IL Y A QUELQUES WEEK-ENDS, je suis retournée dans le Vaucluse, dans la ville où j’ai vécu pendant deux décennies, et où j’étais arrivée juste après la fac. Bien entendu, je n’ai pas oublié toutes ces années, dont treize passées à travailler dans la même pharmacie. C’était un vrai bonheur, ce poste. Quand j’ai commencé, c’était une petite officine, récemment créée, j’étais la seule assistante (on disait comme ça à l’époque) et il y avait un préparateur, une secrétaire, et une rayonniste, en plus du titulaire. Au fil du temps, et assez rapidement d’ailleurs, l’équipe s’est renforcée, la pharmacie s’est transformée, agrandie, embellie. Des gens sont venus et sont partis, d’autres sont restés, comptable, apprentis, préparatrices et préparateurs, pharmaciens, associés, femme de ménage…
Mais pendant toutes ces années, il y avait une constante : le préparatoire, qu’on n’utilisait jamais (les préparations magistrales étaient, et sont toujours, préparées par un sous-traitant) était le lieu de rencontre des petits creux et des petits plaisirs. Nous disposions d’une bouilloire et d’une machine à café ou à chocolat en dosettes. C’était bien suffisant. Il y avait ceux qui avaient besoin d’un petit café en arrivant, c’était une sorte de réflexe pour commencer la journée. Ceux qui traînaient au lit et partaient à la bourre sans avoir pris le temps de déjeuner, et qui apportaient des viennoiseries pour tout le monde. Ceux qui avaient besoin d’une coupure en milieu de matinée, une boisson chaude, une douceur, une pomme, une galette de riz complet au sésame.
L’après-midi, ça reprenait avec ceux qui ne pouvaient redémarrer qu’avec une nouvelle dose de caféine. Puis, vers l’heure du goûter, ça devenait plus sérieux. Quelqu’un avait fait un cake, ou des crêpes. Ceux qui ne cuisinaient pas avaient acheté un paquet de cookies ou de palmiers. On découpait un brownie, on buvait un thé Darjeeling ou au citron. L’été, on se désaltérait avec de la limonade, on mangeait des esquimaux ou des cornets de glace. Il y avait souvent un événement ou un autre, et on se partageait alors un beau gâteau à plusieurs étages, avec de la crème et une jolie décoration. De toute façon il y avait toujours quelque chose d’ouvert et à disposition pour les petits grignotages.
À présent, avec ma petite équipe du matin, pas de pause gourmande. Chacune de nous trois a sa bouteille d’eau, et si l’eau est à bulles, c’est bien la seule petite fantaisie. Avec mon encore plus petite équipe de l’après midi, c’est plus convivial. Nous avons toutes les deux, Babette-la-préparatrice et moi, notre mug perso, et, dans un tiroir, nous entreposons notre réserve de thé. Thé vert pour Babette, thé Russian Earl Grey pour moi. À côté des sachets de thé, il y a une boîte de biscuits : au quinoa et aux pépites de chocolat, ou à l’épeautre et au sésame, bio et, si possible, équitable. La bouilloire est dans le bureau des comptables, on fait un brin de causette en allant chercher notre eau chaude, puis on déguste dans notre pharmacie, avant de reprendre le travail avec un petit plus d’énergie.
Ce fameux week-end dans le Vaucluse, je suis allée rendre visite à mes anciennes collègues. La pharmacie est devenue immense et magnifique, et je ne connais plus tout le personnel. Mais j’ai été accueillie par cette exclamation gourmande : « Oh… Louise, on parlait justement de toi il y a un instant, on se rappelait tes fameuses tartes à la rhubarbe ! »
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