Le Quotidien du pharmacien.- Observe-t-on véritablement une augmentation des risques liés aux usages thérapeutiques des plantes en France ?
Dr Jacques Fleurentin.- Absolument. On assiste en effet aujourd'hui à une véritable mondialisation des échanges et des plaintes. Internet amplifie ce risque car les gens y accèdent à des informations beaucoup moins validées que dans l'édition ou auprès de professionnels de santé. Ce risque tient autant dans la toxicité intrinsèque de certaines plantes non inscrites à la pharmacopée que dans les interactions que celles-ci peuvent avoir avec des médicaments. Il faut savoir que chaque année, nous importons 20 000 tonnes de plantes médicinales, principalement de Chine et d'Inde. Or chacun sait ce qui peut arriver avec ces plantes. En 1995, des cancers et des néphropathies graves ont ainsi été causés par des plantes frelatées en provenance de Chine. Quant aux interactions médicamenteuses, on est loin d'en avoir fait le tour. Nous citons souvent le millepertuis, mais ces interactions sont nombreuses et parfois méconnues. Pour nous, pharmaciens, la garantie d'innocuité est dans la monographie de la pharmacopée. Cela prouve qu'un groupe d'experts s'est penché sur l'espèce et a jugé que le rapport bénéfice-risque était favorable.
Le pharmacien est-il encore le mieux placé pour dispenser les produits à base de plantes ?
Je ferais deux réponses. En tant que pharmacien, je vous réponds oui, car nous avons bénéficié d'une formation nécessaire et suffisante pour délivrer des plantes et des compléments alimentaires. En revanche, si on souhaite aller plus loin et afficher une véritable spécialisation en herboristerie, on doit selon moi passer par des formations complémentaires. Ce qui est regrettable, c'est que les pharmaciens aient un peu délaissé l'herboristerie. Notamment parce que les médicaments conditionnés ont progressivement remplacé les plantes.
Que pensez-vous de l'idée de restaurer le diplôme d'herboriste ?
En tant que pharmacien, je dois avouer que cela m'attriste un peu de voir notre monopole de dispensation des plantes se faire grignoter. Mais du point de vue des patients qui souhaitent se soigner à l'herboristerie, il faut reconnaître qu'il n'y a pas beaucoup d'offres. Partant de là, on peut légitimement s'interroger sur l'opportunité de développer un réseau d'herboristerie. Mais la question de la compétence se pose alors. Car il conviendra de valider le métier par une formation établie en coopération avec l'université. On ne peut en effet imaginer que les écoles d'herboristerie sanctionnent elles-mêmes les diplômes sans qu'il y ait un référent universitaire, au moins pour les examens, au mieux pour les contenus. D'accord pour un diplôme d'herboriste, mais à condition d'ôter toutes les ambiguïtés réglementaires. Notamment en instaurant un contrôle des formations et des matières premières et un encadrement strict des allégations. L'herboriste pourrait faire du conseil en santé, de la prévention, tandis que le pharmacien ou le médecin phytothérapeute continuera de soigner.
Pourrait-on imaginer un double statut pharmacien/herboriste ?
S'il était restauré, le diplôme d'herboriste permettrait en tout cas à un pharmacien qui n'a pas d'officine, de tenir une herboristerie, ce qui est actuellement interdit. Un pharmacien qui voudrait développer la spécialisation dans son officine pourrait par ailleurs encourager la formation en herboristerie d'un de ses préparateurs.
Ce diplôme permettrait la vente de quels produits ?
Difficile de répondre à cette question. Car si l'on s'en tient à la vente de plantes, personne aujourd'hui ne peut tenir économiquement. Autrement dit, pour que le métier d'herboriste soit viable, il faut l'herboristerie et tout le reste… C'est-à-dire les compléments alimentaires, la diététique, etc. Mais ce périmètre reste encore à définir.
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