CHOISIR entre la santé et la culture ? Inconcevable ! S’offense le Front de défense de l’Hôtel-Dieu de Château-Thierry, l’association constituée le 18 octobre dernier pour s’opposer à l’annonce intempestive de la vente de l’Hôtel-Dieu par son propriétaire, le Centre hospitalier. Cette vente concerne en effet le bâtiment historique (17e et 18e siècles), devenu l’écrin d’un des plus beaux musées de la région, dont les 3 000 objets risquent d’être dispersés dans la nature, sans aucune garantie de bonne conservation et de mise à disposition du public, si aucune mesure de protection n’est prise. L’argument fort de l’association : une perte patrimoniale insupportable pour les habitants. « Une vente serait vécue comme une spoliation de notre histoire », s’inquiète Damien Charles, cofondateur de l’association. Et de notre histoire hospitalière peut-on ajouter.
L’affaire est incontestablement d’intérêt public. Le Front de défense de l’Hôtel-Dieu a donc demandé à la ministre de la Culture et de la Communication, Aurélie Filippetti, de procéder à une instance de classement des bâtiments de l’Hôtel-Dieu, d’où découlerait l’inaliénabilité des collections historiques : « Cette démarche temporaire permettrait de trouver des solutions pour sauver le trésor de l’Hôtel-Dieu », explique Damien Charles. Ce trésor a été découvert par hasard dans les années 1970 par Micheline Rapine, à qui la dernière sœur Augustine de l’hôpital avait confié les clefs du grenier en lui précisant d’en prendre grand soin. Ce qu’elle fit, avec une volonté extraordinaire, qui aboutit au sauvetage d’une collection d’objets d’exception : une magnifique apothicairerie, de nombreux instruments médicaux historiques, des meubles anciens, des objets de culte précieux, un splendide Largillière, un coffre moghol très rare, et bien d’autres richesses…
Le musée a ouvert ses portes récemment, en 2010, et souffre encore d’un manque de visibilité, malgré les efforts de la communauté de communes et de l’association Art et Histoire pour sa valorisation. Le Front de défense de l’Hôtel-Dieu dénonce aujourd’hui les arguments - qu’elle considère fallacieux - du directeur du Centre hospitalier, à savoir, entre autres, que le musée coûterait trop cher à l’hôpital, alors même que la communauté de communes avait proposé de prendre en charge une partie des frais.
Après le musée de l’AP-HP dont les collections n’ont plus de lieu d’accueil, l’Hôtel-Dieu de Lyon ou celui de Marseille, transformé en hôtel de luxe, jusqu’où ira-t-on dans la vente des bijoux de famille ? La culture ne peut être, à chaque fois, la cinquième roue du carrosse, s’indignent les défenseurs du patrimoine. Le Front de défense de l’Hôtel-Dieu de Château-Thierry invite donc à la mobilisation générale par la signature d’une pétition qui a déjà recueilli plus de 700 signatures. Elle recherche également des mécènes dans le cas d’une suite heureuse.
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