Mise en ligne il y a près d'un mois sur le site « Change.org », la pétition du collectif national PASS/LAS, a déjà recueilli plus de 40 000 signatures. Les étudiants qui expérimentent pour la première fois les nouveaux parcours remplaçant la PACES, mais aussi leurs parents, tentent d'alerter les pouvoirs publics sur les lacunes de la réforme des études de santé.
« Manque de moyens », « inégalités entre les primants et les étudiants redoublants la PACES », « notes éliminatoires dans certaines universités et pas dans d'autres », « manque de considération pour les étudiants »… Les griefs exprimés par ce collectif sont nombreux. Camille Pierret, mère d'une étudiante inscrite en PASS (parcours accès santé), attend depuis de longues semaines que le ministère de l'Enseignement supérieur donne une réponse aux revendications du collectif PASS/LAS, dont elle est l'une des administratrices. « Près de 70 élus, dont des députés de la majorité, ont répondu favorablement à nos sollicitations, explique-t-elle en revanche. Une mission flash vient d'être lancée par la commission des affaires culturelles et de l'éducation de l'Assemblée nationale mais il faudra attendre au moins deux mois avant qu'un rapport ne sorte. Or nous avons besoin de solutions urgentes », réclame Camille Pierret.
Pour éviter que la première fournée d'étudiants en PASS et LAS (licence accès santé) ne soit « une génération sacrifiée », le collectif plaide pour une « année de tolérance », qui permettrait aux étudiants n'ayant pas réussi à accéder aux études de santé de redoubler leur année. Une possibilité exclue par la réforme, qui prévoit que ces étudiants puissent continuer leurs études dans d'autres filières en gardant une chance de se réorienter vers les études de santé un an plus tard. Le collectif appelle également les universités à augmenter leur capacité d’accueil d’au moins 33 % pour permettre à plus étudiants d'être admis en deuxième année. « Nous avons récemment appris que l'université de Nantes allait augmenter de 30 % le nombre de places pour les quatre filières de santé. À ce jour c'est la seule à avoir pris cette décision », regrette Camille Pierret. Alors que la fin de l'année universitaire s'annonce tendue, les étudiants des parcours PASS et LAS tentent tant bien que mal de réussir une année marquée du sceau de l'incertitude.
Une mineure à ne pas prendre à la légère
Thomas* souhaite se diriger vers des études de pharmacie et songe sérieusement à une carrière en officine. Alors que la PACES lui semblait trop sélective, la réforme l'a finalement convaincu de s'inscrire en PASS option biologie à l'université de Bordeaux. Malheureusement, il s'est peu à peu rendu compte qu'accéder à la filière pharmacie ne serait pas forcément plus simple qu'au temps de l'ancien système. « Au 1er semestre, pour que chaque UE soit validé, il fallait avoir plus de 10/20 dans chacune des matières. Si on ne valide pas tout, même avec une excellente moyenne, on ne peut pas continuer. » Pour de nombreux étudiants, c'est souvent la mineure, obligatoire avec le PASS, qui a posé problème. L'introduction de cette mineure ferait presque regretter l'ancien système à certains étudiants de première année. C'est le cas de Caroline, étudiante à Strasbourg. « Des membres de ma famille sont pharmaciens, j'ai souvent passé une partie de mes vacances en officine. Conseiller et rassurer les patients, ça m'a toujours plu et c'est ce que je veux faire plus tard, explique Caroline. La PACES ne m'aurait pas effrayé, on savait à quoi s'attendre. Là, on rajoute un deuxième programme, en plus de celui de santé, et on n'a pas le temps de se concentrer dessus, ce n'est pas gérable », estime-t-elle.
Si Caroline n'est pas très confiante quant à ses chances de passer en deuxième année, pour Thomas, les partiels du 1er semestre se sont plutôt bien passés, le jeune homme a pu valider toutes ses UE. « Cela se profile assez bien mais je ne sais absolument pas où je me situe par rapport aux autres étudiants au niveau de mes résultats car nous n'avons pas été classés. Je vais devoir attendre la fin de l'année universitaire pour savoir où j'en suis, déplore l'étudiant bordelais. Encore récemment, la fac nous a dit qu'il n'y aurait pas d'inégalité quant au nombre de places en deuxième année, que des places seraient peut-être débloquées, on attend de voir… ». S'il veut rester optimiste, Thomas ne peut s'empêcher, presque tous les jours, d'avoir cette réflexion. « Je me dis souvent que j'aurais peut-être mieux fait de prendre une année de césure et attendre l'an prochain pour m'inscrire en PASS. »
Une réflexion à mener sur le contenu des programmes
Vice-président de l'Association nationale des étudiants en pharmacie de France (ANEPF) en charge de l'enseignement supérieur, Adrien Cazes, a pu entendre de nombreux témoignages d'étudiants confrontés à la difficile mise en œuvre de la réforme des études de santé. « Nous avons beaucoup de retours sur la question de la charge de travail, en particulier avec le PASS, à cause de la mineure. Cependant, il ne faut pas oublier l'intérêt de cette mineure, elle permet de poursuivre ces études en cas d'échec, rappelle Adrien Cazes. Les premières années d'aujourd'hui n'en ont pas forcément conscience, et on ne peut leur reprocher, mais pour les étudiants de PACES qui échouaient au concours deux ou trois fois, se réorienter était très difficile ensuite parce qu'il n'avait pas de passerelles vers d'autres études, explique Adrien Cazes. Après, il y a une vraie réflexion à mener sur le contenu des programmes. L'ANEPF pousse en ce sens et on peut envisager des améliorations de ce côté-là ».
Certaines demandes du collectif PASS/LAS lui semblent en revanche impossibles à accepter. « J'entends certaines de leurs revendications, je les comprends même. Mais est-ce que les universités peuvent vraiment augmenter leur capacité d'accueil ? Je ne saurais le dire. Toutes ont fait des efforts pour porter ce nombre au maximum possible même si j'entends bien que cela peut sembler insuffisant, admet Adrien Cazes. Autoriser le redoublement, je ne vois pas comment cela pourrait être accepté, il faut aussi penser à ceux qui vont arriver après. Augmenter les capacités d'accueil au point de quasiment accepter des promotions entières, cela ne me semble pas envisageable non plus », estime-t-il.
* Les prénoms ont été modifiés.
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