« RIEN n’a vraiment changé depuis votre visite de l’an dernier (le « Quotidien du Pharmacien » n° 2742), j’exerce toujours dans un algeco de 15 m² », annonce Alain Fillonneau, pharmacien à Charron, commune de Charente Maritime ravagée par la tempête Xynthia, dans la nuit du 27 au 28 février 2010. On se souvient que ce courageux confrère avait alors transformé la salle des fêtes du village en hôpital de campagne, soignant la population avec les moyens du bord jusqu’au rétablissement des communications.
L’année qui a suivi ne fut pas moins difficile et l’avenir de son officine s’écrit toujours en pointillés. « Depuis la tempête, nous avons connu des phases d’espoir et de découragement car les discours ont changé régulièrement, explique Alain Fillonneau. Au début, on me disait « tout va repartir », puis mon officine a été classée en zone noire, ce qui signifiait que je ne pouvais plus continuer à travailler ici. Quant à l’indemnisation, on m’a dit que mon cas serait étudié en juillet… puis en septembre… puis en octobre. Là, on m’a signifié que je n’aurais pas d’indemnisation car l’État n’indemnise pas les commerces. Je n’avais pourtant pas l’intention de vendre, car j’entends bien conserver ma licence (chèrement acquise pendant dix ans de batailles juridiques, NDLR). Je souhaite simplement une indemnisation pour la partie habitation (dévolue aux remplaçants et aux nuits de garde) appartenant à la SCI qui détient l’officine. »
Entre-temps, les dégâts causés à l’officine ont, eux, été parfaitement indemnisés : « La Médicale de France a été présente et parfaite de bout en bout », souligne Alain Fillonneau.
NKM à la rescousse.
En décembre, suite à l’intervention du maire, du député et du président de la communauté de communes, Nathalie Kosciuskco-Morizet, ministre de l’Écologie, du Développement Durable, des Transports et du Logement, est venue rencontrer le pharmacien de Charron. Tout en rappelant que le pouvoir de décision était dans les mains de son collègue du Budget, elle a décidé de monter un dossier en défense. « J’ai travaillé avec son directeur de cabinet, explique Alain Fillonneau. L’issue m’est annoncée comme favorable, mais rien n’est officiel. Dans le meilleur des cas, je suis encore dans mon algeco pour six mois ; dans le pire… »
En effet, il est impossible de redémarrer l’activité dans l’ancienne pharmacie ; la zone noire interdit toute de présence de nuit. Les confrères d’Alain Fillonneau étaient pourtant d’accord pour prendre ses gardes, mais la préfecture a refusé. L’avenir du pharmacien est donc suspendu à un accord amiable avec l’État.
Mais cela n’empêche pas notre confrère d’entamer la construction d’une nouvelle officine. Le projet est en marche, pour une ouverture fin 2012. Alain Fillonneau n’entend pas abandonner la commune de Charron qui s’est battue pour faire naître son officine : « Je me dois à cette population qui a tant fait pour moi », disait-il après la tempête. Un an après, et malgré tous les problèmes rencontrés, il persiste et signe.
30 % de chiffre d’affaires en moins.
Pourtant, comme tous les commerces du village, il a perdu 30 % de sa clientèle et de son chiffre d’affaires. Son officine qui employait 5 salariés n’en a plus que deux (lui-même et son épouse). Et le village de Charron demeure fantomatique : 195 familles ont vendu leur maison et sont parties, ce qui représente près de 600 personnes sur 2 200 habitants ; les deux bourgs du village sont toujours séparés par la zone noire et les ruines causées par la tempête sont encore visibles.
« Les habitants ont subi un premier traumatisme avec la tempête, explique Alain Fillonneau. Puis un second quand tout a été fini et qu’ils se sont retrouvés dans une autre maison, loin de leur village. Beaucoup reviennent me voir pour en parler, ils se sont rendu compte qu’ils avaient perdu leurs souvenirs, leur façon de vivre… Certains ont plongé. La consommation d’antidépresseurs n’a pas diminué depuis la catastrophe. Le pire, c’est qu’ils vivront sans doute un troisième traumatisme quand débutera la démolition des maisons abandonnées. » On comprend la volonté farouche d’Alain Fillonneau de rester à leurs côtés.
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