Des données partagées par un code 2D
Le principe général de l'ordonnance numérique repose sur l'émission par le médecin d'une ordonnance papier sur laquelle est apposé en bas à gauche un QR code spécifique à la prescription. Le QR code est le vecteur de cette nouvelle technologie. Il s'agit d'un tampon numérique à usage unique, identifiable et sécurisé. Il est impossible de le remplacer par un autre. De même, une fois le traitement délivré par le pharmacien, le QR code désactivé ne peut être réutilisé.
Le contenu de l'ordonnance est enregistré dans la base de données de l'assurance-maladie. Parallèlement, la prescription est enregistrée sur le DMP du patient qui pourra, au besoin, la retrouver dans « mon espace santé ». Dans un premier temps, la prescription électronique est réservée aux médicaments et aux dispositifs médicaux. Les données de la prescription sont également renseignées dans la base de données de l'assurance-maladie.
Muni de cette ordonnance nouveau modèle, le patient remet au pharmacien de son choix la prescription dotée du QR code. Le scan du QR code permet, via le LGO, de récupérer les données de la prescription qui auront été transmises par le prescripteur dans la base de données.
Le dispositif prévoit que cette prescription puisse être totalement dématérialisée. Dans ce cas, le patient détiendra le QR code sur son smartphone qu'il présentera au pharmacien.
Aucune interférence sur les pratiques professionnelles
La rédaction d'une ordonnance numérique n'affecte pas la durée de la consultation, ni la liberté de prescription du médecin. Le pharmacien peut intervenir sur la prescription comme il le fait déjà aujourd'hui, selon les conditions prévues par la réglementation. Les interventions pharmaceutiques seront donc réalisées dans les mêmes conditions. Il suffira à l'officinal d'enregistrer sur la base de son logiciel les raisons qui l'y ont conduit. Les règles de délivrance demeurent inchangées. Par ailleurs, le pharmacien gagne du temps grâce à un transfert automatique des pièces justificatives. C'est la fin des copies d'ordonnances et de leur transmission à l'assurance-maladie via le système Scor.
Pour un meilleur suivi du parcours de soins
Pourvu qu'il y soit autorisé par le patient, le médecin est en mesure de vérifier sur son logiciel si le traitement a bien été retiré à la pharmacie. Le praticien peut également accéder via la base de données aux modifications apportées par le pharmacien lors de la délivrance. Il pourra ainsi prendre connaissance des motifs qui ont amené l'officinal à cette intervention pharmaceutique. L'ordonnance numérique facilite les échanges entre les professionnels de santé autour de la prescription et de la délivrance.
De plus, le dispositif supposant un recours systématique à des logiciels d'aide à la prescription (LAP) et la dispensation, les risques d'iatrogénie et d'interactions médicamenteuses s'en trouvent réduits.
La fin des faussaires ?
L'authenticité de la prescription est garantie car la carte CPS du médecin est nécessaire pour émettre le QR code. De plus, une fois scanné par le pharmacien, le QR code est désactivé. Il est donc impossible de se faire délivrer une seconde fois la même ordonnance. Les officinaux ne devraient plus être confrontés à de fausses prescriptions, ni à des ordonnances falsifiées par les patients. Les médicaments chers sont particulièrement la cible de ces fraudes. Il s'agit en effet d'un marché attractif pour les trafiquants. Marguerite Cazeneuve, directrice déléguée à la gestion et à l'organisation des soins de la Caisse nationale de l'assurance-maladie, souligne le poids de ces molécules onéreuses et « l'énorme distorsion » qu'elles créent dans les comptes de la Sécurité sociale. « 0,4 % des boîtes dispensées représentant 48 % des montants remboursés en ville », rappelle-t-elle.
Une mise à jour prise en charge par l'assurance-maladie
« Élément socle de la feuille de route du numérique en santé, phase 1 du Ségur », comme l'a rappelé Marguerite Cazeneuve, l'ordonnance électronique sera opérationnelle au plus tard fin avril 2023, le temps que médecins et pharmaciens disposent de la mise à jour du logiciel métier référencé Ségur, entièrement financée par l'assurance-maladie. Ainsi, les pharmaciens détiendront automatiquement à travers cette mise à jour un module e-prescription dans leur logiciel. Par ailleurs, dans les pharmacies, une ou plusieurs douchettes seront indispensables pour lire le QR code (code 2D) figurant sur l'ordonnance papier.
La ville avant l'hôpital
Pour autant, le recours à l'ordonnance électronique ne sera rendu obligatoire qu'au 1er janvier 2025 pour les médecins. Dans la situation intermédiaire, ou si eux-mêmes ne disposent pas encore de l'équipement, les pharmaciens traiteront la prescription comme une ordonnance classique.
Il est cependant recommandé d'effectuer les démarches dès aujourd'hui pour rendre ce dispositif opérationnel dans les délais. Les pharmaciens doivent passer commande sans attendre, et au plus tard avant le 15 mars, auprès de leur éditeur de logiciels pour obtenir la mise à jour de leur LGO. L'installation du logiciel devra avoir lieu avant le 28 avril 2023. Il en est de même pour les médecins.
Les prescriptions hospitalières destinées à être délivrées en ville ne seront concernées qu'à partir de la fin 2024. Les établissements obtiendront à cette date le module d'ordonnances pour les prescriptions de sortie. Il est d'ores et déjà évident que les fraudes, portant essentiellement sur les médicaments onéreux prescrits en établissements hospitaliers, ne pourront être endiguées avant cette date.
Données épidémiologiques et cybersécurité
Pour l'assurance-maladie, l'ordonnance numérique, facteur de réduction des fraudes et des rejets de facturation, est sans conteste une source d'économie. Elle constitue également une mine de données épidémiologiques, notamment en ce qui concerne la durée des traitements (antibiotiques) ou encore les interventions pharmaceutiques (IP). Cependant, la sécurisation des données de santé reste un point sensible. Annika Dinis, directrice de la Direction du numérique et de l'innovation en Santé de la Caisse d'assurance-maladie, se veut rassurante, « les données sont hébergées en France selon une architecture définie pour supporter une montée en charge progressive à partir de 2024 ».
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