Bien que les oppositions fassent de son « absence » un argument de campagne, il a fait le 2 mars un discours télévisé uniquement consacré à l'Ukraine et il a annulé un meeting qui devait avoir lieu le 5 mars. La question se pose : est-il possible qu'il se contente d'être candidat en remplaçant sa campagne par son activité diplomatique ? Il n'y a rien, en droit, qui l'en empêche. Mais il doit compter avec une irritation, un agacement, une colère de plus en plus intenses chez ses dix adversaires qui veulent en découdre et le somment de participer à des débats télévisés.
L'idée que, à la télévision, il puisse être opposé à dix rivaux qui n'ont en commun que le ressentiment qu'il leur inspire, a tout de même quelque chose d'injuste. Il ne devrait pas vouloir s'exposer de la sorte et tentera d'obtenir un débat au second tour avec celui ou celle qui aura franchi le cap du premier. On se doute bien que les autres candidats ne l'entendront pas de cette oreille, leur seul espoir étant de gagner en popularité à la faveur d'un duel avec le président sortant.
Dans le domaine de la communication des candidats, la Constitution ne prévoit rien de coercitif. Il serait surprenant que le président de la République qui, s'il avait été aussi sage que ses conseillers, n'aurait pas fait à ce jour la moitié de ce qu'il a accompli, accepte les conditions que l'opposition veut lui imposer. En revanche, il ne saurait disparaître de la scène nationale, s'il veut toujours obtenir un second quinquennat. À supposer qu'il n'ait pas envie de dresser un bilan de sa présidence, il lui suffirait de donner aux Français des informations sur son action concernant l'Ukraine.
Droite et gauche laminées
Droite et gauche ne s'en contenteront pas, qui exigent, au nom d'on ne sait quel règlement, un vaste débat sur ce qu'il a pu faire de bien et de moins bien. Il sera toujours temps de mettre fin à ces enfantillages. La vérité, telle qu'elle est inscrite dans des enquêtes d'opinion qui montrent une avance de M. Macron sans doute impossible à rattraper, est que 2022 a sonné le glas à la fois de la droite et de la gauche. Valérie Pécresse, en effet, n'est plus en mesure de défier le président sortant. Elle est au cinquième rang des candidats et il est probable que seule Marine Le Pen arrivera au second tour. Si la droite classique est défaite, il lui faudra des années pour retrouver un peu de santé et surtout préparer la présidentielle de 2027, qui ne sera pas non plus pour elle une partie de plaisir, dès lors que l'ancien Premier ministre, Édouard Philippe, entend bien prendre le relais des mains de Macron.
La gauche, elle, est dévastée. Pour l'honneur, Anne Hidalgo, a tenu à rester jusqu'au bout, ce qui lui vaudra un score désastreux. Christiane Taubira, qui croyait que, à la faveur de la panique à gauche, elle allait rassembler toutes les forces de gauche, constate qu'elle va faire moins de 2 %. Seul Jean-Luc Mélenchon dépassera les 10 %, mais sans pouvoir se qualifier pour le second tour. Le terrible constat national sera que le score des extrêmes, de droite ou de gauche, marquera la scrutin présidentiel et qu'une seule force, celles des centristes associés à la République en marche et à Macron, empêchera une dérive extrémiste qui nous coûterait très cher.
La guerre faite à l'Ukraine est un énorme gémissement de l'Histoire. C'est un événement qui fait pâlir nos questions nationales. Mais c'est aussi une occasion de démontrer ce qui arrive à l'Europe quand elle est désunie, quand elle a peur de son ombre, quand elle assiste sans réagir à la confiscation pure et simple d'un pays libre. Tout en réaffirmant notre solidarité avec le peuple urkrainien, nous n'avons pas d'autre choix que de nous armer contre une puissance soudain devenue maléfique et qui ne nous fera pas de quartier si nous manquons de fermeté.