L’ARTICLE 12 bis du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2014 n’a pas fini de faire parler de lui. Ajouté via un amendement déposé le 23 octobre, il provoque l’inquiétude de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF) et la colère de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO). Ce texte prévoit en effet l’ajout d’une taxe de 20 % sur le chiffre d’affaires hors taxes des laboratoires pharmaceutiques, « correspondant au montant de la marge rétrocédé aux pharmacies », lors de la vente directe de médicaments aux officines.
« Les ventes directes, qui échappent à la répartition, représentent en France 37 %, soit plus d’un tiers, des volumes globaux », avait estimé Hubert Olivier, président de la Chambre syndicale de la répartition pharmaceutique (CSRP), lors de son audition le 30 janvier devant la commission des Affaires sociales de l’Assemblée nationale. Il avait pointé une « spécificité française » et noté que, « dans les pays de l’Union européenne, les ventes directes représentent en moyenne entre 10 et 12 % des volumes – 15 % en Allemagne ». Le PLFSS 2014 semble prévoir de mettre un terme à cette exception nationale.
« Nous sommes très inquiets, réagit Philippe Gaertner, président de la FSPF. Cet amendement a été introduit à notre grande surprise, sans discussion en amont. » Il craint notamment que « cette taxation des ventes directes, en contrepartie de la diminution de la contribution ACOSS des grossistes, ne conduise à un transfert négatif pour l’officine. Elle risque de provoquer une diminution, voire un arrêt des propositions commerciales des laboratoires, sans pour autant que l’officine ne bénéficie de l’allégement des taxes des grossistes-répartiteurs. Le différentiel risque d’être payé par l’officine. »
Une taxe au montant dissuasif.
La FSPF est actuellement en train de mesurer les coûts que pourrait engendrer cette mesure pour les pharmaciens. « Cela risque de se chiffrer en millions d’euros. Je ne suis pas sûr que ces effets collatéraux aient été bien mesurés, pointe Philippe Gaertner. À chaque fois que l’on bouge les choses dans les secteurs intermédiaires du médicament, c’est l’officine, en bout de chaîne, qui finit par payer », regrette-t-il.
De son côté, Gilles Bonnefond, président de l’USPO, ne cache pas sa colère. « C’est un très mauvais coup pour l’officine », s’insurge-t-il. Il pointe une « manœuvre des grossistes-répartiteurs pour empêcher les pharmaciens de négocier en direct avec les laboratoires ». Il estime que « dans certaines zones, les grossistes-répartiteurs ne sont pas toujours en situation de concurrence et imposent des conditions d’achats et de frais de livraison injustifiés ». Or, pour lui, le montant « très dissuasif » de la taxe va conduire « des laboratoires français, notamment ceux qui commercialisent du paracétamol, à ne plus réaliser de ventes directes auprès des officines ». Il note également que « les laboratoires d’homéopathie, qui vendent tous en direct au pharmacien, vont être durement affectés ». Par ailleurs, il s’inquiète des difficultés que va engendrer cette mesure, « alors que la vente directe permet aussi aux pharmacies de faire face aux ruptures d’approvisionnement. Cette mesure risque de mettre en difficulté, non seulement les officines mais également l’approvisionnement des patients », souligne-t-il. Pour lui, cet article constitue une raison supplémentaire de conclure un contrat pluriannuel avec l’État, afin qu’« on ne nous reprenne pas d’un côté ce que l’on nous donne de l’autre ».
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