LES MOISISSURES
La plus classique est celle des ongles des gros orteils des personnes âgées due à Scopulariopsis brevicaulis.
L’Aspergillus donne peu d’atteintes cutanées en dehors de l’immuno-déprimé. On trouve parmi les moisissures des Fusarium et de l’Acremonium.
Tout ce qui est dans les plis n’est pas une mycose, preuve en est avec l’érythrasma qui réalise des plaques brun rouge, uniformes, sans bordure nette ; il est dû à Corynebacterium minutissimum. Le traitement repose sur les macrolides per os.
COMMENT FAIRE LE DIAGNOSTIC D'UNE MYCOSE ?
Le diagnostic d’une mycose repose avant tout sur la topographie, le nombre de plaques ou de zones atteintes, l’aspect des lésions, l’existence de pathologies cutanées ou systémiques associées, leur évolution, et la réponse au traitement.
Le prélèvement mycologique ne sera en aucun cas la façon de poser le diagnostic car il est moins sensible que l’examen clinique. Il permettra d’identifier la souche mais un prélèvement négatif signifie qu’en cas de mycose, le champignon n’a pas voulu pousser sur le milieu de Sabouraud.
En cas de pathologies buccales, si l’on trouve un candida, cela ne signifie pas qu’il s’agit d’une candidose car la moitié des prélèvements seront positifs quoi qu'il arrive.
Dans certains cas la biopsie est utile avec une coloration PAS.
Quant aux organes génitaux, un prurit vulvaire chez la femme n’est pas le signe d’une candidose s’il n’y a pas de plaques rouges, de dépôts de « lait caillé », et de vésiculopustules.
Un intertrigo inguinal chez l’homme avec balanite chronique n’est pas forcément une mycose mais peut-être un psoriasis.
Pensez aussi qu’au niveau génital il peut y avoir des balanites réactives comme dans le syndrome de Reiter.
Je pense que personne ne posera le diagnostic de champignons devant des lésions, verruqueuses qui ne sauraient être autre chose que des condylomes vénériens.
LE TRAITEMENT
Le traitement repose sur l’utilisation des imidazolés dans tous les cas qu’il s’agisse des levures ou des dermatophytes. La terbinafine est plus particulièrement réservée aux champignons kératinophiles.
La durée du traitement d’une levurose (candidose, dermite séborrhéique) est de 15 jours à trois semaines. Le traitement d’une dermatophytie est de quatre à six semaines. Pour s’en souvenir, rappelez-vous que ce champignon est kératinophile et donc censé aller profondément dans le follicule pileux. La pommade appliquée en surface doit attendre patiemment la remontée des cellules profondes avec le cycle de renouvellement épidermique qui est de quatre semaines.
Quand utilise-t-on un traitement systémique ?
En cas d’atteinte unguéale, ou du cuir chevelu, lorsqu’il y a plusieurs plaques, lorsqu’il y a impossibilité à utiliser le traitement local. Attention les médicaments systémiques ont des effets métaboliques inducteurs enzymatiques à savoir utiliser lorsque le malade est polymédicamenté.
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Françoise Amouroux
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