IL RELÈVE du lieu commun de constater les profondes transformations juridiques ayant affecté l’exercice officinal. La confrontation de ces nouveaux statuts à des règles plus anciennes, comme celles régissant la déontologie ou la discipline professionnelle individuelle, est susceptible d’être source de difficultés.
Il s’agit en effet d’éviter deux écueils : il ne faut pas que le choix de tel ou tel statut d’exercice soit la source de sanctions aggravées par rapport à tel autre, ou n’aboutisse à la dilution de la responsabilité professionnelle individuelle, voire au détournement de sanction. Si le principe relève de l’évidence, son application est parfois bien plus délicate comme en témoigne l’exemple ci-après.
Une pharmacie du sud de la France, exploitée en SELARL, est poursuivie, ainsi que ses exploitants, devant le Conseil régional de l’Ordre du Languedoc-Roussillon. Les pharmaciens se voient infliger une interdiction temporaire d’exercer la pharmacie pendant 3 mois et la SELARL une interdiction temporaire d’1 mois.
Un recours est organisé devant le Conseil national de l’Ordre des pharmaciens, devant lequel la SELARL fait valoir que l’interdiction temporaire qui lui est infligée implique sa fermeture pendant cette période, puisqu’aucun texte du code de la Santé publique ne prévoit la possibilité pour une SEL de se faire remplacer lorsqu’elle fait l’objet d’une interdiction temporaire d’exercer.
Elle stigmatise l’inégalité qui en résulte entre les titulaires de SEL et tous les autres pharmaciens (exerçant en nom propre, SARL ou SNC) qui peuvent toujours se faire remplacer en cas d’interdiction d’exercice.
Dans sa décision du 22 septembre 2008, le Conseil national juge que : « la circonstance que les pharmaciens exerçant sous la forme d’une SEL, contrairement à tous leurs autres confrères, soient dans l’impossibilité de se faire remplacer pendant la période où la SEL se trouve elle-même interdite, est sans influence sur la légalité de l’interdiction prononcée en première instance dans la mesure où cette impossibilité résulte des textes réglementaires en la matière ».
L’affaire est portée devant le Conseil d’État qui, par arrêt du 7 avril 2010, va casser la décision du Conseil national en vertu du : « principe d’égalité entre praticiens, selon leur mode d’exercice de la pharmacie ».
La haute juridiction vient fort opportunément rappeler que toutes les règles juridiques ne sont pas de même importance et qu’il existe, entre elles, une hiérarchie. Au sommet de cette hiérarchie, on trouvera la Constitution, puis les traités internationaux (au premier rang desquels les traités de l’Union européenne) et les principes généraux du droit.
En l’occurrence, c’est bien le principe de l’égalité de tous devant la loi qui est mis en application. La décision du Conseil national est sanctionnée pour avoir appliqué la loi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si cette loi (ou combinaison de lois) ne se trouvait pas en contradiction avec une autre règle juridique de niveau supérieur.
Le contentieux disciplinaire regorge de cas de ce type et ils sont souvent négligés. C’est donc une piqûre de rappel extrêmement salutaire que vient d’adresser le Conseil d’État, et, il s’agit d’un arrêt de principe qui a vocation à s’appliquer dans d’autres instances.
Dans le doute, référez-vous toujours aux principes fondamentaux et vous ne perdrez jamais le nord. Tel est le message de la haute juridiction et l’on ne peut que s’en réjouir.
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