LA MORT, comme chacun sait, c’est l’affaire des vivants. Ils n’en finissent pas d’y penser, de l’imaginer et d’inventer dans l’au-delà des chemins illusoires que, contre toute raison, ils s’efforcent d’explorer. Les rites mortuaires, de quelque culture qu’ils relèvent, contribuent à l’effort désespéré des vivants pour prolonger la vie du décédé, qu’il s’agisse de la thanatopraxie, décrite avec une minutie d’expert (ou de journaliste) par Marie-Claude Tesson-Millet, ou de l’ultime photo de la dépouille, ou maintenant de ces gadgets, comme le téléphone portable, que l’on voudrait inhumer avec les corps. L’auteur montre que, avec un peu de technologie, pas mal d’amour pour le cher disparu et des circonstances exceptionnelles, l’héroïne du roman, médecin ultra-rationnelle et ultra-affranchie, finit par croire, pendant quelques instants, au paranormal. Ce qui est pour le moins une déroute intellectuelle.
C’est un projet très abouti (et très travaillé) que nous propose la romancière*. Son jugement sur les vivants est implacable. « Foutre la paix aux morts », le titre de l’ouvrage traduit fort bien son contenu. Son parti pris, c’est le traitement de la mort – et même de la vieillesse – par l’humour et la dérision. Aux sentimentaux ou à ceux que la nature a prédisposés au chagrin, elle ne fait pas de quartiers. Elle les contraint, non sans cruauté, à admettre, une fois pour toutes, qu’il n’y a rien au-delà de la mort, en tout cas rien pour les survivants, fussent-ils croyants. Modeste, Marie-Claude Tesson-Millet se garde bien de nous en dire plus sur l’âme et le corps. Elle nous demande seulement d’accepter la mort, en tant que départ sans retour. Et ce sujet, tout de même universel, elle l’expose en décrivant avec sensibilité la sérénité des cimetières et les caractères étranges des personnages, médecin gériatre sûre d’elle-même, photographe inventif, embaumeuse tendre avec les cadavres, croque-morts interloqués, spécialiste du marketing très entreprenant. Tout cela est écrit avec espièglerie, ce trait qu’elle a en commun avec les autres membres de sa famille.
« Foutre la paix aux morts », JC Lattès, 250 pages, 14 euros.
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