SINON, à part travailler, il m'arrive de partir en vacances de temps en temps. Là, c'était une semaine en pleine campagne, à quelques kilomètres de la belle ville d'Arles, dans un mas magnifique. On pouvait visiter les marais salants, le musée du riz, le théâtre antique, l'amphithéâtre, les Alyscamps, le marais du Vigueirat, le pont Van Gogh, pousser jusqu'aux Saintes Maries de la Mer… On pouvait y voir des mouettes, des flamants roses, des taureaux, des chevaux, des hérons, des canards, des cygnes, des lézards verts, des rainettes, des libellules, et les énormes et inévitables moustiques camarguais. Très affairé, le moustique camarguais pique jour et nuit et quelle que soit la météo. Vous avez plutôt intérêt à penser à votre répulsif !
Bien entendu, persuadée qu'au printemps il n'y aurait pas de moustiques, qu'ils seraient de toute façon inoffensifs, et que les trois ou quatre éventuels ne piqueraient qu'à la tombée de la nuit, heure à laquelle on éviterait de traîner sur la pelouse, je n'avais même pas envisagé d'emporter une lotion anti-insecte. Personnellement, je m'en suis sortie avec une seule piqûre sur la cheville droite, ce qui n'est pas mal pour un séjour d'une semaine. Par contre, d'autres, autour de moi, devaient être drôlement plus appétissants : en plein milieu de la journée, bras, jambes, cous et visages, attaqués par des bestioles sanguinaires, se sont vite couverts de cloques rouges accompagnées d'une furieuse sensation de démangeaison.
Dans le mas, il y avait l'attirail complet : pulvérisateur insectifuge bio pour l'habitat, diffuseurs électriques avec liquide et avec tablette, spirales fumigènes… mais rien pour les promenades innocentes dans la nature. La situation ne s'arrangeant pas, le détour par une pharmacie était indispensable. La jeune fille était charmante. J'avais aussi besoin d'un coupe-ongles et elle m'en a proposé un rose et blanc à motifs de fleurs qui a aussitôt fait l'affaire. Mais quand je lui ai demandé un produit contre les moustiques qui soit à la fois préventif et curatif, le doute et l'hésitation se sont fait une place sur son visage.
Ce qui me paraissait évident ne l'était pas pour elle. Pourtant, derrière le comptoir, plusieurs étagères étaient chargées de flacons de différentes marques très connues, mais elle ignorait de toute évidence leur indication. Empoignant un spray sur l'étagère du haut, elle a rapidement lu et constaté que c'était uniquement une formule répulsive (j'aurais pu le lui dire…). En déduisant que tous les produits étaient identiques, ou ne voulant pas passer pour une ignorante : « ça n'existe pas, il vous faut deux produits, un pour avant et un pour après ! » Moi, interloquée, mais ne voulant pas la mettre d'avantage dans l'embarras : « vous êtes sûre ? »
Devant son aplomb, alors qu'elle avait à portée de main exactement le produit que je voulais, je n'ai pas voulu faire ma pharmacienne, et j'ai laissé tomber. « Tant pis, je ne prends que le coupe-ongles. » Cent mètres plus loin, je suis entrée dans une autre pharmacie où une autre charmante personne m'a immédiatement vendu le spray en question, parce qu'elle savait, elle, que la lotion, contenant de l'énoxolone (acide glycyrrhétinique), était à la fois répulsive et apaisante.
Jeune fille, quand vous aurez deux minutes, intéressez-vous aux produits conseil qui sont juste derrière vous, au moins formule, indications et contre-indications. Ce sera du temps bien utilisé.
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