DIDIER VAN CAUWELAERT est un écrivain prolixe, qui a obtenu maintes récompenses littéraires, dont le prix Goncourt à 34 ans (en 1994, pour « Un aller simple »), et qui est un des auteurs favoris des Français. « Jules » (1) s’inscrit dans cette lignée des succès annoncés. Jules est un labrador, un chien guide qui a servi avec amour et conscience sa jeune maîtresse aveugle pendant six ans, jusqu’à ce qu’une opération rende la vue à Alice. Attribué à un autre handicapé, il s’enfuit pour retrouver le vendeur de confiseries à Orly-Ouest – un CDD de la dernière chance pour cet inventeur trop gentil pour se défendre –, croisé avec Alice quelques jours auparavant. S’ensuivent une série de péripéties où l’homme et l’animal partagent la même obsession : retrouver la jeune femme. Un récit émouvant et bien enlevé, qui rend de bonne humeur sans tomber dans la niaiserie.
Le quatrième roman de la Québécoise Geneviève Lefebvre est l’histoire d’une working girl qui tourne en rond et n’en peut plus, à qui un petit chien donne une vraie leçon de vie. La réponse à la question que pose le titre, « Qu’est-ce qui fait courir Julia Verdi ? » (2), c’est d’évidence la recherche de l’homme de sa vie, après une cinquantaine de ruptures amoureuses ! Mais, surprise, c’est une jeune chienne abandonnée et qu’elle recueille sans trop savoir pourquoi, qui va la conduire à se remettre en question, à changer sa façon de vivre et de penser jusqu’à transformer la femme égocentrique et malheureuse en une personne aimable et prête à accueillir l’amour.
Une histoire d’amour et de chien est aussi au cœur de « Chaser, le chien qui comprend 1 000 mots » (3). John W. Pilley, professeur de psychologie en Caroline du Sud à la retraite et heureux maître de cette border collie, explique dans ce livre comment il est parvenu à lui faire mémoriser le nom de ses 1 022 jouets, qu’elle peut rapporter sur commande, à lui faire repérer dans le tas un objet inconnu, à lui enseigner plusieurs éléments grammaticaux et à la faire apprendre par imitation. S’opposant au paradigme de Descartes selon lequel les animaux sont incapables de sentiments ou de raison, John Pilley confirme que le mot-clé de l’apprentissage est le jeu, qui permet au potentiel des chiens, et autres animaux, de s’exprimer.
Autobiographies.
Avec « Moi, Cheeta. Une autobiographie hollywoodienne » (4), on entre de plain-pied dans le domaine du faux-semblant. Il semble que même l’auteur de l’ouvrage (paru en Angleterre en 2008, le prétendu chimpanzé de Tarzan devant s’éteindre en 2011) a signé d’un nom d’emprunt… Mais peu importe : James Lever nous introduit, via ces mémoires vraisemblables car issus d’un colossal travail de documentation, dans les dessous de la formidable industrie du divertissement au fil des 12 films de la série animée par Johnny Weissmüller (un cahier de photos rappelle cet âge d’or) et il offre plus largement un regard singulier sur soixante ans de cinéma américain – où sévit la véritable loi de la jungle. Cela par la voix d’un singe qu’on a hissé au rang de star mais qui n’a été qu’un objet, extrait brutalement de son milieu naturel pour devenir une bête de cirque. Humour simiesque garanti.
Claude Habib, agrégée de lettres, enseigne à la Sorbonne et a écrit plusieurs ouvrages, avec une attirance marquée pour le siècle des Lumières. Également romancière, elle donne avec « Nous, les chats… » (5), sous la forme d’un conte cruel, l’autobiographie d’un chat. Il n’a pas de nom, parce que ce chat sauvage vit en forêt, non loin d’une agglomération. Une vie difficile mais libre. Jusqu’au jour où, pour l’amour d’une belle passée du côté des hommes, il est victime d’une tentative d’empoisonnement ; avant de mourir, il tient à livrer ses pensées les plus « félines ». Que l’on aime les chats ou qu’on les ignore, on ne peut qu’apprécier ce conte plus vrai que nature, qui dit la réalité du comportement des chats et de l’homme face aux chats ; une vérité toute nue où le premier redevient un animal carnivore et où le second est remis à sa place : « Souvent son ennemi, parfois sa dupe, jamais son maître. »
Mises à mort.
Les animaux ne sont pas les héros de « la Partie de chasse » (6), l’œuvre culte d’Isabel Colegate, sur le crépuscule de l’aristocratie en pleine époque édouardienne, parue pour la première fois en 1980, adaptée au cinéma en 1985 par Alan Bridges et rééditée aujourd’hui avec une longue préface de Julian Fellowes (récompensés pour « Gosford Park » et « Downton Abbey »). Le récit se déroule à l’automne 1913 durant la grande partie de chasse traditionnelle organisée sur les terres de Sir Randolph, mais la romancière dépasse le spectaculaire formalisme du mode de vie de l’aristocratie pour s’attacher à sa logique profonde. Elle ne passe pas seulement en revue les rites et les devoirs de ce milieu, elle traite des motivations, des rêves et des frustrations de ceux qui en font partie, nantis ou domestiques, et qui s’accrochent, à la veille de la Grande Guerre, aux derniers vestiges de leur splendeur d’antan.
« Bêtes humaines ? Pour une révolution végane » (7) est un livre dérangeant, dans la mesure où il prône une véritable révolution humaniste visant à considérer les animaux comme nos égaux. Cet ouvrage collectif est réalisé sous la direction de Méryl Pinque, porte-parole de l’association Vegan.fr, avec des philosophes français et étrangers, et il est préfacé par Michel Onfray, qui invite à connaître la totalité des arguments et des thèses des végans, rappelant que « lorsque nous mangeons de la viande, il y a, derrière, un immense processus ontologique, idéologique, politique qui justifie la mise à mort des animaux ». Un manifeste qui pointe du doigt la bonne conscience derrière laquelle se retranchent les adeptes du bio et de la consommation éthique. Le débat doit s’ouvrir.
(2) NiL, 284 p., 19 euros.
(3) JC Lattès, 337 p., 19 euros.
(4) Le nouvel Attila, 348 p., 22 euros.
(5) De Fallois, 125 p., 15 euros.
(6) Belfond, 318 p., 15 euros.
(7) Autrement, 313 p., 21 euros.
Insolite
Épiler ou pas ?
La Pharmacie du Marché
Un comportement suspect
La Pharmacie du Marché
Le temps de la solidarité
Insolite
Rouge à lèvres d'occasion