C’est l’un des plus beaux villages de France. Paradis des randonneurs et adeptes du canoë, le village médiéval de Sainte-Enimie, en Lozère, ne compte que 500 habitants à l’année, mais attire de nombreux touristes l’été.
Depuis un an et demi, son pharmacien Vincent Lacas souhaite passer la main pour raisons familiales après trois années et demie passées à la tête de l’officine installée à l’entrée du bourg. « Je suis originaire d’un village voisin et après une expérience dans un autre secteur que la pharmacie, j’ai eu l’opportunité de reprendre celle-ci. Tout se passe bien, mais des raisons personnelles m’invitent à prendre du recul », témoigne-t-il. Malheureusement, à ce jour, l’officine, l’une des 35 que compte le département, n’a fait l’objet d’aucune marque d’intérêt. Son prix est pourtant très attractif : 105 000 euros.
« Elle serait idéale pour un jeune qui souhaite s’installer et devenir son propre patron avec peu d’apport. Un amoureux de la nature y trouverait aussi son compte », défend Guillaume Pandraud, qui travaille pour l’Auxiliaire Pharmaceutique dans la région Occitanie. La pharmacie de Sainte-Enimie a réalisé l’an dernier un chiffre d’affaires de 320 000 euros, alors qu’elle est ouverte 5 heures par jour du lundi au vendredi. Rentable, l’affaire permet à son titulaire de générer un salaire mensuel de 3 000 euros. « Il y a une bonne trésorerie, de l’ordre de plus de 20 000 euros par an, qui permettrait de se rémunérer davantage », précise Vincent Lacas, qui se fait aider durant l’été au comptoir dédié à la parapharmacie.
Une solide coopération interpro
Sur le plan sanitaire, la fermeture de la pharmacie de Sainte-Enimie serait un coup dur pour les habitants du canton. Les officines les plus proches se trouvent en effet dans des villages éloignés de 25 à 35 minutes par la route. Du moins, en été ! Car en hiver, les conditions climatiques peuvent considérablement allonger la durée de trajet.
« Nous sommes partisans que la pharmacie la plus proche puisse racheter la licence sans pour autant que l’on considère qu’il s’agisse d’une deuxième pharmacie pour son titulaire. Cela a existé par le passé. On parlait de pharmacies mère-fille. Cette solution permettrait au cédant de ne pas partir sans rien, de faire vivre le stock de la plus grande pharmacie, tout en maintenant, même quelques jours par semaine, un comptoir dans le village », expose pour sa part Bruno Galan, président de l’Ordre régional des pharmaciens d’Occitanie.
À Sainte-Enimie, la communauté médicale affirme qu’elle ne pourrait pas supporter la non reprise de l’officine. « Nous avons aujourd’hui, avec trois infirmiers et le pharmacien, un fonctionnement qui nous permet d’assurer les soins d’une population âgée qui, souvent, ne peut pas se déplacer », confie le Dr Véro Maunoury, dont le cabinet se trouve à une centaine de mètres de la pharmacie.
Ainsi, chacun des professionnels de santé dispose d’une clé de la boîte aux lettres située devant la pharmacie. Ordonnances, carte Vitale, résultats d’analyses et médicaments y sont disposés à l’attention d’un autre professionnel de santé. « C’est un fonctionnement à l’ancienne où nous échangeons en permanence sur le besoin de nos patients. Sans pharmacie à Sainte-Enimie ce serait très difficile de tenir, poursuit la médecin. Travailler comme nous le faisons aujourd’hui en nous rendant dans une autre pharmacie, je ne pourrai pas le faire. »
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