« J’AVAIS au départ un goût pour le sport et une curiosité pour les contrées lointaines. Étant jeune, j’ai fait de l’aviron, de la natation, du parachute et de l’initiation à l’alpinisme. Je ne cherche pas la compétition mais le contact avec les autres, et le trek, qui est une marche en montagne, réunit cela », résume Patrice Lussiez, pharmacien à Amiens (Somme).
Depuis le chemin de grande randonnée 20 (GR20) qui traverse la Corse, il y a vingt ans, son palmarès s’est enrichi : la montée du Mont-Blanc, dans les Alpes, le Kilimandjaro, en Tanzanie, l’Himalaya à plusieurs reprises, le Haut-Atlas, au Maroc, la Diagonale des fous, à La Réunion, deux fois le Népal, la Terre de Feu, en Patagonie, le fleuve gelé du Zanskar, dans les Indes himalayennes, le Groënland… « Il faut bien se connaître. La montagne, pour un Picard, c’est un peu plus compliqué. On marche en groupe de cinq à dix personnes, assez en autonomie, mais avec des porteurs au Népal, des ânes, au Maroc. Au Groënland, on tirait des luges. Les marches correspondent à des étapes qu’on parcourt en 4 heures, quand c’est facile, jusqu’à 8 à 10 heures de marche par jour. Il faut une bonne condition physique, de l’entraînement, mais aussi pourvoir s’acclimater : à plus de 4 500 m d’altitude, les réactions changent. »
Des agences spécialisées proposent des treks, cotés de 1 à 6, selon leur difficulté. Patrice Lussiez a éprouvé sa résistance dans un hôpital spécialisé : « L’altitude peut créer des maux de tête, des insomnies. Certains ne le supportent pas, ils ont besoin du caisson hyperbare et être redescendus. Il y a toujours de nouvelles têtes dans un groupe, on est très dépendant de personnes qu’on ne connaît pas. La question est de bien s’intégrer à l’équipe pour que ça fonctionne bien. » Les marcheurs sont équipés d’un téléphone satellitaire, souvent d’une balise de détresse, mais certains endroits au monde n’offrent aucun secours possible. « Les fiches techniques de présentation des treks sont assez bien détaillées, remarque Patrice Lussiez. Mais des personnes ont toujours tendance à se surestimer, et abandonneront, quitte à mettre le groupe en danger. » Il se souvient ainsi avoir croisé au nord de l’Inde un groupe qui redescendait un mort. Dans les équipes, il y a de vrais alpinistes, des compétiteurs souvent, et aussi des vantards, mais « au-dessus de 4 000 mètres, il n’y a plus beaucoup de frime ! »
C’est le mental qui fait tenir.
Patrice Lussiez rencontre parfois la souffrance, ainsi que le sentiment d’éloignement et d’isolement. « Le froid fait craquer, et on soufre plus du froid que de la chaleur. C’est le mental qui fait tenir, même le plus fort. Il faut se surveiller, surveiller le taux d’oxygène dans le sang, ne pas dépasser le risque physique. Parfois, on ne regarde plus que ses pieds. C’est au Groënland que j’ai le plus souffert : il faisait - 40 °C sous la tente, et dehors, il y avait le vent. De retour à la maison, il faut un bon mois pour se réadapter. »
Le confrère d’Amiens prend pourtant le temps de regarder la nature, le Groënland qui fond, comme les neiges du Kilimandjaro, ou la mer de glace en France, les lacs népalais qui remplacent les glaciers. Il retient surtout le « choc des cultures » : les enfants « épanouis comme tout » avec les jouets qu’ils ont fabriqués, les peuples vivant en autarcie, les problèmes sanitaires, un peu partout. « C’est une prise de conscience permanente, je m’enrichis de contacts humains. L’équipe a une solidarité, c’est indispensable. Une officine aussi est tenue par une équipe. Je réapprends sans cesse le management. »
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