Les données commencent à s'accumuler pour les variants sud-africain et britannique. En France, ce dernier (appelé VOC 202012/01 ou B.1.1.7) pourrait être le variant dominant d'ici à trois mois, d'après Santé publique France.
« Il est important de comprendre l'impact fonctionnel de ces virus porteurs de ces mutations. Certains concernent le site de fixation au récepteur ACE2 et des travaux indiquent que ces mutations conduisent à une meilleure affinité entre le virus et les cellules humaines », indique Sylvie van Der Werf, responsable du Centre national de référence des virus respiratoires de l'Institut Pasteur.
Efficacité vaccinale probable contre le variant britannique
Concernant le variant détecté au Royaume-Uni, les données sont plutôt rassurantes en termes d'efficacité vaccinale : elles semblent confirmer que ce variant serait réceptif au vaccin de Pfizer/BioNTech. Selon deux études distinctes (non revues par les pairs), l'une menée par des chercheurs de Pfizer/BioNTech, l'autre par des chercheurs d'universités britanniques et néerlandaises, les anticorps de personnes guéries du Covid-19 permettent de neutraliser le variant anglais, même si cette capacité peut être légèrement réduite. « Nos résultats suggèrent que la majorité des réponses vaccinales devraient être efficaces contre le variant B.1.1.7 », estiment les chercheurs britanniques et néerlandais.
Une des mutations identifiées dans le variant anglais, située dans le gène de la protéine Spike du virus (N501Y), a aussi été retrouvée au niveau des variants sud-africain et brésilien. Les premiers éléments montrent une efficacité du vaccin BioNTech/Pfizer contre cette dernière. En revanche, une autre mutation de la protéine Spike, retrouvée au niveau des variants sud-africain et brésilien, inquiète. Des tests en laboratoire ont montré que cette mutation E484K semblait capable de diminuer la reconnaissance du virus par les anticorps, et donc sa neutralisation.
Un risque de réinfection possible
Ainsi, concernant le variant 501Y.V2 identifié en Afrique du Sud, de nouveaux travaux tendent à montrer que les vaccins disponibles ne sont pas totalement efficaces. Dans une étude non revue par les pairs, des chercheurs sud-africains concluent que le variant « est largement résistant aux anticorps neutralisants provoqués en réponse à une infection par des souches en circulation précédemment ». Les données suggèrent que « la plupart des individus infectés avec des souches précédentes du SARS-CoV-2 auront une réponse de neutralisation minimale ou non détectable contre le variant 501Y.V2 », poursuivent-ils.
Le risque de réinfection par ce variant semble de fait « important », d'après cette étude. Et ces données ont des implications concernant l'efficacité vaccinale, alors que les vaccins actuels sont principalement basés sur une réponse immunitaire à la protéine Spike.
« C'est un problème qui inquiétait beaucoup d'entre nous : que des nouveaux variants du SARS-CoV-2 échappent à la réponse immunitaire en plus de leur plus grande transmissibilité », commente Kristian Andersen, immunologiste à l'institut de recherche Scripps. Néanmoins, nuance Sylvie van Der Werf, « il est extrêmement peu vraisemblable, compte tenu de la variabilité de la réponse immunitaire acquise par la vaccination, que l'on ait un échappement total à cette réponse immunitaire ».
Pour tenter de contrer ces menaces, les auteurs de l'étude appellent à identifier de nouvelles cibles vaccinales moins sujettes aux mutations que la protéine Spike et à développer de façon urgente des plateformes destinées à adapter les vaccins.
Des vaccins ARNm rapidement adaptables
Les vaccins à ARNm de Pfizer/BioNTech et de Moderna, les deux autorisés à ce jour en France, permettent a priori une adaptation relativement rapide. Le laboratoire allemand BioNTech a d'ailleurs assuré être en mesure de produire, si besoin, un vaccin contre de nouveaux variants en six semaines. « Un des avantages des vaccins ARN est qu'il est facile de remplacer l'ARN des souches plus anciennes de virus par de nouvelles séquences, voire plusieurs séquences, correspondant aux nouveaux variants », en atteste Sylvie van Der Werf.
Et la virologue de poursuivre : « Les anticorps ne font pas tout ! Il nous faut encore savoir si la réponse cellulaire est aussi affectée. Cela nécessitera d'isoler des lymphocytes de personnes vaccinées ou déjà infectées dans le passé, ainsi que des expérimentations chez l'animal qui ne sont pas évidentes à mettre en place. »
Avec l'AFP