C’EST CHRISTINE LAGARDE qui, lundi dernier, a mis le feu aux podres en contestant un système allemand fondé sur la rigueur et les exportations. Elle reproche à l’Allemagne de miser sur ses ventes à l’étranger par une politique de bas salaires qui augmente la compétitivité des produits allemands. Ce qui lui a permis d’accumuler des excédents commerciaux considérables au détriment de ses principaux partenaires, la France en particulier. Notre ministre de l’Économie pensait surtout à nos propres difficultés, mais son propos concernait aussi le sort que l’Union doit réserver à la Grèce. Les Allemands sont las de l’indiscipline qui règne en France, en Italie, en Espagne, au Portugal, en France et en Irlande. Ils ne veulent pas, estime-t-on à Paris, sauver la Grèce mais l’exclure de l’Union. Ils exigent que tôt ou tard les pays membres de l’UE respectent les critères de Maastricht, avec une inflation contenue, un déficit budgétaire contenu à 3 % du PIB ou moins, une dette égale ou inférieure à 60 % du PIB. Inutile de dire que la crise a balayé ces critères, même en Allemagne. Celle-ci, cependant, rentrera la première dans le rang parce qu’elle a sacrifie, un peu comme la Chine, la consommation intérieure aux exportations.
Angela Merkel a reçu le commentaire de Mme Lagarde comme une insulte à la vertu. Ce sont en effet les exportations allemandes qui assurent la solidité de l’euro. Si la monnaie unique n’existait pas, l’Allemagne aurait d’énormes excédents et ses partenaires seraient privés de réserves en devises. Il n’est pas facile, pour un pays, de soutenir la croissance par les ventes à l’étranger plutôt que par les ventes sur le marché intérieur. Une économie fondée sur la consommation nationale se traduit par un déséquilibre de la balance commerciale. La Chine, par exemple, est décidée à créer des systèmes de protection sociale (assurance-maladie et retraite), ce qui autoriserait les épargnants chinois à dépenser plus pour leur consommation. Si la consommation française est forte, c’est parce que ces systèmes sociaux existent en France. Tout en réformant sa protection sociale pour qu’elle coûte moins cher, l’Allemagne a favorisé les exportations par une politique de bas salaires. La compétitivité d’un pays se mesure à l’aune de son austérité.
Un pays performant inclus dans ce grand ensemble qu’est l’Union européenne est forcément agacé par des partenaires, comme la Grèce, qui ont truqué leurs statistiques pour entrer dans la zone euro, et ont ensuite réclamé l’aide financière de l’UE pour échapper à la faillite. Il n’empêche que si les Allemands veulent continuer à vendre leurs produits à leurs partenaires commerciaux, ils doivent contribuer à leur bonne santé. En réalité, si tous les membres de l’Union adoptaient le système allemand, la supériorité commerciale allemande finirait par disparaître.
Ne pas sous-estimer la crise.
Angela Merkel refuse donc d’aider la Grèce en espèces sonnantes et trébuchantes ; elle refuse de créer un FME, Fonds monétaire européen, qui aurait pour tâche d’aider les pays membres défaillants et elle envisage sereinement d’exclure de la zone euro les pays qui sont incapables de respecter durablement les critères de Maastricht. Cela revient à sous-estimer l’impact de la crise qui sera plus longue que ce que l’on dit et, même si on est en droit de contester la légitimité de la présence de la Grèce dans la zone euro, on ne peut pas croire que l’Europe se relèvera de la récession aussi vite que l’Allemagne. Mme Merkel sait en outre que sa politique de rigueur irrite la classe moyenne dans son pays et que, si elle ne l’atténue pas, elle devra faire face, comme partout ailleurs, à une vive agitation populaire. Christine Lagarde n’a pas manqué de témérité en s’attaquant à une sacro-sainte qualité allemande, cette forme d’ascèse au service de la puissance économique. L’Allemagne est le seul pays européen qui ait mis au point une riposte efficace à la concurrence chinoise et aux divers dangers de la mondialisation. Elle doit son succès à un dialogue gouvernement-syndicats de très bonne qualité. Mais elle a touché ses limites. La chancelière doit relâcher son emprise sur les salaires, ne serait-ce que parce que le niveau de vie de l’ancienne RDA est largement inférieur à celui de l’ancienne RFA. Il demeure que personne n’a le droit d’ignorer la leçon administrée par l’Allemagne : pourquoi la France possède-t-elle un système social affreusement déficitaire qui ne réduit pas les inégalités entre ses bénéficiaires ? Parce que, à ce jour, sa compétitivité est insuffisante.
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