* Ante Tomic est un journaliste, scénariste et écrivain croate que l’on a découvert l’année dernière avec « Miracle à la tombe des Aspics ». On retrouve dans « Qu’est-ce qu’un homme sans moustache ? », son premier roman publié en 2000, son univers de personnages hauts en couleurs, dans un village de l’arrière-pays dalmate au lendemain de la guerre d’indépendance de 1991-1995 : une veuve joyeuse, un prêtre alcoolique, un général de l’armée, un émigré ayant fait fortune en Allemagne, un poète auteur de haïkus, un ministre de la Défense… Une population bigarrée mais quelque peu dépassée, dont l’auteur se moque avec drôlerie et gentillesse. (Noir sur Blanc, 192 p., 21 €)
* C’est dans une bourgade d’Irlande du Nord, son pays, que nous transporte Michelle Gallen dans un premier livre enjoué, pour décrire le sombre quotidien de Majella, qui, à 27 ans, habite toujours chez sa mère alcoolique et travaille dans une baraque à frites. Son roman a pour titre « Ce que Majella n’aimait pas » – une liste qui se résume à deux mots, « les autres », tandis que le premier des dix trucs qu’elle trouve intéressant est « manger » ! Il nous plonge avec lucidité dans la monotonie morbide d’une vie engluée dans la graisse, racontée avec esprit et un verbe argotique. (Joëlle Losfeld, 342 p., 24 €)
* Idéale pour les amateurs de comédie, d’histoire et de polar, « le Rideau déchiré » est la deuxième enquête de Zofia Turbotyska, la Miss Marple à la polonaise découverte dans « Madame Mohr a disparu ». À la veille des festivités de Pâques, en 1895, une femme de chambre est retrouvée violée et poignardée. Faisant fi des convenances et de ses préjugés, la grande bourgeoise n’hésite pas à descendre dans les bas-fonds de Cracovie pour démêler une histoire tordue d’amour et de tromperie. Un « cosy-crime » revisité avec humour par le duo d’auteurs qui signe Maryla Szymiczkowa. (Agullo, 388 p., 22,50 €)
* Après « Queenie », salué et récompensé, l’Anglaise Candice Carty-Williams conforte son coup d’essai avec les aventures tragi-comiques d’une famille recomposée dans les quartiers sud de Londres, « les Pennington s’en sortent tout seuls ». Les cinq enfants, de quatre femmes différentes, de Cyril Pennington, n’ont rien en commun et ils ne se sont rencontrés qu’une fois dans leur enfance. Mais lorsque l’une d’entre eux, influenceuse branchée, a des ennuis, elle n’a d’autre choix que de faire appel à la fratrie désunie. Une approche sociétale à la fois drôle et touchante, à travers un échantillonnage choisi de personnalités. (Calmann-Lévy, 310 p., 20,90 €)
* Séraphine est une jeune femme qui a tout pour être heureuse, avec un mari amoureux, une adorable petite fille et un travail épanouissant sans être trop prenant. Mais « Séraphine ne sait pas nager ». Pourquoi ? Après avoir réussi à garder son secret en se cachant derrière de faux alibis, le jour est arrivé de dévoiler le mensonge qui depuis tant d’années l’a contrainte à des mises en scène pas possibles. Un seul mensonge mais qui risque de signer la fin de son bonheur. À moins que… Une charmante histoire pas si banale, distillée par Anne-Lise Brochard avec une fausse légèreté. (Plon, 260 p., 20 €)
* Le poker était l’une des passions du poète et journaliste britannique Al Alvarez (1929-2019). Envoyé en 1981 par « The New Yorker » au championnat mondial de poker, les fameuses WSOP (World Series of Poker), il en est revenu avec un livre culte, traduit quarante ans après en français, « le Plus Gros Jeu ». Sa chronique épingle avec autant d’humour et de finesse Las Vegas, alors l’une des villes les plus extravagantes des États-Unis, que les joueurs amateurs et l’élite du poker professionnel. Des portraits étonnants et une réflexion sur le hasard et le risque, sur l’argent et le capitalisme. (Métailié, 198 p., 20 €)
* « Esthétique de la trahison » : un beau titre pour les sales manigances pré-électorales exposées par Stéphane Juvigny, qui doit savoir de quoi il parle parce qu’il a, nous dit-on, exercé dans des cabinets ministériels. Mais il s’agit d’un simple roman, qui raconte une campagne présidentielle où, sans surprise, certains veulent le pouvoir et d’autres le conserver. Des candidats les plus probables aux multiples intervenants des différents strates, tous les coups sont permis dans cette guéguerre pour arriver au sommet. Personnages hauts en couleurs et comportements hautement répréhensibles font le bonheur du lecteur. Toute ressemblance… (Fayard, 430 p., 21,90 €)