Pour Jérôme Sicard, installé à Châlons-en-Champagne, les pharmaciens français sont « en pointe » dans ce domaine, à l’image du protocole sur les anticancéreux oraux qui permet, en trois séances, d’accompagner le patient lors de l’initiation du traitement, puis d’aborder sa vie quotidienne et les effets secondaires et enfin son observance.
Les pharmaciens commenceront à les proposer début 2021, pour une rémunération annuelle de 60 ou 80 euros, établie selon la durée prévue du traitement. En Lorraine, deux autres protocoles expérimentaux élaborés conjointement par les officinaux et les pharmaciens hospitaliers sont en attente d’acceptation. « Picto » et « Ako@dom », ce dernier en coopération avec les infirmiers libéraux, organisent des parcours et des entretiens adaptés aux différents groupes de patients sous ACO, et incluent une formation à l’accompagnement thérapeutique. En outre, parmi d’autres projets locaux, l’étude « Offinut » menée par les pharmaciens du CHU de Reims, recherche les meilleures méthodes pour associer les hospitaliers et les officinaux à la prévention de la dénutrition des patients cancéreux.
Pourtant, constataient Bernard Charles et Jessica Forgac, au nom des Laboratoires Pierre Fabre et Avène, trop de pharmaciens hésitent encore à franchir le pas de l’oncologie et ressentent une forme de « blocage psychologique ». Pour y remédier, le groupe Pierre Fabre a publié un « Oncoguide » qui s’attache en 7 chapitres très concrets à répondre aux questions des pharmaciens. Jérôme Sicard incite d’autant plus ses confrères à se lancer dans les entretiens oncologiques que ces derniers ont, pour les patients, une valeur ajoutée bien supérieure à celle des autres entretiens existants. En outre, « même s’il est souhaitable que les pharmaciens soient formés », il estime qu’il n’est pas nécessaire d’être un grand spécialiste en oncologie pour les proposer, et appelle les pharmaciens à « dédramatiser l’image qu’ils se font de ces entretiens ».
Exercice coordonné
Mais les nouvelles compétences en oncologie ne suffiront pas, seules, à renforcer la place des pharmaciens dans ce domaine : il leur faut aussi consolider leur position dans le cadre de l’exercice coordonné, a souligné le président de l’URPS pharmaciens du Grand Est, Christophe Wilcke. Plusieurs nouveaux outils se mettent actuellement en place au niveau des territoires, à l’image des Communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS), structures toutefois longues à concrétiser. Reste à savoir si les étudiants en santé, potards ou carabins, sont suffisamment initiés à l’exercice pluri professionnel : à Nancy, les étudiants de 6e année y sont sensibilisés, mais ce n’est pas forcément le cas partout.
Comme le concluait François Martial, président de l’URPS-pharmaciens Nouvelle Aquitaine et de la Conférence nationale, « les URPS des différentes professions sont justement là pour encourager ces formes de collaboration, qui nous permettent aussi de découvrir les richesses des autres métiers, autour du patient et pour son bien-être ».