« IL EXISTE des différences objectives entre un homme et une femme et, malheureusement, les tests cliniques n’en tiennent jamais compte », déplore Flavia Franconi, professeur de pharmacologie à l’université de Sassari (Sardaigne) et fondatrice de Giseg, l’association qui propose l’introduction de médicaments spécifiques selon le sexe auquel on appartient. Partant du principe que l’organisme de l’homme présente des différences anatomiques et biologiques avec celui de la femme, telle la vitesse de coagulation, par exemple, ou encore la répartition de la masse graisseuse, le poids ou la taille, cette association affirme que certains médicaments mal adaptés à ces différences peuvent entraîner des réactions négatives. Ce serait le cas de l’aspirine, par exemple, en raison d’une vitesse de coagulation du sang chez les femmes, différente de celle des hommes.
Comprimés roses pour les femmes, bleus pour les hommes.
Faut-il donc s’attendre à ce que les pharmacies vendent bientôt des petits comprimés roses pour les dames, et bleus pour les messieurs, afin d’indiquer la différence au niveau des dosages ? En Italie, le débat n’a rien d’une plaisanterie. « Pourquoi pas ? », répond ainsi dans un sourire Maria Casanova, pharmacienne dans le centre de Rome. Mais l’affaire n’est pas encore dans le sac, même si les choses sont en train de bouger. « Il faudrait d’abord commencer par tester systématiquement les médicaments sur les deux sexes », souligne Elisa Manacorda, dont le dernier ouvrage, « Le facteur X », justement consacré à la différence entre les sexes et ses implications en ce qui concerne la pharmacopée, vient de sortir en Italie. « Jusqu’en 2000, les femmes n’étaient jamais invitées à jouer le rôle de cobayes. Sauf lorsqu’il s’agissait de tester des produits pour soigner les organes féminins. Aux États-Unis, en revanche, les lobbies féministes ont poussé la Food and Drug Administration, à publier une recommandation rendant obligatoire les essais sur les femmes », note Elisa Manacorda.
Parité pour les essais cliniques.
Depuis que l’EMEA, l’agence européenne des médicaments, a suggéré aux pays membres d’établir la parité des sexes au niveau des essais cliniques, l’idée de dosages différents fait son petit bonhomme de chemin. Pourtant, certains médecins restent sceptiques. « Il faudrait effectivement cibler certains produits, mais de là à généraliser… Jusqu’à présent, les choses ont toujours fonctionné », estime Marco Macri, gynécologue.
Sur le plan économique, la commercialisation de produits ciblés selon les sexes aurait plusieurs retombées positives. D’abord pour l’industrie pharmaceutique, car, selon une étude récemment publiée, la consommation du sexe dit faible dépasserait de 30 % celle des messieurs. Puis, pour les caisses de Sécurité sociale, car elle permettrait d’optimiser les ressources, affirmait récemment Annamaria Moretti, directeur du département de pneumologie de l’Hôpital Giovanni XXIII de Bari, dans le sud de l’Italie, durant un congrès. « Continuer à prescrire des médicaments qui n’auront aucun effet sur les femmes est un gâchis énorme ! L’absence d’études paritaires au niveau des tests dans la pharmacopée constitue un réel handicap. D’un côté, ils pénalisent les femmes et, de l’autre, l’idée d’une prévention ciblée », s’insurge Annamaria Moretti.
La bataille sur les petits comprimés roses et bleus ne fait que commencer. Mais les défenseurs de l’inégalité des sexes devant la pharmacopée ont bien l’intention de la mener à terme en commençant par imposer la parité devant les tests.
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