Une fois n’est pas coutume, je vais un peu parler de moi. De mon expérience du comptoir. Autant vous le dire tout de suite, elle ne date pas d’hier et convoque des souvenirs anciens. Mais c’est justement leur âge avancé qui donne son sens à ce regard dans le rétroviseur. Rendez-vous compte un peu, je suis d’un temps où la carte Vitale n’existait pas. Où le verbe « substituer » était vide de sens… et pour cause, le générique lui-même n’était pas né ! Au cœur des années quatre-vingt (eh oui, voici un indice) ni moi, ni aucun de mes confrères n’aurait songé à planter une seringue dans l’épaule d’un de ses patients – même si j’en connais certains qui prodiguaient ce soin en toute illégalité dans la réserve de l’officine -, ou à plonger un badigeon dans des narines en quête de diagnostic… Quarante petites années ont passé, et aujourd’hui tout cela est possible, entre autres. Dispensation protocolisée, entretiens pharmaceutiques, préparation des doses à administrer, vaccination et dépistages à l’officine… Telles sont quelques-unes des missions quotidiennes du pharmacien du XXIe siècle qui n’a plus grand-chose à voir avec ses aïeux. Sauf la vocation bien sûr ! Le métier a tellement évolué, qu’on peut, sans exagérer, parler de l’avènement d’un « nouveau pharmacien ». Voire d’une révolution. Les outils même de l’acte pharmaceutique ont changé : l’ordonnance électronique - support de la prescription - arrive, tout comme le dossier partagé qui compile la vie médicale de leurs patients, tout cela bouleverse, d’une autre façon encore, le quotidien des pharmaciens. Dans ce dossier dédié, c’est bien un portrait en profonde mutation que nous redessinons. Celui du pharmacien nouveau.