La crise est désespérante, d'autant qu'elle succède aux gilets jaunes, à la pandémie et à la réforme des retraites. Mais l'opportunité est offerte aux pouvoirs publics de concevoir et proposer un grand plan pour les quartiers dits sensibles. Au moins les gosses hystériques qui ont pillé, cassé, menacé des vies humaines ne pourront plus dire qu'ils ne peuvent que se révolter. Il s'agit certes d'une affaire de type social, mais ses conséquences politiques sont considérables. Dans un premier temps, elle a peut-être nui à la stature du chef de l'État, mais sur un temps plus long, elle lui accorde la possibilité de finir son second en beauté si toutefois il consent à en faire une priorité.
Saisir l'occasion
C'en est une et, jusqu'à présent, il n'a pas perdu son sang-froid. On n'en est pas surpris car on sait qu'il aime les défis ; et il est assez intelligent pour se convaincre qu'avec le tout-répression, il échouera. Dans cette affaire, les partis politiques avaient hâte de dire au président la conduite à tenir. La gauche mélenchoniste voit les émeutiers comme des victimes, la droite et l'extrême droite les considèrent comme des individus dangereux qui plongent le pays dans le chaos. Ce n'est pas faux, mais c'est une analyse incomplète. Il faut regarder au-delà de l'été. Les partis, eux, ne perçoivent que l'immédiat et tentent d'occuper tout l'espace politique. On est étonné de voir qu'ils n'ont pas changé depuis six ans, qu'ils prônent chacun ses propres idées et qu'ils sont tous au même étiage de popularité.
Un sondage pour "Le Monde" montre que la France insoumise, certainement le mouvement le plus tonitruant de la Terre, ne réunira pas, dans tous les cas de figure (au sein de la Nupes ou hors de la Nupes) plus de 9 à 10 % des voix. Dix pour cent et ils font du bruit pour 100 ! De la même manière, le score des Républicains est, au mieux, de dix pour cent alors que Renaissance et ses alliés (le mouvement macroniste) réunit 24 pour cent des suffrages tandis que le RN en obtient jusqu'à 25 %. Tous ces scores sont identiques à ceux des précédentes élections européennes ! Ce n'était pas la peine de s'étriper pendant si longtemps pour faire du surplace. Les seuls qui continuent à progresser, ce sont les amis de Mme Le Pen. "Le Monde" parle de tripartition, mais non : la France est divisée en deux camps, pas en trois.
Comme il est clair que la pandémie, les gilets jaunes et la retraites n'ont pas influé sur l'humeur de nos concitoyens, il y a tout lieu de penser que la crise des banlieues n'influencera pas les élections européennes. Sauf si le pouvoir comprend l'occasion historique de faire une surprise agréable au pays en réussissant à apaiser la colère des jeunes. Les promoteurs de l'état d'urgence s'en mordront les doigts quand ils commenceront à perdre des suffrages. Pour les élections européennes, les jeux sont faits pour tous, sauf pour la macronie et le Rassemblement national. En l'état actuel, le RN arrive en tête, Renaissance en deuxième. Elles auront lieu dans un an. Il s'en passera, des choses.
PS. Ceci est ma dernière chronique dans "le Quotidien", après 36 années de présence. Je remercie chaleureusement ceux qui ont eu la patience de me lire. R. L.