Conteur inspiré à qui l’on doit plus de 30 romans souvent primés (dont « Un aller simple », Goncourt 1994), Didier Van Cauwelaert a inventé une nouvelle forme de triangle amoureux, dont la pierre angulaire n’est autre qu’Einstein. « J’ai perdu Albert » (1) est le cri de détresse de la voyante la plus écoutée d’Europe lorsque l’esprit d’Albert Einstein, qu’elle abrite depuis l’enfance, déménage dans le corps d’un apiculteur, devenu garçon de café pour sauver ses abeilles. En un instant, cet insignifiant personnage dépressif acquiert le savoir absolu, tandis que la jeune femme survoltée perd tout pouvoir. Les voilà contraints de s'unir pour le meilleur et pour le pire. Une comédie de bon aloi que l’on retrouvera dès l’automne dans les salles de cinéma, par la grâce de l’auteur transformé en réalisateur.
L’académicien Jean-Marie Rouart s’est inspiré du destin de Maria Berdaiev, aristocrate russe exilée en France, et plus largement du scandale des Ballets roses qui a éclaboussé le milieu politique dans les débuts de la Ve République, pour dire « la Vérité sur la comtesse Berdaiev » (2). Très belle et très libre, Maria a gagné sa vie en étant actrice et mannequin puis en peignant des portraits au pastel, et surtout grâce à de riches protecteurs. En 1958, elle a 40 ans et elle est la maîtresse du président de la Chambre des députés Marchandeau, un socialiste et résistant qui ambitionne de briguer la succession du président de la République René Coty. Avant d’être compromis dans une sordide histoire de mœurs avec la comtesse.
Destins tragiques
L’Inde est pour la philosophe, romancière et essayiste Catherine Clément, qui y a vécu de 1987 à 1991, un point d’ancrage et d’inspiration. Elle y revient avec « Indu Boy » (3), qui raconte la trajectoire hors pair d’Indira Gandhi, qui fut quatre fois Premier ministre, qui a vaincu le Pakistan, aidé à la naissance du Bangladesh, tenu tête aux présidents américains, combattu les Sikhs du Temple d’Or, à Amritsar. Qui raconte aussi le difficile éveil de cette enfant élevée sans amour et éduquée comme un garçon, de cette fille de Brahmane qui s’est mariée aussi sans amour à un Parsi désargenté pour finalement divorcer, vieillir sans amour et contribuer à son propre assassinat en 1984.
C’est à travers les récits d’une dizaine de personnages réels ou fictifs, que la journaliste Anne-Marie Revol a choisi de brosser l’histoire du premier homme qui a fait le tour de la Terre en capsule spatiale, le 12 avril 1961, Youri Gagarine. « L’Étoile russe » (4) est le roman de ce fils de paysans qui a grandi en pleine Guerre froide et a conquis l’espace mais fut vaincu par la dictature, car obligé par les autorités de rester cloué au sol jusqu’à sa mort tragique à 34 ans, la seule fois où il s'élèvera à nouveau dans les airs en prenant les commandes d'un avion.
S’il est deux femmes qui ont poussé le conflit mère-fille à leur paroxysme jusqu’à en faire, bien qu’étant des « ladies », le stéréotype du carnage familial, ce sont bien Maud et Nancy Cunard. Toutes deux héritières de fortunes colossales, mais incarnant les forces contraires de la première moitié du XXe siècle : la mère recevait dans son salon artistes, écrivains et musiciens, tandis que la fille soutenait activement les Républicains pendant la guerre d’Espagne. Connue pour ses biographies de femmes oubliées, Alexandra Lapierre livre, dans « Avec toute ma colère » (5), des faits, des dialogues, des correspondances, des témoignages, pour aider à comprendre pourquoi elles se sont voué toute leur vie une haine féroce.
Bien qu’il s’agisse d’une autobiographie romancée, « Il y a longtemps que je mens » (6) est une forme d’exofiction tant l’Alexandre Brandy décrit semble loin de celui qui signe le livre aujourd’hui. Il y a dix ans, il se présentait comme le neveu de Khadafi, Bachar el-Assad ou Hariri pour visiter des appartements de luxe sous le prétexte de les acheter ; puis l’imposteur s’est fait braqueur (avec un pistolet factice), ce qui l’a conduit en prison pour deux ans. À l’époque, il ne parlait que d’« ennui » et de « jeu ». Dix ans plus tard, il raconte son odyssée dans un récit-confession qui, loin de se limiter à ses souvenirs d’enfance et d’adolescence, est entrecoupé de références littéraires ou historiques. À chacun de démêler le vrai du faux dans ce vrai-faux roman qui a pour thème le mensonge.
« La Femme murée » (7) est un hommage à une femme en marge qu’on a longtemps surnommé « la folle de Saint-Lunaire », de son vrai nom Jeanne Devidal. Elle est morte dans sa centième année, placée dans un « mouroir » alors qu’elle avait passé près de quarante ans de sa vie à transformer un modeste pavillon en une sorte de forteresse débordant sur la voie publique, laissant croître un tilleul dans le salon. Attirée par les mystères qui entourent ce personnage – finalement reconnue comme une sorte de Facteur Cheval au féminin –, Fabienne Juhel a bâti son récit comme on construit une maison, avec au cœur l'action de résistante de son héroïne, son arrestation par la Gestapo, la torture et les électrochocs qui alimenteront plus tard sa paranoïa.
(1) Albin Michel, 220 p., 19 €
(2) Gallimard, 204 p., 17,50 €
(3) Seuil, 208 p., 18 €
(4) JC Lattès, 316 p., 19 €
(5) Flammarion, 340 p., 21 €
(6) Grasset, 200 p., 18 €
(7) Rouergue, 188 p., 18,80 €
Insolite
Épiler ou pas ?
La Pharmacie du Marché
Un comportement suspect
La Pharmacie du Marché
Le temps de la solidarité
Insolite
Rouge à lèvres d'occasion