EN 2006 et 2007, deux grandes chaînes de drogueries allemandes avaient lancé, « expérimentalement », des dépôts d’ordonnances, dits « pick-up », dans leurs magasins : les clients pouvaient y amener leurs ordonnances et récupérer leurs médicaments un ou deux jours plus tard avec, selon les drogueries, une forte réduction du ticket modérateur restant à leur charge. Les deux chaînes étaient en effet « adossées » à deux pharmacies virtuelles installées aux Pays-Bas et qui, à l’instar de DocMorris, promettent des prix inférieurs à ceux des pharmacies classiques, tant sur les OTC que sur les prescriptions. Mais les pharmaciens traditionnels ont réussi, à plusieurs reprises, à mettre fin à ces expériences, arguant que les drogueries, en distribuant des médicaments, se rendaient coupables d’exercice illégal de la pharmacie. De plus, elles n’offrent pas, selon eux, les garanties de sécurité, dans le transport et la délivrance, assurées par les circuits pharmaceutiques classiques.
Il y a quelques mois, le gouvernement a accepté, à l’initiative du ministre libéral de la Santé, le Dr Philip Rösler, de faire inscrire l’interdiction des « pick-up » dans la prochaine refonte du règlement d’exercice professionnel des pharmaciens, qui doit être publié à l’automne. Mais la satisfaction des officinaux aura été de courte durée : les ministres de la Justice et de l’Intérieur viennent d’estimer que cette interdiction risquait d’être cassée pour des raisons juridiques, car le risque sanitaire lié à ce mode de distribution ne pouvait être avéré. En outre, la formule présente, selon ces ministres, des avantages économiques pour les patients, qu’il serait injuste d’interdire.
Ce démenti est un revers de plus pour le ministre Rösler, dont les projets en matière de santé sont régulièrement repoussés par le reste du gouvernement, et illustre une nouvelle fois, si besoin était, l’état des relations entre les deux partis de la coalition gouvernementale. Certes, celle-ci n’implosera pas pour une histoire de dépôt de médicaments en drogueries, mais les querelles entre les libéraux et les chrétiens démocrates sont encore plus violentes sur des sujets autrement capitaux comme la politique économique, monétaire et fiscale. En attendant, ce sont les pharmaciens qui font les frais de cette mesure, tout en sachant, de plus, que la rigueur sera au rendez-vous dans les semaines à venir : déjà confrontés à une forte augmentation des « rabais » qu’ils doivent consentir aux caisses de maladies sur les prescriptions, ils s’attendent à être largement mis à contribution dès que la prochaine réforme - que ce soit celle du Dr Rösler ou une autre - sera enfin mise en place. Première étape, le gouvernement vient de se mettre d’accord sur un système de fixation des prix des nouveaux médicaments, nettement plus régulé qu’actuellement, et qui devrait se traduire par une baisse des prix des nouvelles spécialités.
De plus, le gouvernement vient de décider de réformer le mode de rémunération des grossistes-répartiteurs, parallèlement à la baisse de celle-ci. Le syndicat des pharmaciens allemands, par la voix de son président, Fritz Becker, a aussitôt exprimé sa crainte que « les grossistes ne cherchent à compenser ces diminutions de revenus en les répercutant sur les pharmacies, ce qui pourrait mettre plusieurs milliers d’entre elles en danger ».
Par ailleurs, si le gouvernement donne raison aux droguistes sur les « pick-up », le tribunal administratif fédéral a rappelé, lui, dans une autre affaire, les devoirs des pharmaciens en matière de délivrance. Il vient ainsi d’interdire partiellement la mise en place de « distributeurs automatiques » de médicaments installés sur les façades de pharmacies, et qui devaient permettre un approvisionnement 24 heures sur 24 des médicaments, y compris pour les prescriptions. Le patient devait y insérer dans ce cas son ordonnance, qui était scannée puis honorée par un pharmacien, éventuellement à distance. Le médicament était ensuite distribué par l’automate, relié au stock de l’officine. Mais ces automates pourront uniquement être employés pour délivrer des OTC, et ne peuvent prétendre remplacer la lecture et la préparation de l’ordonnance au comptoir, a estimé le tribunal, ce qui en enlève bien sûr beaucoup d’intérêt. On notera néanmoins une certaine contradiction entre ce jugement, qui remet le pharmacien « physique » au centre du dispositif, et la prise de position sur les drogueries, qui confie au contraire à de simples vendeurs le soin de prendre les ordonnances puis de remettre les produits aux patients…
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