À PARTIR DE MI-MAI, Les Entreprises du médicament (LEEM) lancent un programme de lutte contre la iatrogénie médicamenteuse chez les sujets âgés auprès des médecins, des pharmaciens et des patients âgés. L’objectif est de créer un « réflexe iatrogénie » devant les principaux signes annonciateurs de la iatrogénie médicamenteuse (malaise, vertiges, chute, perte d’appétit, troubles de la mémoire), afin que les acteurs de santé et les malades réagissent face à ces signes. « La iatrogénie médicamenteuse, c’est d’abord une affaire de bon sens et de vigilance collective dans toute la chaîne de prescription, jusqu’à la responsabilisation de la personne âgée », souligne Patrick Errard, président du LEEM, qui rappelle que « la prise excessive ou inappropriée de médicaments a pour principale conséquence la survenue d’interactions médicamenteuses, responsables de 128 000 hospitalisations par an, dont plus d’un quart sont jugées évitables ».
Engager le dialogue.
Au final, le LEEM souhaite que, grâce à cette campagne, le dialogue soit engagé entre le médecin, le pharmacien et le patient au sujet du risque iatrogénique. L’objectif serait que, pour limiter ce danger, le médecin révise régulièrement la prescription médicamenteuse ligne par ligne et l’adapte au patient. « Car avec l’âge, le profil du patient évolue : des maladies apparaissent, mais aussi la masse musculaire, la clairance rénale et les capacités des transporteurs sanguins s’amenuisent. Ainsi, le patient peut ne plus supporter des médicaments pourtant prescrits depuis longtemps », évoque le Dr Cnokaert (service de gériatrie de Centre hospitalier de Beauvais).
Or, bien souvent, « les médicaments sédimentent au fil du temps sur les ordonnances, le médecin en ajoute un, puis un autre… La révision des ordonnances du senior serait donc un réel plus », confirme Le Dr Joël Cogneau, médecin généraliste et directeur scientifique de l’institut de recherche en médecine générale.
Des patients favorables à la révision d’ordonnance.
Selon une enquête menée par le LEEM*, les patients semblent très favorables à ce que le médecin et le pharmacien prennent en main le risque iatrogénique : « 92 % accepteraient que leur médecin révise leur ordonnance pour vérifier sa pertinence. Et 75 % suivraient de façon certaine le conseil de leur pharmacien s’il leur recommandait de ne pas prendre tel ou tel médicament susceptible d’entraîner un effet nocif sur les autres », rapporte Patrick Errard. Par ailleurs, il ne faut pas oublier l’automédication qui peut également interférer avec les médicaments prescrits : « 63 % des personnes âgées disent avoir recours à l’automédication, et 30 % n’en parlent pas à leur prescripteur », évoque Catherine Wolf, présidente du Conseil régional de l’Ordre des pharmaciens de Haute-Normandie. Elle rappelle que « le pharmacien dispose d’un outil unique, le dossier pharmaceutique, qui lui permet de connaître et d’évaluer les médicaments pris par le patient sur les quatre derniers mois, quel que soit le prescripteur, et d’être alerté des interactions médicamenteuses ».
Demain, le rôle du pharmacien sera encore plus vaste lorsque les décrets sur la préparation des doses à administrer seront publiés. « Nous pourrons proposer ce service supplémentaire à nos patients afin de lutter encore plus efficacement contre la iatrogénie », se réjouit Catherine Wolf. Et pourquoi pas - même si l’idée n’a pas été émise par le LEEM - on pourrait envisager que les pharmaciens prennent en charge une nouvelle mission de « révision de la médication », qui est menée avec succès par la profession dans des pays tels que la Grande Bretagne ou le Canada. À suivre.
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