DMP. Trois lettres qui résonnent aux oreilles des acteurs de santé depuis bientôt quinze ans, tantôt pour définir un dossier médical personnel, tantôt pour identifier un dossier médical partagé. Trois consonnes dont Philippe Douste-Blazy, ministre de la Santé en 2004, voulait faire le symbole d’une meilleure prise en charge des patients. Un acronyme aux allures de serpent de mer pour définir le carnet de santé numérique des Français, puisque le dossier médical partagé peinait jusqu’alors à exister.
Relancé par Marisol Touraine en 2015, dans le cadre de sa loi de modernisation du système de santé, le DMP a été confié à l'assurance-maladie et devrait être « totalement déployé d'ici à la fin de l'année 2018 », selon le souhait de l’actuelle ministre de la Santé, Agnès Buzyn. Face aux économies potentielles, il y a fort à parier que ce « dossier unique informatisé, qui éviterait la redondance d'actes médicaux entre la ville et l'hôpital grâce au partage d'informations médicales sur le patient, » voie enfin le jour.
« Sur les douze mois écoulés, quelque 400 000 DMP ont été créés dans les neuf départements* où se déroule la phase expérimentale, dont 36 000 en Indre-et-Loire où une équipe pluridisciplinaire a été dédiée à son déploiement », explique Nathalie Grabherr, chef de projet innovation pour la CPAM d’Indre-et-Loire. Soit autant qu’en cinq ans dans quatorze régions. Au total, depuis 2011, plus d’un million de DMP ont vu le jour sur l’ensemble du territoire national.
Accéder aux informations médicales utiles
Ce chiffre devrait encore augmenter puisque les professionnels de santé auront un intérêt direct au déploiement du DMP, à l’instar des pharmaciens d’officine. En effet, conformément à l’avenant n° 11 de la convention pharmaceutique, « chaque officinal percevra 1 euro pour chaque DMP ouvert », rappelle le président de l’Union des syndicats de pharmaciens d'officine (USPO), Gilles Bonnefond.
« Dès lors que les professionnels de santé (infirmier, kinésithérapeute, médecin, pharmacien…), libéraux et hospitaliers, sont impliqués dans la prise en charge du patient, le DMP doit leur permettre d'accéder aux informations médicales utiles (antécédents, allergies éventuelles, médicaments pris, comptes rendus d'hospitalisation et de consultation, résultats d'examens radiologiques ou biologiques…) et de les partager avec d'autres professionnels de santé », souligne Philippe Besset, vice-président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF).
Double clé
Accessible en ligne et relevant du secret professionnel, le DMP constitue donc un véritable carnet de santé toujours sécurisé, dont le patient contrôle l'accès. Car « la création d’un DMP n’est possible qu’avec le consentement du patient, qui peut en outre décider à tout moment de supprimer certains des documents qu'il contient, ou de masquer certaines informations », explique le président de France Assos Santé, Alain Michel Ceretti (voir ci-dessous).
Lorsque le DMP est ouvert à l'officine, outre la carte vitale du patient, le pharmacien devra disposer de sa CPS (carte de professionnel de santé). Car « l’ouverture d’un DMP par un professionnel de santé nécessite cette double clé, synonyme de sécurité », indique Francis Mambrini, vice-président de l’éditeur CGM et président de la Fédération des éditeurs d’informatique médicale et paramédicale ambulatoire (FEIMPA).
Partage sécurisé
Une exigence de sécurité que juge « logique » Xavier Augay, PDG de l’éditeur Icanopée, puisque « le rôle de l’État est de pérenniser les données de santé en garantissant une consultation sécurisée ». Rien d’étonnant dès lors à ce que les éditeurs aient « développé une application mobile inspirée de ce qui existait dans le milieu bancaire pour établir de manière fiable et définitive l’identité du professionnel de santé via une synchronisation de son smartphone avec la carte CPS ».
Dans les pharmacies, où des professionnels sans CPS peuvent être amenés à consulter un DMP, un identifiant (login) et un mot de passe à usage unique seront alors envoyés sur le smartphone référencé. Un moyen de concilier une identification sécurisée de la personne qui souhaiterait consulter un DMP avec la souplesse d’utilisation qu’implique la notion même de parcours de soins.
Pour parfaire le dispositif, encore faudrait-il que « la prescription dématérialisée puisse être intégrée au DMP, à l’instar du dossier pharmaceutique », estime le président de l’Union nationale des professionnels de santé (UNPS), Daniel Paguessorhaye. Et c’est là que le bât blesse car « il s’agit d’un enjeu politique », explique Christian Grenier, président de Federgy. L’assurance-maladie souhaiterait en effet garder la main en hébergeant le DMP et les ordonnances sur un serveur dont elle serait propriétaire, alors que les professionnels de santé ne l’entendent pas de cette oreille…
* Dans le cadre de l’expérimentation, seuls les bénéficiaires majeurs du régime général des caisses du Bas-Rhin, de Bayonne, des Côtes-d’Armor, du Doubs, de Haute-Garonne, d'Indre-et-Loire, du Puy-de-Dôme, de la Somme et du Val-de-Marne.
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