LES OFFICINAUX attendent beaucoup de la loi HPST. En particulier de son article 38 qui donne enfin un cadre précis au champ de compétence du pharmacien. « C’est novateur, car le code de la Santé publique a été modifié pour cela, mais ce n’est pas extrêmement révolutionnaire dans le sens où de nombreuses missions inscrites dans la loi sont déjà effectuées par les pharmaciens », souligne la députée socialiste et titulaire à Toulouse, Catherine Lemorton. Et celle-ci met en garde ses confrères contre l’image qu’ils renvoient dans la population. À ses yeux, de nombreux officinaux ne remplissent pas au mieux les missions qui leur sont déjà confiées. Et la députée de critiquer la délivrance inégale de la pilule du lendemain au sein du réseau. Elle rappelle également les conclusions de l’enquête de l’UFC-Que choisir montrant que seulement 14 % des confrères faisaient correctement leur travail. « Je veux bien continuer à vous défendre à l’Assemblée nationale, mais je ne veux pas faire du corporatisme à tout prix, lance la parlementaire. Vous devez comprendre que les politiques montrent une défiance à l’égard de notre profession. »
Le président du conseil central A de l’Ordre (titulaires), Jean-Charles Tellier, dit partager en partie l’avis de Catherine Lemorton. Pour lui, ce tableau un peu sombre s’explique notamment par un problème dans la formation des pharmaciens. « Il y a de moins en moins de pharmaciens enseignants dans les facultés », regrette-t-il. Toutefois, pour le président du conseil central A, il y aura un avant et un après la loi HPST. Car ce texte incitera a davantage de qualité et fera du pharmacien « homme du médicament », un « homme de santé ».
Pour un véritable parcours de soins.
Stéphane Pichon, président du Conseil de l’Ordre de la région PACA Corse, apprécie moins les propos de Catherine Lemorton. « Nous disposons d’un réseau d’officines exceptionnel en France », insiste l’ordinal. « La formation est bonne mais il faut apprendre à mieux communiquer avec le patient », poursuit-il.
« J’entends les critiques de Mme Lemorton, mais nous sommes une profession beaucoup plus exposée que les autres », se défend pour sa part Gilles Bonnefond, président délégué de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO). « L’enquête de l’UFC-Que choisir est une alerte, reconnaît-il cependant. N’entrons pas dans le jeu de la consommation et organisons un véritable parcours de soins. »
Philippe Besset, président de la commission économie de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF), estime, lui, que la profession a su répondre présent à chaque fois qu’elle a été sollicitée. Par exemple, « l’arrivée en officine de médicaments issus de la réserve hospitalière a amélioré les conditions de prise de ces produits par les patients », affirme-t-il.
Du côté des groupements, des initiatives pour améliorer la dispensation ont déjà été prises, rappelle le président du Collectif, Pascal Louis. Fiches pour accompagner la délivrance d’ibuprofène, clients mystères, opérations de dépistages (dysfonctionnement rénal) ou d’observance (antalgiques oraux et contention veineuse) ont ainsi été mis en place. Sans oublier le contrat avec l’assureur Allianz prévoyant notamment la rémunération de l’acte de conseil à hauteur de 5 euros. Un partenariat qui fait bondir Catherine Lemorton. « En signant ce type de contrat avec des assureurs, vous participez à cette médecine à deux vitesses que je dénonce tous les jours », s’emporte la députée socialiste.
Des missions rémunérées.
Quoi qu’il en soit, tout le monde semble d’accord sur un point : les nouvelles missions prévues par la loi HPST devront être assorties d’une rémunération spécifique. Plus largement, la profession demande une refonte du mode de rémunération.
Dans ce contexte, la FSPF propose la création de trois niveaux de services (essentiels, avancés et optionnels) appelant à être payés en plus de la rémunération à la marge commerciale (voir aussi « le Quotidien » du 12 novembre). Les services avancés pourraient ainsi être financés par l’assurance-maladie sous forme de rémunération à l’acte ou à la capitation, comme pour le pharmacien référent en EHPAD* (0,35 euro par jour et par résident), explique en substance Claude Baroukh, chargé de la prospective en lien avec l'économie et l'exercice professionnel à la FSPF. Les services optionnels (préparation des doses à administrer, portage de médicaments) feraient, eux, l’objet d’une tarification libre. Enfin, pour rémunérer les services essentiels, qui correspondent aux missions liées à la dispensation du médicament, la FSPF souhaite faire évoluer le forfait à la boîte de 53 centimes d’euros actuellement en vigueur. Une perspective qui n’enchante guère l’USPO catégoriquement opposée à cette option. « On va prendre aux uns pour donner aux autres avec le risque de faire disparaître certaines pharmacies et de déstabiliser le réseau », estime Gilles Bonnefond. Le président délégué de l’USPO ne soutient pas non plus la proposition de la FSPF d’augmenter la première tranche de la marge dégressive lissée (MDL). « La ministre a déjà dit qu’elle ne le ferait pas », argumente-t-il. Celui-ci mise plutôt sur l’arrêt des grands conditionnements qui coûtent aujourd’hui à l’officine 120 millions d’euros de marge.
Pas non plus emballé par la réaffectations du forfait de 0,53 euro prôné par la FSPF, Pascal Louis cherche plutôt des moyens de financer les nouvelles missions. Le président du Collectif des groupements avance ainsi qu’elles pourraient être prises en charge par les mutuelles, les laboratoires ou encore par les patients eux-mêmes. « Une partie de la population est certainement prête à payer des services aux pharmaciens », estime-t-il. On le voit, dans ce vaste chantier de la réforme de la rémunération, les pistes sont déjà nombreuses.
D’après deux tables rondes animées par le Quotidien du Pharmacien.
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