Ce qu’en pensent les pharmaciens

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Publié le 24/09/2018
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Les représentants de la profession portent un regard mitigé sur le Plan santé d’Emmanuel Macron. S’ils jugent certaines mesures intéressantes pour l’officine, ils s’inquiètent du mode de financement reposant pour une bonne partie sur des économies sur les médicaments.

Le président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF), Philippe Gaertner, estime que le Plan santé annoncé par le président de la République présente « des idées et des intentions » pour notre système de santé.

Toutefois, selon lui, peu de mesures concernent directement la pharmacie d’officine. Même s’il considère nécessaire de réussir la prise en charge coordonnée des malades, il pense que les officinaux auront dû mal à trouver leur place au sein des structures prévues par le plan, telles les CPTS*, celles-ci étant plutôt destinées aux patients lourds. Mais, au-delà des mesures, le président de la FSPF s’interroge sur la question des moyens qui seront mis à disposition de la réforme. Or, pour l’heure, le gouvernement a d’ores et déjà annoncé qu’il comptait réaliser 1 milliard d’euros d’économies sur le médicament. Ce qui aura des conséquences économiques « encore une fois très fortes sur le secteur de la pharmacie d'officine », craint Philippe Gaertner.

Pour Gilles Bonnefond, président de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO), la réforme annoncée va dans le bon sens. D’autant que, à ses yeux, de par leur répartition sur l’ensemble du territoire, les officinaux ont une carte à jouer dans le renforcement des soins de proximité prôné par le chef de l’État.

Selon lui, permettre à tous les pharmaciens de participer aux CPTS est une évidence. Et le décret à venir sur les services** leur offrira la possibilité de s’impliquer pleinement dans la coordination des soins et d’entrer dans la stratégie de transformation du système de santé, estime Gilles Bonnefond. Pour lui, l’urgence est d’avoir des médecins plus disponibles et de permettre à chaque patient d’avoir un médecin traitant. « La suppression du numerus clausus ne produira ses effets que dans 10 ans, explique Gilles Bonnefond. Aussi, il faut, dans le cadre de protocoles de soins encadrés par des médecins coordonnateurs, déléguer la surveillance des patients aux pharmaciens et aux infirmiers quand leur état ne nécessite pas de consultations rapprochées. » Mais le président de l’USPO s’inquiète, lui aussi, des conséquences économiques pour le réseau : « Je ne voudrais pas que pour des raisons d’équilibre de l’ONDAM, on fasse les poches des pharmaciens dans le PLFSS pour 2019, au risque de remettre en question la réforme de notre profession que nous avons bâtie pour les prochaines années, réforme qui justement anticipe la transformation du système de santé ».

Du côté des étudiants en pharmacie, on se félicite de la disparition du numerus clausus. Mais l’Association nationale des étudiants en pharmacie de France (ANEPF) demande des garanties tant sur le maintien d’enseignements spécifiques construits « autour de stages et des capacités d’accueil adaptées » que sur la régulation des flux « dans le respect du maillage officinal ». Toutefois l’ANEPF ne peut cacher sa déception à l’annonce de la création du métier d’assistant médical. « Une revalorisation complète des métiers de la santé eut été plus judicieuse », déclarent les étudiants en pharmacie faisant référence au rapport de Thomas Mesnier qui identifiait les pharmaciens comme des acteurs de santé dans les soins non programmés. Toutefois, ils se déclarent prêts à saisir les opportunités offertes par le Plan santé : décloisonnement du système de santé, mise en œuvre du DMP et bien entendu, participation aux CPTS.

* Communautés professionnelles de territoire de santé.
** Ce décret doit définir les conseils et prestations destinés à favoriser l'amélioration ou le maintien de l'état de santé des personnes que peuvent proposer les pharmaciens.

Marie Bonte et Christophe Micas

Source : Le Quotidien du Pharmacien: 3459