C’EST un nouvel horizon qui s’ouvre pour le dossier pharmaceutique (DP). Désormais, les pharmaciens ne sont plus les seuls à être autorisés à le consulter. En effet, le décret du 9 janvier 2013 permet, à titre expérimental, d’en ouvrir l’accès aux médecins dans certains établissements de santé. Ce texte vient en application de la loi du 29 décembre 2011 relative au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé. Il stipule que « pour une durée de trois ans à compter de la publication de la loi, les médecins peuvent, dans certains établissements de santé et dans le cadre de la prise en charge des patients, consulter avec leur autorisation leur dossier pharmaceutique ».
L’objectif de cette expérimentation est de « tester l’apport de la consultation du dossier pharmaceutique pour le corps médical ». Le DP permettra ainsi aux urgences de « disposer d’une information instantanée, des traitements antérieurs, dans les cas notamment d’intoxication médicamenteuse ». Pour l’anesthésie et la réanimation, il aidera à « établir le risque anesthésique lié aux redondances de prescriptions, à des traitements anticoagulants, etc. ». Enfin, en gériatrie, il se justifie du fait de l’hébergement de « patients sujets à un risque iatrogénique accru, recevant un nombre de spécialités pharmaceutiques élevé ».
Pour Isabelle Adenot, présidente du Conseil national de l’Ordre des pharmaciens, « le dossier pharmaceutique est en train de vivre une nouvelle mutation. Il continue à être déployé auprès de professionnels de santé, afin de mettre en exergue la coordination interprofessionnelle autour du patient ».
Une trentaine d’établissements devraient être retenus, sur la base d’un cahier des charges annexé au décret. Les établissements intéressés disposent de deux mois pour envoyer leur candidature à leur agence régionale de santé (ARS). Cette dernière formule des propositions à la direction générale de l’offre de soins (DGOS), qui prend ensuite une décision, avec l’appui du Conseil national de l’Ordre des pharmaciens. Un arrêté ministériel précisera la liste des établissements retenus. Seulement quatre spécialités médicales seront habilitées à utiliser le DP : les anesthésistes-réanimateurs, les médecins exerçant dans les structures d’urgence et dans les unités de réanimation et ceux exerçant dans les structures de médecine gériatrique.
Cette évolution intervient quelques mois après un autre élargissement des utilisateurs du DP : depuis le décret du 5 octobre 2012, les pharmaciens exerçant dans une pharmacie à usage intérieur (PUI) peuvent, dans les mêmes conditions que les pharmaciens d’officine, consulter et alimenter le dossier pharmaceutique. « Nous avons reçu plus de 600 demandes d’établissements intéressés, souligne Isabelle Adenot. Le déploiement a commencé début janvier 2013 et deux établissements sont déjà raccordés. » À la différence des pharmaciens, les médecins participant à l’expérimentation ne seront pas autorisés à alimenter le DP, ils pourront simplement le consulter. La procédure reste identique dans tous les cas : après autorisation préalable du patient ou de son représentant légal, le médecin ou le pharmacien peut accéder au dossier en utilisant conjointement la carte Vitale de l’assuré et sa propre carte de professionnel de santé. En cas d’urgence vitale, si la connaissance des médicaments consommés peut se révéler essentielle à sa prise en charge, l’accord du patient n’est pas requis pour la consultation de son DP. L’expérimentation durera jusqu’au 29 décembre 2014. À l’issue, les agences régionales de santé remettront un rapport d’évaluation au ministre chargé de la Santé.
Déclarer les manquants.
En plus de cette évolution, le DP continue à bénéficier de nouvelles fonctionnalités. Il peut d’ores et déjà permettre au ministère de la Santé, à l’Agence de sécurité du médicament (ANSM) et à l’Institut national de veille sanitaire (InVS) de recueillir des données pour des raisons de sécurité sanitaire. Et d’ici à quelques mois, les pharmaciens pourront en outre déclarer leurs ruptures d’approvisionnement via le DP. L’Ordre est actuellement en train de travailler avec les autorités sanitaires afin de développer cette possibilité. L’instance pourrait se charger de prétraiter l’information en cumulant par exemple les manquants par département, par région, ou par médicament.
À l’avenir, on pourrait également imaginer que les médecins de ville obtiennent eux aussi un accès au dossier pharmaceutique. « Techniquement ce serait possible, admet Isabelle Adenot. Il faudrait cependant changer la loi, publier un décret et travailler avec la CNIL pour rendre cela effectif. Ce sont des démarches très longues. Actuellement, nous travaillons avec le ministère pour que le DP puisse alimenter le dossier médical personnel (DMP). » Mais, pour certains professionnels, le délai de conservation des données, actuellement de quatre mois, est un peu court. Cependant, rien n’est figé. Il serait même envisageable de l’augmenter, sous certaines conditions. « Il faudrait que les pharmaciens le demandent, explique Isabelle Adenot. Les pharmaciens hospitaliers notamment, peuvent ressentir le besoin d’avoir des données sur une durée plus longue. En revanche, il ne faudrait pas que le pharmacien d’officine soit inondé d’alertes concernant des médicaments qui ne sont plus utilisés depuis plusieurs mois. » La présidente de l’Ordre précise également que « les autres acteurs contribuent désormais, eux aussi, au financement du DP. Les établissements de santé paient une contribution annuelle et l’industrie pharmaceutique paie également lorsqu’elle transmet des informations de rappels de lots. Les officinaux ne sont donc plus seuls à soutenir financièrement le dispositif ».
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