Les adjoints en pharmacie sont des salariés qui ne négligent pas leur formation. Pour Philippe Denry, « plus de 50 % des adjoints se forment, en général sur des sessions d’une à deux journées par an, et certains adjoints font deux ou 3 formations dans l’année ».
Selon les données d’Actalians (organisme paritaire collecteur agréé des professions libérales, des établissements de l’hospitalisation privée et de l’enseignement privé), les organismes de formation ont accueilli 20 062 stagiaires pharmaciens adjoints en 2016, certains adjoints ayant suivi plusieurs formations dans l’année. Rappellons que la profession compte 27 886 inscrits en section D.
Plusieurs types de formations
Dans le détail, plus de 55 % des stagiaires adjoints se sont orientés vers des formations cœur de métier (médicament, pathologies), 12 % d’entre eux ont choisi des formations non liées au médicament, 5,4 % des formations transverses (bureautique, management, langues), 2,2 % des formations diplômantes et 3,5 % des formations autres. Les formations peuvent être réalisées en présentiel ou à distance (e-learning, visioconférence) : 21,8 % des stagiaires ont choisi ces formations ouvertes et à distance.
Selon ces chiffres, on constate que les adjoints s’orientent plus volontiers vers les formations cœur de métier. Ces dernières permettent de mettre à jour les connaissances dans des pathologies et le médicament et bon nombre d’entre elles rentrent dans les clous du DPC, ce qui peut venir rassurer quant à la bonne réalisation de son obligation de formation.
Ensuite, les adjoints optent parfois pour une formation les destinant à se spécialiser dans un domaine précis : l’aromathérapie, la micronutrition, le maintien à domicile, la pharmacie vétérinaire. Ces formations seront un atout de plus pour pérenniser son poste ou évoluer dans ses fonctions. « Mais depuis 2012, on observe qu’elles attirent plus les préparateurs que les adjoints qui, eux, se recentrent sur les formations cœur de métier… les nouvelles missions du pharmacien sont passées par là ! », rapporte Pierre-Xavier Frank, directeur de l’école de formation Qualipharm.
Enfin, plus rarement, les adjoints s’orientent vers des formations à la gestion de l’entreprise : management, gestion des achats, etc. Certains envisagent de s’installer. D’autres se voient confier par le titulaire la gestion des équipes, des achats ou la comptabilité.
Obligation triennale
Si les adjoints se forment assez bien, une tendance à la baisse se dessine toutefois. À l’origine de l’infléchissement : l’obligation de DPC, instaurée en 2013, est devenue triennale au lieu d’annuelle depuis le 1er janvier 2017. Cette mesure, annoncée en décembre 2015 dans un arrêté, a eu des effets immédiats : les organismes de formation ont ressenti dès 2016 une nette diminution du taux de participation des pharmaciens aux formations. « Nous avons connu un recul de la fréquentation de nos stages entre 2015 et 2016/2017, et aujourd’hui certaines formations sont annulées faute de participants », déplore Pierre-Xavier Frank. L'effet inverse est à prévoir en 2019 : on peut s’attendre à une ruée sur les actions DPC, dans l’objectif de remplir son obligation triennale. Quant aux organismes qui dispensent la formation continue en e-learning, ils constatent également « une baisse de consommation des actions DPC, mais une augmentation de la formation continue », explique Marie-Hélène Gauthey, directrice associée d’Atoopharm.
L’obligation triennale a eu des répercussions sur la motivation des adjoints à se former, mais aussi sur l’attitude des titulaires : certains d'entre eux estiment que dans un contexte de travail en flux tendu, il est difficile de se séparer d’un adjoint, ne serait-ce qu’une journée par an. Et avec l’obligation désormais triennale, nul besoin de se former chaque année !
Ce raisonnement n’est cependant pas judicieux, pour le salarié comme pour l’entreprise. En effet, « le but de la formation n’est pas de remplir un papier, mais de conforter ses compétences, d’en acquérir des complémentaires pour avoir un niveau répondant aux attentes du patient », insiste Alain Guilleminot, président de l’UTIP. En outre, elle est bénéfique non seulement à l’adjoint, mais aussi à toute l’équipe officinale et à l’officine, qui pourra développer de nouveaux secteurs ou de nouvelles compétences.
« Il faut faire une formation qui a du sens, qui permette de mettre à jour et d’améliorer ses compétences. Aujourd’hui, les sujets abordés à l’officine sont plus complexes, plus techniques, les médicaments et les pathologies demandent des connaissances précises et pointues, on ne peut pas faire l’impasse de la formation. Comme un sportif, le pharmacien doit se former régulièrement, bien au-delà de l’obligation triennale », martèle Jérôme Parésys-Barbier, président de la section D de l’Ordre national des pharmaciens.
De fait, s’il est obligatoire de réaliser une formation DPC tous les trois ans, rien n’empêche d’en faire plus. D’autant plus qu’Actalians ne fixe pas d’enveloppe limite par apprenant : chaque adjoint peut donc réaliser plusieurs formations, DPC ou non DPC, en demi-journée ou journée, en e-learning ou présentiel… qui seront prises en charge. Actalians octroie également des dédommagements des frais : indemnisation de remplacement pour le titulaire, frais de repas, de nuitée, frais kilométriques pour l’adjoint… Enfin, bon nombre des organismes de formation sont en conventionnement avec Actalians, ce qui allège les pharmaciens de toutes les démarches administratives et des frais à avancer.
Avoir un plan de formation
Certaines officines ont bien compris l’importance d’avoir une équipe officinale bien formée et mettent en place des plans de formation que peuvent accompagner les différents organismes. « Ainsi, l’équipe officinale peut se former plusieurs fois par an en fonction de la stratégie de formation implantée dans l’officine. Cela renforce la motivation et la cohésion de l’équipe », évoque Kathleen Prome-Ressian-Buttner, responsable d’OCP Formation.
Un tel plan de formation est mis en place à l’officine dans laquelle travaille Marie-Pierre Lefebvre, adjointe à Tourville-la-Rivière (Seine-Maritime). « Chaque mois, trois thèmes de formation sont mis au tableau de la pharmacie. Ce mois-ci, c’était le diabète, les maux de gorge et la maladie de Parkinson, avance Marie-Pierre. Chaque membre de l’équipe officinale peut accéder à la plateforme d’Atoopharm et se former en e-learning à son rythme, en 1 heure ou 1 h 30, avec autoévaluation à la fin de chaque formation. Cela nous permet de gagner en efficacité et en confiance au comptoir, et de mieux répondre aux questions des patients. »
Élise Brossard, adjointe à Irigny (Rhône), se forme en général deux fois par an sur une journée de travail en présentiel. « Avec la titulaire, nous discutons des thèmes des formations qui intéressent l’officine, évoque Élise Brossard. Ainsi, j’ai notamment suivi avec Qualipharm une formation sur l’accompagnement à l’allaitement maternel, les maladies neurodégénératives, l’asthme, le diabète… Et aussi sur la vaccination antigrippale, étant donné que nous sommes situés dans une région qui expérimente la vaccination à l’officine. »
Quant à Carole Debost, adjointe à Devecey (Doubs), elle participe tous les deux mois environ à des soirées de l'UTIP et fait chaque année une action DPC, en accord avec sa titulaire. Pour elle, la formation est « un moyen de se tenir au courant de ce qui se passe dans le monde de la santé, et de partager des expériences entre confrères. Cela permet aussi de gagner la confiance des patients et des autres professionnels de santé en affichant ses compétences et en montrant que l’on peut travailler ensemble. Et d’être ainsi considérés comme des professionnels de santé à part entière ».
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