LA LIBERTÉ effective de choisir ses professionnels de santé est le résultat d’une difficile conquête sociale propre à la France. C’est une noblesse et une force pour les pharmaciens d’appartenir à ce cercle de professionnels librement choisis par le patient, car cette liberté contribue à maintenir la qualité du service pharmaceutique et consacre notre expertise. Nous connaissons tous l’attachement de nos concitoyens à cette liberté de choix qu’ils considèrent à juste titre comme un de leurs droits fondamentaux. Aussi est-ce avec beaucoup d’étonnement que j’ai découvert dans « le Quotidien »*, la proposition de l’APR d’imposer une « officine dédiée de proximité » à tout patient résidant dans une zone dépourvue de médecin.
Cette proposition peut paraître louable pour sauvegarder les pharmacies rurales en danger. Mais elle conduit à une rupture d’égalité des citoyens et des pharmaciens devant la loi : certains patients seraient attachés à une pharmacie et d’autres seraient libres, certains pharmaciens auraient une patientèle garantie et d’autres pas.
On ne peut d’ailleurs pas comparer la proposition APR avec la réglementation relative au médecin traitant comme il est dit dans l’article. Car le patient reste libre de choisir son médecin et rien n’impose qu’il soit au plus près du lieu de résidence.
Je ne m’étendrai pas sur les difficultés pratiques de la mise en application de cette proposition qui modulerait les droits des personnes en fonction d’un zonage géographique alors que la quasi-totalité de nos actes est réalisée en tiers payant, et au moyen de la carte Vitale… qui ne comporte pas l’adresse du patient. De plus, il est hasardeux de penser, comme il est avancé dans l’article, que des élus locaux viendront longtemps soutenir une proposition visant à priver leurs administrés d’un droit fondamental, apprécié et reconnu.
Pour toutes ces raisons on ne voit donc pas comment la proposition de l’APR pourrait un jour aboutir. Sauf, à l’extrême rigueur, dans une forme similaire à celle de la réglementation du médecin traitant, c’est-à-dire en laissant le patient choisir son « pharmacien dédié ».
Mais attention, en rendant sa liberté au déclarant, cette formule fera encore des pharmacies rurales et de quartiers les grandes perdantes car, au moment de déclarer son choix, ce sera souvent une personne valide et non malade qui s’exprimera. La notion de proximité sera donc, pour le déclarant, celle des habitudes de consommation, et non le strict voisinage, ce qui risque de figer la configuration au détriment des pharmacies qu’on voulait protéger !
Restreindre la liberté de choix des patients est une tentation technocratique immémoriale, toujours prête à ressurgir et à s’immiscer sous tous les prétextes. Ne lui ouvrons pas nous-mêmes la porte… tout en nous cassant la jambe.
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