Le Quotidien du pharmacien. – La convention médicale incite à la révision de l’ordonnance avec la mise en place d’une consultation longue dite « de déprescription ». Est-ce remettre en cause les pratiques des médecins ?
Dr Luc Duquesnel. – Aujourd’hui, les médecins ont de plus en plus de patients, avec de plus en plus de pathologies chroniques. On arrive à des ordonnances avec un nombre de lignes important, ce qui pose un véritable problème de santé publique. Au-delà de son impact financier, cette mesure permet au médecin de prendre le temps de s’interroger sur des traitements mis en place chez le patient il y a plusieurs années. Ce qui nécessite une consultation longue, voire très longue, de 30 à 45 minutes, car il s’agit d’expliquer au patient pourquoi il est peut-être souhaitable d’arrêter certains de ses traitements. C’est se poser la question des traitements à retirer et pour cela appeler les spécialistes. C’est aussi rechercher le retour de ceux qui connaissent la personne à son domicile, les infirmiers et les pharmaciens, qui sont les témoins de l’observance médicamenteuse.
La convention incite à la prescription de bilans partagés de médication. Était-ce le bon format ?
En quoi le bilan partagé de médication est-il intéressant ? Ce qui m’intéresse, c’est, à travers chaque ligne de médicament délivré, d’avoir un retour sur l’observance. Je n’attends pas d’informations sur les interactions médicamenteuses, je les ai déjà dans mon logiciel d’aide à la prescription. Après, si on veut aller plus loin et mettre en place des réunions pluriprofessionnelles, il y a la question de la faisabilité de réunir tout le monde autour d’un patient, y compris les médecins.
Retirer un ou plusieurs médicaments que le patient prenait depuis plusieurs années peut lui faire peur. Comment en parler avec le patient ?
Il y a plusieurs raisons de retirer des médicaments : les statines après un certain âge par exemple, une interaction médicamenteuse, les recommandations qui changent… Le cas des inhibiteurs de la pompe à protons (IPP) est caricatural. On s’alerte avec raison d’une surprescription mais c’est tellement efficace, les patients sont très réticents à l’arrêt du traitement. C’est la même chose avec les hypnotiques, les anxiolytiques, les antidépresseurs. C’est un échange qu’on doit avoir avec le patient. Il faut que le médecin prenne le temps d’expliquer, mais surtout pas sous l’angle économique dans une période où l’accès aux soins est difficile et où le reste à charge pour les patients est de plus en plus important. C’est long, il faut être vigilant, mais cette consultation met le pied dans la réflexion. C’est un sujet que les patients doivent aussi s’approprier.
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