LA PRISE de conscience de l’impact de l’audition sur le développement cognitif, le comportement et la communication tout au long de la vie, est un phénomène nouveau. La limitation de la capacité auditive ne concerne pas que les seniors touchés par une surdité progressive liée au vieillissement (presbyacousie), elle devient un critère de santé pour toutes les tranches d’âge dès 16 ans. Selon les résultats de l’enquête JNA-Ipsos-CA, la perte de l’audition est la quatrième source d’inquiétude des Français concernant la santé, après la perte d’autonomie, celle des capacités visuelles et les AVC. Pour 81 à 89 % des personnes interrogées, les difficultés d’audition impactent la qualité de vie. Pour 52 %, une exposition sonore élevée (bruit au travail, baladeur, concert, MP3) est la première cause expliquant ce déficit, loin devant le vieillissement (27 %). Cette année, la 17e édition de la Journée nationale de l’audition (JNA), jeudi 13 mars, mettra l’accent sur les acouphènes (bourdonnements et sifflements dans la tête et dans l’oreille) et l’hyperacousie (hypersensibilité aux bruits normalement supportés).
Déséquilibres.
« Vivre en permanence avec ces troubles provoque fatigabilité, dégradation de la vie intellectuelle, physique, psychique et sociale. Ces déséquilibres peuvent parfois amener les sujets les plus fragiles à tomber en dépression, alors que d’autres s’en accommodent et vivent avec sans oser en parler, déclare Roselyne Nicolas, présidente de France Acouphènes. Il faut faire une différence entre avoir un acouphène de façon temporaire et en souffrir de façon chronique. » Cette pathologie touche indifféremment les jeunes, les adultes et les seniors ; les derniers chiffres officiels font état de 16 millions d’acouphéniques en France : 50 % des sondés en ont déjà ressenti, tout particulièrement les jeunes de 16-34 ans (56 %).
Le phénomène est plus connu (88 %) que celui de l’hyperacousie, qui semble concerner toutes les tranches d’âge à hauteur de 29 % de la population. Les Français qui estiment connaître ces pathologies les décrivent et les expliquent pertinemment ; comme pour la perte de capacités auditives, la première cause supposée est le traumatisme sonore lié à une activité de loisir ou professionnelle. La musique amplifiée est principalement incriminée (72 %), surtout chez les jeunes (82 % chez les moins de 35 ans). Paradoxalement, les personnes concernées par la pathologie estiment le phénomène moins gênant que ce qui est supposé (82 % versus 88 %), mais il impacte tous les domaines (concentration, compréhension, sommeil, anxiété, tâches quotidiennes). Pourtant, une personne souffrant d’acouphènes sur deux n’a jamais consulté ; ceux qui ont consulté (les seniors à 66 %) n’ont reçu aucun conseil ni aucune prescription dans un cas sur deux. Les professionnels consultés sont les ORL (33 %) et les médecins généralistes (23 %).
Dépistage et suivi.
Bien qu’il y ait des avancées dans le domaine de la recherche, il n’existe pas encore de traitement pour guérir les acouphènes, néanmoins des solutions dites d’habituation ont été développées. « C’est un état dans lequel le patient ne va pas chercher le silence mais son acouphène, il aura alors conscience d’en avoir un, explique le Dr Martine Ohresser, membre du comité scientifique de la JNA ; le médecin doit le convaincre que la façon de guérir est l’indifférence : le mal ne sera plus intrusif, le cerveau sera devenu indifférent à cette sonorité. » L’autre ambiguïté est que ce n’est pas tant le son lui-même qui rend l’acouphène difficile à supporter mais l’émotion qu’on y associe ; il faut prendre en compte la détresse qui peut accompagner le symptôme. « La prise en charge des acouphènes et de l’hyperacousie nécessite un accompagnement par des équipes pluridisciplinaires associant ORL, audioprothésiste, et parfois psychologue qui propose des séances de sophrologie et de thérapie cognitive et comportementale », souligne la spécialiste.
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